That throws me to the ground
Il s’agit de la 9ème année où je mange ici, une de plus depuis que j’ai redoublé, loin d’être la dernière. J’aime bien venir ici, par habitude, je m’assois toujours à la même place ou j’essaye d’être la première : une qui me permet de distinguer le pupitre des directeurs, une qui ne me fasse pas tourner le dos à la porte, enfin une où les énergies circulent de manière fluide.
Alors, je sais qu’il est juste question
« d’aller manger un bout ».
Et que je suis, sans doute,
« chiante » (je reprends ici les propos de mes camarades).
Mais en même temps, hein, franchement, quelle idée d’aller manger après 11h47 ?
Certainement pas une de mon esprit névrosé.
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« Alors Wendy ? » Comme à mon habitude, j’affiche une mine neutre, avec mon regard qui vogue dans le vide, tout en dodelinant de la tête pour afficher mon vague intérêt à la conversation du moment.
« C’est quoi ton avis sur la question ? »« De quoi ? »« …Tu trouves ça normal qu’il y ait des moldus et des cracmols à l’école ? » Je devine une lassitude dans la posture de mon interlocuteur, ses paupières légèrement repliées laissent même présager une profonde déception pour ma personne, incapable de rester concentrée pendant plus de 10 minutes.
« J’en pense rien. »« Donc ça veut dire que tu es pour ? » « Ça veut dire que j’en pense rien. » « C’est pas une réponse ça. »« Si. »« Ben non. » « Merde. »« Quoi ? »« Rien. »★ ★ ★ ★
Ils me font de la peine ces gens, cela fait bien 3 ans qu’ils sont là… (Non Wendy, 6 ans) Ah pardon, le temps passe bien vite. Je disais donc : cela fait bien 6 ans qu’ils sont là et on parle d’eux comme si c’était encore la première année ! A polémiquer à leur place si c’est bien leur place… (Je me répète là, non ?)
Je veux dire, si Mrs. Scamander en a décidé ainsi (et c’est pas n’importe qui : une grande Dame) c’est qu’elle estime qu’ils ont leur place ? Quoique Mr. Scamander est un grand homme aussi (le frère de cette grande Dame !) et il n’est pas d’accord avec elle… C’est peut-être là tout le nœud du problème, comment diriger cette école avec deux personnes si opposées ? Qu’est-ce que je ferais moi à leur place ? Oh bah moi, je démissionnerai ! De sûr ! J’ai trop mauvais caractère pour diriger avec quelqu’un d’autre… Puis c’est beaucoup trop compliqué de diriger une école, trop de pouvoir, trop de paperasses, trop de deadlines à tenir (J’ai déjà des devoirs à rendre de toute façon) et tout ça au milieu de querelles, d’enfantillages… Non clairement, si quelqu’un vient un jour me voir et me dit « Tiens Wendy, ça te dit de diriger l’école ? » Je lui répondrai « Vas bien te faire voir ! » (Et encore, je suis polie).
Mais je crois que le pire dans tout ça, c’est qu’on parle de tous ces élèves dans leurs dos, élèves qui ont choisi d’être là que je sache ! (Pitié, faites que ce soit le cas, sinon c’est que vous le cherchez vraiment…) Pas étonnant qu’ils aient créé le « Club des droits des non-magiques », je suis en total soutien avec eux ! Peut-être que je devrais leur acheter un badge…
Non, non, très mauvaise idée, trop de problèmes quand on affiche son militantisme.
Puis j’ai déjà tellement galéré à trouver ma place.
Entrer dans une école, se faire des amis ou plus difficile encore : intégrer une bande. Avez-vous seulement idée des efforts que cela demande ? Participer à des moments de rassemblement, festoyer, discuter avec tout le monde même si on a rien à se dire, se tenir au courant des derniers potins, se mettre en valeur, surenchérir, se rendre parfois complice de petites moqueries, puis viennent très vite les sentiments de culpabilité, de gêne, d’hypocrisie.
Une corvée de tous les jours en échange de quelques grains de reconnaissance pour survivre.
Tout perdre pour tout recommencer ? Hors de question.
Chacun sa peine.
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La Bête est entrée dans ma chambre.
Je répète, au cas où vous auriez mal lu : la Bête est entrée dans ma chambre.
Elle n’aurait pas pu tout simplement se faire oublier dans les couloirs ou se faire adopter par d’autres élèves qui passaient par là. Il fallait que cette créature du Diable soit aussi fidèle à sa Maîtresse.
Je soupire en allant remplir sa gamelle, animal démoniaque ou pas, je me devais de le nourrir après tout.
Le félidé me regarde lui calmement, mais le fait qu’il fouette sa queue de gauche à droite à ras le sol, me rappelle que je suis déjà damnée.
Vous croyez que le règlement intérieur a quelque chose contre l’exorcisme sur les animaux ?
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Putain, j’y comprends rien, bordel de compte déconnecté, que tu es chiaaant.
En plus de me rendre grossière.
Si y’a bien une chose à laquelle j’ai aucune patience c’est bien la technologie moldue. C’est officiel, et je grave mes mots dans le marbre de l'école: si Hognotes venait à disparaître, je n’aurais plus à me retenir de jeter mon portable par la fenêtre.
Je croule sous les applications, toujours à cause de Bidule ou de Machin qui me jurent sur leur sang que « c’est super pratique et facile à utiliser », je suis une faible alors à chaque fois je me dis que c’est la dernière que j’installe, et de nouveau je multiplie les noms de compte et de mots de passe pour limiter les risques de « piratage » ( ??? ), que j’écris sur mon parchemin qui devient aussi long que mon bras…
Pour au final abandonner leur utilisation au bout de trois jours.
Je regarde l’air totalement ébahie et impuissante mon téléphone, je me demande comment j’ai pu me retrouver avec quatre écrans d’accueil et un nombre infini de notifications. Je suis l’équivalent humain d’un
Noxia et le réaliser me rend encore plus grossière.
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Mes mains tremblent.
Y’a des matins comme ça où on se dit qu’il vaudrait mieux ne pas se lever.
Pour moi c’est pire, j’ai beau me cacher plus profond sous les draps, j’ai l’impression qu’elles me serrent le cœur, qu’elles se propagent dans ma tête.
Bon.
Je décide de sortir du lit, je fais une rapide analyse de mon environnement. Il est vrai que ça fait un moment que la chambre n’a pas été rangée, ça m’est toujours très délicat de toucher aux affaires des autres même si elles jonchent le sol, mais je me dis qu’exceptionnellement remettre au moins quelques chaussettes orphelines sur la chaise ne devraient pas m’attirer de foudres. Je lance un discret
Ordinum, j’ouvre les fenêtres, je désencombre mes bronches, c’est déjà un petit peu mieux.
Dans la salle de bain, je vide mon pot de gros sels, je brûle un encens, j’inspire à grande bouffée mes huiles essentielles.
Et malgré tout j’ai l’air perturbée en allant au salon commun.
Je regarde les couleurs des murs, elles ne me plaisent pas, j’en visualise d’autres, elles ne vont pas avec les meubles, j’ai envie de pleurer.
Mes poches débordent de grigris, mais moi je me sens toujours aussi vide.
« Eh…Qu’est ce qui se passe ? »Rien. Je suis conne. Moche. Rien ne va. Tout va mal. J’veux même pas qu’on me regarde.
Mes lèvres palpitent sans qu’aucun mot articulé n’en sorte.
« Kdfkjfjdfdk… »« ...Oula, viens t’asseoir. T’aimes bien le thé ? »Je suis docilement, la tête basse, j’accepte la tasse qui m’est proposée, j’arrive petit à petit à inspirer et expirer mes doutes.
« Alors ? » « …Je ne sais pas, c’est arrivé si vite. »« Prends ton temps. » « Je me suis levée et j’ai senti qu’il était là : ce manque en soi. » « Un manque ? »« Oui, il vibre, ses ondes sont invisibles mais elles sont bien là. Tu sais, c’est un peu comme jeter des pierres dans un lac. »« Comme un signal radio ? »« C’est ça, dans ce genre de moment j’ai l’impression d’avoir un grand trou noir à l’intérieur. » « …Est-ce que je peux aider ? » « Je sais pas…Je peux toucher ta main ? »« Vas-y. »J’ai serré soudainement ses doigts.
Je me suis vue toute petite parcourant un livre d’images, je pouvais y voir la douceur, la chaleur, comme ces dessins enfantins au grand soleil barbouillé de jaune.
Petit à petit, mon malheur s’éloigne par ricochet.
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▲ Croit en la réincarnation, au karma et pratique la méditation, tout ça sans se dire boudhiste.
▲ S’intéresse aux médecines non conventionnelles (sa dernière lubie est la magnétothérapie).
▲ Passionnée par la cléromancie (art divinatoire consistant à lire l’avenir par tirage au sort), elle souhaite se spécialiser à la kybomancie (qui se fait à travers les dés), s’exerçant déjà en privé.
▲ Est par contre nulle au tarot.
▲ Collectionne les pierres, quartz, et autres types de cailloux.
▲ A défaut de pouvoir entretenir ses plantes, il n’y a que des cactus dans sa chambre.
▲ En guise de chaudron, elle utilise un petit pot en céramique fait en classe d’art.
▲ A une sainte horreur des insectes, papillons y compris.
I swear that you should hear it
It makes such an all mighty sound
They live out their lives so purposefully
« Alors ta famille ? Comment elle est ? »« Oh, je pense que c’est un peu tôt pour qu’on pense à se marier. »« Haha ! Mais non, je suis juste curieux. »« C’est une question difficile, laisses moi réfléchir. »« Vous êtes combien ? »« Il y a papa, maman, Lucan mon frère… »« C’est une petite famille. »« Oui enfin, on l’est depuis que Grand-Mère est morte ! »« …Je suis désolé. »« Ce n’est rien, je l’ai jamais connu. »« …Ah ok (air soupçonneux) pourquoi tu en parles alors ? »« Oh, tu sais, j’en ai tellement entendu parler que c’est comme si elle était toujours présente ! D’ailleurs, très souvent je suis tentée d’envoyer une lettre pour lui fêter sa fête… Sauf que ben, je peux pas, je pourrais pas avoir de réponse, vu qu’elle est morte ! Haha ! »« …Hmhm. Et ton frère ? Il est scolarisé ici ? »« Ah non alors ! Il est Cracmol. »« ...Et ? »« …Et il est beaucoup plus vieux que moi, quand moi je suis entrée à Poudlard, lui il venait d’entrer au Lycée, puis tu sais, ça l’a jamais trop intéressé. Pour lui, il y a le monde de la magie, puis de l’autre côté le monde non-magique…Et il a choisi ce côté-là. »« C’est le seul Cracmol ? »« Non, non, il y a mon père aussi. En fait, seulement les filles sont sorcières dans ma famille. »« Ah, c’est marrant. Tu t’entends bien quand même avec ton frère ? »« Ca va. Comme un frère. »« ...Il t’emmerde quoi. »« Ouais. »Le surnom « Mon petit Troll des montagnes » hante encore mon esprit. Surnom tiré des jouets qu’il avait durant son enfance, des figurines en plastique affreuses et dont les cheveux étaient dressés sur la tête. Une horreur donc, mais je n’étais pas très jolie avec les cheveux longs.
« Du coup, ils savaient déjà que t’allais être sorcière ? » « Bien sûr, c’est même la première chose qu’on a dite à mon père quand il a commencé à envisager les choses sérieusement avec maman. »« Ça lui a pas fait un choc ? »« Il s’est mis à faire des recherches poussées sur sa propre généalogie et c’est comme ça qu’il a appris qu’il avait un parent éloigné sorcier –un grand-oncle ou je sais plus quoi-. Il s’est découvert Cracmol assez tard, mais au fond, il s’en doutait un petit peu, surtout depuis qu’il s’est rapproché de ma mère. » « Classe. »« Assez, oui. »« Si seulement dans les autres familles c’était aussi simple. »« Carrément. »★ ★ ★ ★
Je baisse la tête.
Carrément. Oui, sans doute. Enfin, ça l’était au début. Déjà lancée sur les rails d’un destin tout tracé, mon histoire n’avait aucune fausse note : j’avais reçu mon courrier à 11 ans comme l’avait présagé maman, j’ai eu les longues conversations jusqu’à tard le soir aux repas de famille (et qui continuaient même quand j’allais me coucher) et j’ai eu cette journée dédiée aux préparatifs de ma rentrée. Je me souviens, maman m’avait acheté un manteau en feutrine exprès pour l’occasion.
Tout était parfait.
Je connaissais même déjà le bois de ma baguette, car c’était pareil que maman et mémé : une baguette en tilleul argenté. Ça tombait bien, le vendeur l’avait présenté en vitrine, j’ai pu l’observé longuement avant de la serrer entre mes petits doigts.
Puis c’est là que ça s’est compliqué.
« Le destin est quelque fois capricieux. » Avait ironisé le vendeur en voyant mes parents, surtout ma mère, très gênés.
« Revenez demain, je suis sûre que votre petite trouvera son bonheur quand même ! »C’est ce qu’on a fait.
Adieu la baguette de Mémé Tiana.
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▲ Père bibliothécaire, ayant connue sa mère sur son lieu de travail.
▲ Sa mère avait prédit qu’elle tomberait amoureuse ici.
▲ Le frère de Wendy est banquier dans le monde des Moldus.
▲ Etait une élève relativement discrète et réservée en BUSE, reconnaissable uniquement par ses cheveux blonds aussi fins que de la paille et dont la frange dissimulait son visage (et ses boutons).
▲ Les a coupés dès son entrée en ASPIC et a traversé une période compliquée : dans le déni, Wendy surinvestit les cours de divination (au point de s’épuiser) : boule de cristal, psalmodie, tarot, ouverture d’entrailles (de pigeons, rassurez-vous) (
)
▲ A mis 2 ans à intégrer l’arrivé des Cracmols et des Moldus à Poudlard.
▲ A l’aube de sa 6ème année, durant les vacances d’été, son chat est mort (écrasé) chez ses parents. Pour limiter la peine de leur fille, les parents ont décidé de le remplacer par un autre chat (issu de la même portée que le précédent). Si l’illusion a pu tenir quelques mois, Wendy s’est rapidement rendu compte du changement de comportement de son chat (d’habitude très affectueux, maintenant distant et agressif). Elle pense que c’est un imposteur qui aurait assassiné l’ancien Pompom afin de prendre sa place.
I envy the spiders, the squirrels and seeds
They all find their way automatically