[HALLOWEEN] FINITIONS ft. Ruben

Il y a ce soupire qui se meurt au fond de ta gorge, un peu comme si tout ton être se vidait de son air pour s’asphyxier le cœur. Un pas après l'autre et tu te demandes ce qui peut bien te passer par la tête parfois et à lui aussi, par la même occasion. C'est peut-être l'alcool qui t'avait fait craqué, peut-être aussi l'inquiétude et l'opportunité - après tout, les couleurs que tu portais fièrement était ceux des opportunistes avérés et à la stratégie constante. Alors on t'avais abordé pour te dire Il est là-bas en rajoutant un Pourquoi t'en profites pas ? et un roulement de tes prunelles, l'hésitation et finalement, tu t'étais élancé à ses trousses - et non, non malgré le mail que tu avais envoyé à Nancy comme une mauvaise blague, tu ne projetais pas d'abuser de lui dans la forêt interdite. La forêt interdite. A une heure pas possible. Et tu te demandais ce qu'il foutait là-bas.

Alors t'allais le ramener par la peau du cul et puis, puis, puis peut-être en profiter un peu, le toucher indirectement, apprendre un peu plus que son prénom et ce que tu sais de tes regards persistants.

Un soupire. Un énième. Si on te trouvait là, tu ne donnais pas bien cher de ta peau. T'avais troqué ton costume de détraqueur top-budget après la fin de la soirée, pour celui d'une magical girl éco+ que tu avais chourré à un de tes potes en le suppliant bruyamment pendant une bonne demi-heure. Alors oui. T'étais là comme un con, habillé d'une jolie jupe plissée, des couettes incertaines qui retenait tes cheveux, l'air le plus débraillé du monde après la soirée d'Halloween, parcourant le gazon entretenu du château pour te rendre dans une forêt infâme pour retrouver ce petit con de Ruben, sûrement torché ou mort, dans son costume de poulpe. Tout ceci n'avait aucun putain de sens.

T'espérais qu'il était pas mort quand même, parce que mourir en poulpe, ça craint.

– Ruben... ?

Et il y a le craquement de la flore sous tes pas, alors que tu entrais dans le brouillard épais de la forêt, les prunelles parcourant les environs avec exaltation et une once d'appréhension - qu'est-ce que tu foutais là, bordel ?

– Ruben, putain t'es où ?

Un autre craquement, le tambourinement du palpitant qui se fait toujours plus fort, de plus en plus fort ; et un pas, un autre, encore un.

Faible lumière aux sons des vibrements qui transparaît des feuillages et qui guide tes pas, courbe ton dos et ouvre ta paume  à la conquête d'un téléphone. Tes sourcils prennent de la hauteur alors que tu te redresses en examinant l'appareil sous toute les coutures et un frissonnement vint parcourir ton corps de toute part en te disant que, tu tenais peut-être là, la dernière source de vie de Ruben Damon. Mort dévoré par un loup garou ou fini en boulette de poulpe par une autre créature infâme de la forêt - tristesse et désarroi.

Et soudain, tu l'entends. Enfin, tu entends quelque chose d'indistinct et comme un réflexe tu sors ta baguette qui s'illumine au murmure d'un lumos à peine soufflé. Alors tu attends sans bouger, te poussant sur la pointe des pieds en direction des sons que tu entendais, comme si tu pouvais voir au delà de la brume - sans succès.

Et c'est là que tu le vois, qui s'avance vers toi - enfin, tu vois plutôt un poulpe géant se dandiner vers toi - et déjà se forme ce magnifique sourire qui s'illumine à chaque fois que tu le vois, l'observe, le contemple, le détaille et tout pleins d'adjectifs dans ce style qui fait de toi un mec étrange.

– Rub-...

Mais tu n'as pas fini de dire son nom, que tu le vois se ramasser la gueule à quelque pas de toi, là où précisément, s'écoulait à peine un court d'eau. La bouche entre-ouverte, tu restes statufié et la scène en devient très vite comique, alors qu'il s’anime enfin pour se relever maladroitement - et tu ne distingues plus son visage derrière la couche de boue - alors qu'il faisait comme si de rien était.

Note mentale : Ruben est arraché.

Et alors il fourche sur ton prénom, une fois, deux fois, pleins de fois, alors même qu'il n'avait pas prit le temps de reprendre sa respiration et qu'il s'était peut-être fait une fracture du crâne - avant de tonner brusquement les syllabes juste de ton patronyme.

Ezéchiel. Tu ne fais pas attention à la suite de sa phrase pourtant lourde de sens, pour lui offrir un sourire tellement resplendissant qu'il pourrait illuminer toute la forêt. Tu sembles exulter d'un bonheur qui sort de tout tes pores alors que tu te rends comptes qui connais ton prénom. Chose pourtant pas très compliqué, puisque tu étais un vélane et de ce fait, l'anonymat impossible. Or, tu t'en foutais. Il connaissait ton prénom. Il l'avait retenu. Tu aurais gloussé si tu l'avais osé.

– Pourquoi t'es en magical girl ...? Tu peux m'aider à retirer ce putain de costume de merde ? J'sais même pas comment j'ai fait pour le mettre, il m'serre comme pas possible surtout au niveau du cou.

Il voulait que tu l'aides à se déshabiller. Bien sûr que t'allais l'aider. Et plutôt deux fois qu'une, si tu le pouvais.

– J'l'ai chourré à quelqu'un, celui du détraqueur ne m'allait pas au teint... fis-tu avec une petite moue - alors que EVIDEMMENT il ne t'allait pas au teint puisqu'on ne voyait pas ta gueule sous la capuche. Okay ! Okay, okay... attend, je te viens en aide, bouge pas... t'es... et tu fais une grimace qui défigure à peine ton visage. ...mec, pourquoi tu pus les œufs... et t'es pleins de boues... reprends-tu avec un air dégoûté alors qu'il s'était retourné pour que tu atteignes la fermeture éclair qui figurait dans son dos. Tu tires vivement cette dernière alors qu'il te répond, mais tu ne prends pas le temps de répliquer pour tirer sur le costume, tenant ta baguette avec ta bouche pour conserver la lumière - on adore l'hygiène - rajoutant un Ch'ais dégeulach Rub'... alors que vous vous démeniez à deux pour tirer dans les deux sens opposés.

Jusqu'à y arriver.

Et tu lâches prestement le costume de tes doigts, celui-ci venant s'embourber dans la boue entre-vous, alors que tu le regardais avec répugnance, te frottant les mains sur ta jupe avant de reprendre ta baguette et relever tes prunelles vers lui ; et il y a cette once d'inquiétude, d'amusement et de désarroi dans ton regard.

– Qu'est-ce que tu fous ici tout seul, c'est giga dangereux ?!


– Ah ! Au fait... !

Mais tu ne lui laisses pas le temps de répondre.

Tu plonges ta main dans ta poitrine - enfin, dans le costume où devrait y résider une poitrine - pour sortir le téléphone que tu avais récupéré plus tôt. Tu redresses le menton et tu captes son regard, avant de plisser les yeux. Ces yeux qui voulait dire J'ai pas de poche Ruben, poses pas de question embarrassante, j'aurai pu le mettre sous ma jupe, dans l'fond de mon cul, okay ? avant de le lui tendre avec un superbe sourire, qui tranchait terriblement avec l'air que tu avais il y a une seconde de cela.

– J'crois que ça t'appartiens, j'l'ai trouvé en te cherchant, j'espère que t'as pas perdu ta baguette entre temps, parce que chercher un bout d'bois dans une forêt... et tu ris un peu goguenard, avant de capter quelque chose dans son expression qui fit taire définitivement ton rire.

– ... T'es pas sérieux ?

Et t'as le rire facile Ezéchiel, alors que tu l'écoutes déblatérer des conneries plus grosses que lui. Tu te doutes que c'est l'alcool qui parle et toi aussi, légèrement, t'as cette euphorie des premiers verres. Et ton rire, Ezéchiel, se fait plus fort encore quand le portable vint rejoindre la boue - si fort, qu'il résonne entre les arbres de cette forêt inquiétante, déchirante, effrayante ; tout est trop comique, trop théâtrale pour toi, t'as le cœur qui gonfle de légèreté et d'allégresse.

Le tintement de tes cordes vocales se calme quand il reprend la parole et tu l'écoutes attentivement et tu fais un peu la moue. Quel genre d'ami laisserait son pote à moitié crevé dans la forêt interdite ? Mais tu ne relèves pas la question, que tu saurais légèrement cinglante, parce que tu penses qu'elle serait loin d'être apprécié et qu'au final, ça ne te concernait pas.

Un dernier point d’interrogation qui vint agrandir ton sourire et tu regardes quelques secondes ailleurs - seul les personnes te connaissant vraiment, pouvait discerner que c'était là une preuve de gêne de ta part. Tu reposes tes prunelles sur sa petite personne, pourtant imperturbable malgré ton trouble invisible aux yeux du rouge et or.

– Des "potes" (tu réalises des guillemets) à moi m'ont dit qu'ils avaient appris que t'étais paumé dans la forêt et m'ont conseillé d'en profiter. et tu roules des yeux. Mais j'ai dit non, parce que j'ai beau être un Serpentard, je suis pas assez tordu pour faire ça. et, et à nouveau tu regardes ailleurs, avant de reprendre, comme si les prochaines paroles montreraient la raison de ton malaise, de ta faiblesse apparente, de ton envie sous-jacente. Puis, j'ai fini par venir parce que je me suis dit que c'était giga dangereux et que j'pouvais pas te laisser crever là. En plus d'avoir envie de te parler.

Mais une fois cela dit, tu reprends ton aplomb comme si un poids un peu étrange venait de s'élever de tes épaules pour s'envoler. A nouveau ce sourire et tu relèves doucement ta baguette, comme si elle détenait toute les réponses à ses questions.

– Accio baguette de Ruben Damon.

Baguette baissée en attente d'un retour, tu l'écoutes attentivement déblatérer l'amertume d'une rivalité qui n'est plus à prouver au sein de l'établissement. Haussement élégant d'un sourcil quand il vous définit comme des trous de balles avant qu'un léger rire vint éclore quand il semble t'exclure de cette catégorie bien précise, semble-t-il. Tu ne sais pas trop quoi penser de ces confidences en réalité ; pour toi, des gros cons, il y en a dans toute les maisons. La différence avec les Serpents, résident dans le fait qu'ils le sont de façon plus sournoise et puis, tu te doutes que cette histoire de sang réellement attachée aux écailles verdâtres de votre blason, fait que la majorité des pisseuses et de ceux qui pètent plus haut que leurs culs, se logent dans votre maison. Il n'a pas vraiment tort, mais n'a pas vraiment raison non plus à ton avis ; tu décides de ne pas commenter, loin l'idée d'une conversation sérieuse et profonde à une heure pareille avec ton crush qui sent le poulailler.

Tu roules un peu des yeux à son énième jugements, mais il finit par éclater de rire pour se rattraper et te glisser une œillade complice quand il vint ponctuer sa phrase d'un ton taquin, ses sourcils jouant étrangement sur son front. Et tu ne peux pas retenir le rire qui pulse dans ta gorge, qui ferait presque echo au sien.

– Si tu veux mon avis, c'est pas vraiment une veine, mais j'avoue qu'il y a des bons côtés parfois. Il suffit que je batte des cils pour avoir ce que je veux, mais ça reste assez ridicule. Alors ouais, pourquoi pas faire connaissance, après tout je suis là pour ça ! et tu ne t'en caches pas Ezéchiel, tu ne le caches et ne le cacheras jamais, d'ailleurs, cette envie de le connaître et d'établir quelque chose, n'importe quoi. Ça te troublerait un peu, si tu n'avais pas l'alcool léger ce soir, Ezéchiel.

Tu entends un mouvement d'air et quelques secondes après, il récupère sa précieuse baguette que tu accompagnes avec un sourire ; et puis, puis il prend la parole dans l'honnête intention de remercier pour ton existence, peut-être, mais très vite, tu vois venir le problème. Tu fronces les sourcils et retiens difficilement une moue dégoûtée ; tu pouvais très mal juger, Ezéchiel, t'avais un peu trop l'habitude de vomir facilement en plus de très mal tenir l'alcool - t'as cette compassion mêlée à un haut-le-cœur qui pourrait presque te faire vomir par mimétisme.

– J'peux t'Aquamentis la gueule si tu veux ? Ça ferait partir la boue et les œufs, t'aurais qu'à ouvrir la bouche pour boire ? répliques-tu évasivement en haussant les épaules, t'étais assez saoul pour trouver cette idée vraiment intelligente et ingénieuse, mais assez sobre pour te demander une demi-seconde trop tard ce que tu venais de proposer.

– Pas de bouteille d'eau et si je Accio, on va être dans la grosse merde... Le mieux serait de rentrer ? On peut toujours tester de passer par les cuisines, parce que j't'avoue que j'suis pas très à l'aise au fin fond de la forêt avec toi qui vomis toute ta famille... Sans offense, hein. et baguette relevée, tu t'avances vers lui, tes pas produisant des bruits immondes dans la terre humide d'octobre.

– En vrai, si je gère bien, tu peux boires du bout de ma baguette. Pitié Ezéchiel, ne pense surtout pas à la formulation de cette phrase profondément douteuse. Vu comment t'es torché, tu vas déclencher un tsunami si tu le fais, laisses-moi gérer ! et tu prends les devants de la situation, tes prunelles lumineuses sous cette idée totalement foireuse, simplement heureux de lui venir en aide à ta façon.

Et t'as son sort du bout des lèvres.