Merry X-mas, they said. || RP solo

Vacances hivernales, neige envahissante, caresse du retour à la maison et douceur d'une vue familière des paysages français tant regrettés de l'autre côté de la Manche. Joie inattendue de découvrir que le domicile était une plaie vive dans le cœur, élément manquant dans une contrée éloignée. Approche des fêtes, douces et chaleureuses, hâte de découvrir les cadeaux d'autrui, et que les autres découvrent les tiens. Au final, Noël c'est ça, fête de la générosité, de la bonté et de la tendresse, chaleur du feu dans l'âtre envahissant les pièces, rehaussant d'or les branches émeraudes du sapin. Et un regard de la même teinte manque à ta pulpe, son absence détonnant parmi les invités inintéressants. Pourtant, un voile se pose sur l'assemblée, la nourriture semble plus sèche, plus rance, l'ambiance s'alourdit et pèse sur les épaules de tout chacun. Le deuil n'a guère quitté la table festive, son regard avide guettant les pupilles de chaque compère comme un rapace en quête de viande putride. Les chaises s'additionnent et s'entassent contre le bois de la table alourdie de nourriture que personne ne touche. Puis finalement, l'invité final arrive, même chair et même sang de celui qui fait ta fratrie, et les discussions s'embrasent, mais à tout moment résonne l'excuse abominable, la remarque désagréable de "mes condoléances", comme si cela suffisait, comme si c'était efficace, comme si c'était utile. Les épaules s'abaissent progressivement, le visage se revêt d'un masque d'indifférence, d'un masque mensonger, d'un masque qui ne se porte que lorsqu'on ne sait plus comment continuer à avancer. Les cadeaux sont échangés, les conversations taries et assourdies, les vœux semblent vides de toute consistance et importance. La soirée se finit, les invités s'en vont, et la famille reste, endeuillée, blessée et effondrée. Mais tu n'appartiens pas à ce paysage, tu n'appartiens pas à cette douleur commune, alors tes pas te mènent jusqu'à l'étage où ton frère est allé se reposer, et ta main cogne contre le bois froid de sa porte, mais aucune réponse ne se fait entendre alors la supposition de son sommeil se matérialise dans ton esprit.
Journée froide et mordante, alors que tes pas sont précipités sur le parquet ciré, alors que le pressentiment est fort et que les coups s'intensifient. Ta mère cogne à la paroi de la chambre de ton frère, larmes coulant sur son visage émacié, conscience que ce détail avait échappé à ton regard lors des soirées antécédentes. La baguette est extirpée et le coup fait tout exploser, la porte, un pan du mur, puissance non mesurée d'un sort précipité. La femme se retrouve à terre plus loin, alors que tes pas heurtent le sol, morceaux s'enfonçant dans la plante des pieds fragile et aisée à blesser. Pourtant, il est trop tard, le cri échappe alors que la chaise bascule et tombe, que le corps se suspend dans le vide et qu'un craquement morbide s'entend, preuve tangible et incontestable qu'il est trop tard, que toute action sera vaine, que rien ne pourra être changé. Les genoux heurtent le sol, les larmes se mettent à couler et un hurlement quitte ta poitrine, baguette étincelant à tes côtés, flammes incendiant les draps emmêlés. Rien n'a plus de sens, rien ne semble logique, et la pulpe est secouée de frissons, de spasmes dépersonnalisant, car tu aurais dû savoir, tu aurais dû comprendre, mais tu n'as rien voulu écouter, tu n'as pas voulu voir, fermant les yeux sur une détresse qui pourtant ne pouvait pas t'être cachée.
Au final, tu n'étais rien d'autre, qu'inutile.