Oh my Odin | ᚾᛁᛖᛚᛊ

Élans glacés, contacts froids et denses, on s’oppose a la surface lisse, oracle captieux des émois. On n’y mire point que son enveloppe, le réflecteur donne en écho plus de nous même que nous ne voudrions bien nous l’avouer. Au bord de l’émail trouble d’un évier, il collecte d’une main d’épais pétales immaculés. Les yeux fuient les yeux imités, épinglés sur le métal poli. Qui sait ce qu’il pourrait y lire, qui sait ce que son reflet pourrait lire en lui. La foi profonde que ce qui se mire la n’est qu’homoncule. Inspiration. Son menton se relève et ses doigts cessent de profaner les gracieuses corolles. Sa première supplique au miroir relève d’interrogations profondes.

Vois t’on ainsi l’autisme que des psychologues ont ratifiés dans le livre de sa vie ? L’encéphale troublé transparaît il par delà les arcades sourcilières ? Le syndrome d’Asperger, ainsi nommé, avait apporté plus de désagrément a sa vie que n’avait rapporté l’avantage d’une hypothétique possession d’une vivacité intellectuelle accrue. Symptomatiques, des réflexes et des ressentis le refluaient en dehors du cadre de la société et il s’en retrouvait a endosser un ermitage qu’il avait appris à aimer.

Peut être ses lippes lasses trahissent sont expressivité limitée a ses élans d’humeur. Niels inhibe beaucoup son être ce qui le fait paraitre insensible alors qu’en réalité l’empathie est le pire de ses maux. On le dit fort volontiers froid et introverti alors qu’il se retrouvait riche et complexe. Un legilimen, perçant l’écrin de sa retenue, lirait en lui un esprit aux lignes complexes, arabesques sinueuses de pensées ininterrompues, questionnement et remise en question, imagination puissante, calculant au détail le monde l’entourant.

Inconfortable symétrie de sa position l’encouragerait a fuir l’analyse, mais le mur de fer de sa volonté intrinsèque le soude a cette place. Fuyard, il est souvent fuyard, lorsque naît le sentiment d'écoeurement des conditions sociales et lors des contacts physiques. Il tente d’un mouvement de main exorciser l’ange accusateur en remontant sur son nez ses lunettes et délivrant son front de ses boucles brunes. Si cela offre un contretemps, cela ne fait pas oublier sa faiblesse, la puissance magique ridicule que cache le corps supposé être d’un sorcier.

Beaucoup d’enchantements lui font défaut, la magie revêche se dérobe a lui et le laisse parfois démunis. Dans cette image offerte d’adulte, fané les rêves de gloire et puissances futures, fanées les envies de pousser les les limites du monde, fané l’idéalisme saugrenu. La mer des miracles s’était retirée laissant derrière elle aigreur et amertume, des lendemains uniformes. On ne peut dire que ce qu’il fut dans le passé aurait admiré ce qu’il est dans son présent. Il a toujours été plus aisé de lire en nous ce qui nous dérange et démange, le poids de nos échecs.

Parfois la vue omet des gouts particuliers, des perles rares d’amour,  le dévouement au travail. C’est ainsi qu’il soupire, délaisse la vision figée dans la plaque de verre et saisit le bouquet blanc aux fragrances charnues. Il ne se fait jamais attendre.

15 Decembre.

Il fait résolument froid du haut de la tour des Serdaigles. Une main hasardeuse s’extirpe d’un édredon pour balayer la surface de la table de nuit la plus proche. Dans ses paumes assoupies se logent le plastique glacé de la monture de ses lunettes qu’il se colle sur le nez. Ses yeux papillonnent, observant le corps emmailloté dans un pyjama trop grand de Fergus, compagnon de chambre et accessoirement meilleur ami. Un écossais pur whisky, trimballant des intonations scot et un nom de famille en « mac ».  Le genre de type qui trimballe plus de fantômes chez lui que dans une maison hantée. Un instant, les regard se croisent, jusqu’a ce que Niels décide de redresser son corps d’adolescent trop maigre et mal proportionné. Vraiment pas le gars que les filles ont envie d’inviter au bal. De toute façon, avant de voir sa figure, une colossale réputation de nerd le précède. On attribue ce coté attiré par l’étrange au père du jeune binoclard qui est évidement un moldu et comme beaucoup le spéculent, les moldus sont fondamentalement étranges.

- J’ai pas le courage d’aller en divination a cette heure

Baille un Fergus qui tente de se préparer.

- M’en parle pas…

Marmonne un Niels peu loquace a l’éveil, ouvrant mollement ses tiroirs. Il est des jours comme ça ou aussi fatigue qu’on soit, on est obligé de fournir des efforts. Tout ce mouvement de préparation mêne vers la grande salle. Deux têtes bien faites de Serdaigle déambulent les couloirs et escaliers commençant à se charger de monde. Le mouvement unique de la chorégraphie du matin. Fergus étire sa bouche dans un long bâillement. Niels est fondamentalement d’une humeur crasse au réveil avant d’avoir ingéré quoi que ce soit alors il n’ouvre pas la bouche. Son ami le sait, son ami ne le provoque pas. Ils s’installent dans un endroit prometteur en pâtisserie. Fergus se pâme devant le vol des hiboux, Niels a le nez dans son assiette.

- T’as pas hâte toi qu’on soit Noël ?

- Tu sais moi, Noel je m’en fiche un peu

- Arrete va pas me dire que tu te fiches des cadeaux, de la fête et du bal ?

- On le fête pas a la maison. Et pour le bal, aucune fille que j’invite n’accepte de danser avec moi.

- C’est parce que tu te met la barre trop haut. Tiens invite Rosa, elle est folle de toi. Elle arrête pas de te citer tout le temps

- Si je danse avec elle c’est la mort du peu de dignité humaine qu’il me reste. Tu l’as regardé ?

- Moi j’essaye de t’aider, mais si tu préfère y aller seul, c’est ton choix

Si Niels s’exaspère, c’est en silence et en continuant a manger. Le courrier débarque ensuite sans aucune lettre pour eux, ce qui sonne le départ vers la divination. Les comparses escaladent la tour, se plaignant de l’inexistence d’ascenseur ici  - L’étude des moldus apprend beaucoup de choses utiles- pour enfin entrer par la trappe exigüe vers la salle embrumée. Les odeurs riches et lourdes d’encens font penser a un temple asiatique, pense Niels dans un instant de réflexion éclairée. Aujourd’hui c’est boules de cristal. Il s’adonne a la contemplation de la sienne puis gratte  des notes sur un parchemin. Tout converge vers une conclusion qu’il n’arrive pas a tirer. Il espère trouver la preuve dans son avenir qu’il deviendra réellement puissant et respecté un jour. La professeure accourt lui prêter main forte pour l interprétation. Elle observe les notes et la boule.

- On voit un cycle, un cycle renouvelé. Vous reviendrez ici dans le futur. Sur votre route il y’aura un personnage important, sans doute le directeur. Mais cet endroit sera différent, cela se voit aux fluctuations de ces lignes. C’est rare de voir autant d’informations dans la boule de cristal d’un élève, sachez le.

Il médite a cela jusqu’a ce qu’a coté Fergus trépigne d’avoir un dragon dans sa boule, ce qui veut surement dire qu’un jour il pourra élever des dragons, ce qui le rend heureux. Niels lui sourit, pas mécontent non plus de sa prédiction. Revenir ici c’est pour être professeur et pour être professeur a Poudlard il faut être fort. C’est la journée des prédictions positives. En sortant de la salle ils se partagèrent leur enthousiasme, enjoués, déambulant jusqu’a la salle d’Histoire de la Magie.

Le cours d’histoire, mené par un professeur qui a un mal certain a garder l’attention de ses élèves, porte sur les racines de chacun. Donc tout le monde a le droit a son passage au tableau pour parler de sa vie. Tout le monde n’est pas enchanté mais au moins ca permet de faire autre chose que gratter du papier. Niels, convoqué rapidement a venir exposer son cas, découvre en ce jour qu’avoir en face de lui une classe n’est pas trop désagréable, étant donné le fait qu’il n’est obligé de regarder personne dans les yeux. Donc il oublie un instant qu’il est maigre, que ses cheveux bouclés lui tombent sur le front, qu’il a de l’acné et un vague début de barbe et des lunettes assez grosses pour son visage et il déclare :

- La famille de ma mère est une vielle famille sorcière du Danemark. Leur histoire est liée a celle de Durmstrang. Chez eux, c’est une tradition d’apprendre a tout les enfants a parler le vieux norrois, pour lire plus facilement les ouvrages en runes nordiques. Ma mère s’est installée a Rotterdam avec ses frères et elle a rencontré mon père la bas. Mon père est un moldu et sa famille vit depuis longtemps aux Pays Bas.

Il ne veut pas ajouter de détails sur son père, juif et moldu pour ne pas avoir de questions. Tout le monde a bien compris comme ça. Il se rassoit pour écouter Fergus parler de sa maison dans les Highlands, d’énumérer ses quelques fantômes familiaux, de faire rouler son accent celte jusqu’a se faire interrompre dans sa verve. Il le regarde se rassoir contrit.

- C’est dommage, moi je ne me lasse jamais de l’entendre ton histoire

- Toi t’aurais du parler de ton arrière grand père qui faisait des sorts de fou avec des rituels runiques. Ca les aurait scié

- Oh tu sais je préfère pas avoir des questions. Ca me va bien a moi les choses simples

Et sur ce le cours continue, la matinée s’éclaire et tout le monde se retrouve bien vite projeté dans les couloirs. Toutes les maisons pêle mêle avec leur petite taches de couleur de cravate. Les deux jeunes aigles bavassent au sujet du reste de la journée a venir, sans se préoccuper de quels couloirs ils empruntent, sans calculer avoir mis les pieds sur le territoire de la pire bande possible qu’on puisse trouver a Poudlard. Un peu de toutes les maisons, et prodigieusement doués en magie.

- Eh mais regardez qui voila, c’est le presque Cracmol et l’ami des fantômes.

- Bah alors tu veux pas rester avec nous ? Viens on va discuter, eh détend toi

Niels serre le poing sans ouvrir la bouche. C’est dur pour ses nerfs. Il voudrait les voir disparaitre de sa vie. Fergus lui tapote l’épaule compatissant.

- Ouh, je crois qu’il t’as mis un vent Ashley. On dirait qu’il est rebelle aujourd’hui

Un croche pied tendu lui fait perdre l’équilibre sous les ricanement. Bon il a plus rien a perdre, il a probablement touché le fond et même si c’est un réflexe plus naturel de fuir l’humiliation, il se tourne vers eux.

- Je ne suis pas si mauvais en magie que ça !

- Ah ouais ?

Nouvelle crise de rire. Tout le monde peut se souvenir de ses fiasco en sortilège devant toute la classe, de ces nombreuses fois ou il ratait des sorts, non pas a cause de sa volonté, mais a cause de sa magie faible et capricieuse. Fergus lui souffle de pas faire cas et partir, c’est toujours mieux que se récupérer un ou deux sortilèges embêtants dans la face.

Sauf que cette fois Niels en a sa claque de se faire alpaguer dans les couloirs parce que c’est un nerd nul en magie, qu’il est autiste et qu’il n’attire personne. Cette fois, sous le regard complètement mort de rire de la compagnie et d’un Fergus atterré, il prend sa baguette et se place dans une position étrange, une stadha, celle de la rune Fehu en l’occurence avec la foi puissante que cela renforcera sa magie. Il concentre sa pensée sur l’évènement positif qu’il à été reçu a Copenhague en licence runologie et qu’il ait fête ca en famille et se concentre pour lancer le sort du patronus.

Inutile de préciser que c’est un sort très difficile d’excecution et qu’il avait appris avec acharnement dans le but de montrer qu’il ne vaut pas rien en magie. Si la position n’a pas forcément un grand effet magique, il y croit assez pour que ca ait un effet psychologique et que s’échappe de sa baguette la forme éthérée d’un grand daim. Son regard reste fixé dessus autant que le tour de force souffle tout le monde.

- Tu gères, Niels

Déclare un Fergus qui s’en va avec lui, tout deux assez fiers pour ne pas entendre les rageux derrière.