— 21:30, neuf octobre 2004 à reykjavik —
Psychotropes qui bordent la vie ; s’en viennent souffler sur ses bougies — lentement, lascivement ; d’une expiration ténue, une par une, à chaque fois. Décompte Final qui se décline et s’incline ;
tic tac tic tac. Chaque dose plus mortelle, chaque injection plus gangrène.
Tic tac tic tac. C’est la folie, l’ivresse, la perdition de l’esprit ; une seule pensée détonne, permanente, imperméable prochaine dose où la trouver, où trouver le fric, comment survivre jusqu’à la prochaine inspiration. Rien ne laisse place à d’autres préoccupations, rien ne dépasse de cet encéphale ; obsession, pulsion mortelle, vivre pour elle, elle pour vivre (voler). Toujours plus haut, toujours plus fort ; jusqu’à l’évasion la plus totale, l’euphorie immorale et la chute, l’achèvement des artifices toujours plus rance, pernicieux — redoutable.
Tic tac tic tac. Course effroyable contre la montre, s’affranchir des limites, les dépasser ; se dépérir du factice et plonger dans ses délices ; et suppliquer, abdiquer devant le vice ; se complaire victime de l’affection, infection face au bourreau malfaiteur, profane et divin.
Tic tac. Tic. Tac. L’amour ne la sauvera pas, l’amour l’incendiera et l’immolera ; elle rira jusqu’aux ultimes pleurs, car même ses larmes ne parviendront à éteindre le brasier qui viendra la consumer. Et c’est au fond d’un murmure qu’elle insuffle et rend le final soupir, comme lors de ces premiers jours qui se déclament enfin dernier. C’est sur un carrelage dur et froid qu’elle susurre «
Puis-je enfin haïr les étoiles ? » ; crevée dans l’écume, crevée dans le simulacre.
— 21:54, neuf octobre 2004 à reykjavik —
Noyé dans le sel de ses larmes, échoué contre les rives de son âme, il s’efforce de retrouver entre les carrefours de son esprit son amour de toujours. De ses doigts il tente de ranimer l’essence qui s’échappe, de ses paumes il s’essaye à capturer la vie qui s’en va à la hâte; mais gît indéniablement devant lui le corps éteint; dénué de souffles à expirer. Alors il ne peut se contenir et la silhouette se retrouve affligée de n’avoir pu la retenir, la figure se retrouve éplorée devant le blâme et son vacarme; celui qui gronde de n’être qu’un incapable, d’être impuissant face à la fatalité qui les frappe. Les remords le croulent et la carrure s’écroule; les maux de ces injections venimeuses peinent à être pansées, les seringues gangrènes s’obstruent à l’oubli et au pardon; et la seule chose qui demeure est cette carcasse qu’il étreint avec désespoir et amertume, avec lui leurs souvenirs d’antan, où sourires et soupirs s’expiaient en commun.
— 09:12, six mars 2005 à reykjavik, dans un foyer —
Énième visage couvert d'une brume anthracite, dont le souvenir ne parvient lui-même à se rappeler. Une dame au menton relevé, sourire normatif esquissé. me supposément samaritaine, qui veut la sauver de sa solitude accablante ; charité pourtant indésirée et indésirable. Les arabesques de tulipes couvrant sa chemise fascinent plus que ses paroles, l’odeur de l’herbe mouillée et des terres boueuses davantage encore. Le soleil brûle de ses éclats lumineux, embaumant la pièce d’une chaleur étouffante, recouvrant son coeur et ses déchirures d’une douceur enivrante. Le ciel semble recouvert de miel, au dehors. Les autres gosses jouent pendant qu’elle est assise là, à cet entretien d’adoption. Les cris, pourtant lointains, se répercutent contre ses oreilles et cette liberté éphémère la fait doucement souffrir. Une pensée malheureuse effleure son crâne, bouillonnant ardemment contre son gosier. Elle le sait déjà que son père ne reviendra pas la chercher, car il n’était plus là. Non lui, il était dans cette incapacité à la retrouver, la recueillir et s’enfuir, avec elle. Alors ses jambes continuent à se balancer au rythme décadent de l’horloge qui détonne, lasse de cette dame qui la voudrait devenir son enfant.
— année 2007 à 2012, à reykjavik et poudlard —
Les figures parentales s’étalent et détalent comme saisons, tandis que cette perception tenace de ne trouver place reste, demeure et se meut au sein de la peau et de l’ossature, comme serpent dissident et morsures purulentes. Voguent les paysages inconnus et les silhouettes étrangères; s’amènent et s’enchaînent devant elle les visages indistincts et interdits, à repousser les limites de sa patience et de son enfance, à présent scabreuse et déficiente. Alors Nansý, petite Nansý, s’égare dans les rues du silence, subjuguée par l’hypocrisie pérenne qui règne dans leurs regards et leurs sourires vomitifs à en pâlir. Drôle de reconnaissance qu’on lui morigène, d’ainsi haïr ses congénères; drôle de rengaine qu’elle a, la petite vilaine, mais pouvait-on également évoquer, deux minuscules secondes, cette drôle de bedaine où l’on assène omissions et silences à la moindre interrogation ? Après tout, elle ne cherche qu’à retrouver père et mère originels, la petite naine. Depuis quand était-ce devenu si proscrit ?
Et son environnement se teintait dorénavant de nuances auparavant méconnues, bousculant son petit monde échancré, devenant nouvelles pièces à arborer au sein de l’identité bouleversée. Comment traduire le brouhaha intérieur, comment l’aborder, l’appréhender; et cette effervescence de sentiments qui bouillonne et qui ne sait s’exprimer, qui ne veut s’agencer par la gorge et la désaltérer par les palabres requises; ce foisonnement d’émotions qui la cloue au sol, qui n’attend jamais avant de frapper et qui n’amène qu’ecchymoses sur les jointures et les poings ? Que signifiait la voix hurlant au sein du thorax, que signifiait ces repères qui n’étaient qu’amas de formes décousues ? Les coups étaient devenus hurlements de désespoir, les blessures protestations contre l’existence, et la haine, cris du bonheur.
— 3e année à poudlard, 2014 —
Patibulaire garçon au coeur secret et aux moeurs émiettées; voile opaque l’aveuglant des ténèbres rances qui l’assaillent, lacèrent et piétinent l’éthique et la conscience, dépouillées. Pourtant qu’il est beau, dans cette noirceur et ses mystères, Yaroslav. Nox dans les cheveux, étoiles dans les veines, constellations dans les yeux; son premier amour, où les battements cardiaques ne sont plus que roulements de tambour, où les pupilles distinguent instinctivement en pleine foule la silhouette et ses contours. C’était ça et bien d’autres choses à la fois, incapable de se retirer de cette aliénation sentimentale qui ne cessait la tourmente et les troubles de l’esprit. Et devenus inséparables, insécables compères de choix, elle avait voulu s’immiscer en lui et dans sa vie, panser ses doutes, tenter l’irréparable devant la sentencieuse confession qui était indéniablement un appel désespéré à la rédemption. Alors elle avait désiré le sauver de cette enclave misérable et terrassante; le sauver de cette existence malheureuse et sempiternelle.
Ce fut la fin et la fissure; la scission et le départ. Il ne pardonna son affront et elle n’en sut plus rien par la suite. De toutes les manières, elle était déjà loin devant; l’abandon devenu un choix cruel mais raisonnable, quantifié par mensonges devenus vérités. Et l’insupportable, au fil du temps, s’était réduit à une simple culpabilité absoute.
Avait-elle seulement fait le bon choix ? Au creux du plexus demeurait cependant le leitmotiv devenu hantise.
— 5e année à poudlard, 2016 ; conversation téléphonique —
«
Et tu vas bien, elskan ?—
Je m’emmerde comme un rat mort chez elle. Et toi, la taule ?—
Ta frænka ne cesse de me parler de tes fugues durant les vacances. Qu’est-ce que tu fais ? Où tu vas ? D’où viennent tes balafres lorsque tu rentres ? T’as des problèmes avec des gens ? C’est à cause de moi ? Parle à ta frænka si tu as un probl..—
J’pourrais passer te voir prochainement ?—
Bien sûr, mais repense à c’que je viens de te dire gleðja. Si t’as l’moindre souci avec les gamins du voisina..—
Je gère. Je gère. J’dois te laisser, ég elska þig. —
Ég elsk.. »
— 14:28, seize juillet 2019 à reykjavik, dans une prison —
Le tic tac de l’horloge. Les regards impertinents. La dépersonnalisation. La déshumanisation. Le contact social bridé par la vitre crasseuse. Elle n’avait jamais autant détaillé les traits de son visage; tirés par les années perdues, par les fautes commises, par la vie qu’il n’avait pu vivre, seulement subir, par la sentence qui était venue briser leur famille. S’ils pouvaient encore se dénommer famille au jour d’aujourd’hui. «
Je vais bouger. J’ai déjà des économies mises de côté. L’année prochaine, je me tire dès que j’ai mon diplôme. Je voulais juste te prévenir, Andrés. J’en ai pas encore causé avec Sonja, mais ça lui fera sûrement un bien fou de s’dire qu’elle pourra enfin s’arracher cette écharde du pied. » Il s’insurge, hausse le ton, fronce les sourcils. Il s’exclame à plein poumons, pose des questions qui n’offrent le temps aux réponses. Et avant qu’il ne se lève de sa chaise, furibond, l’officier lui ordonne de garder son calme s’il ne voulait retourner au bloc. «
Écoute, cette nana ne m’a jamais kiffé. Ça se voit et je l’ai vécu dès le premier jour où elle m’a récupérée dans ce foyer minable où j’ai été placée par ta faute. En foutant ta vie en l’air, t’as aussi foutue la mienne. Garde-le en tête. Et, j’ai pas besoin de continuer à vivre dans ce merdier, j’ai besoin d’me tirer au loin, de voir qu’autre part, y a p’têtre autre chose que ce que tu m’as offert. Je reviendrai te voir à ta sortie. »
— 01:54, douze avril 2019 à glasgow —
Lumières tranchantes comme lames de rasoir, écaillant les murs et cisaillant les regards hagards de ses néons phosphorescents, de ses étincelles poignards fauchant les tristes âmes de son éblouissance: l’heure vespérale et l’ocre ornant la voûte emportés par sa fulgurance. Musique 8-bits décomposée, disséquée, recomposée, remixée — coupée en intermittence par les scratches du DJ déchaînant le public et entraînant cris et hurlements exaltés; le Grandmaster enchaînant platines et loops plus fulgurants encore que ses prédécesseurs. Dans la fosse berce la foule cascadant les larsens stridents qui tachent d'enivrer silhouettes et corps jonchés sous le stroboscope hypnotique, sueurs sur l’épiderme, plis sur les habits, sourires extatiques collés aux faciès. Les hanches se déhanchent, les carrures se rapprochent, décrochent, s’accrochent entre eux comme atomes de molécule; les paroles se percutent répercutent s’occultent dans les vibrations chaotiques du son psychédélique. Et les murs tremblent sous la pression et la puissance des basses qui parcourent l’ensemble de la salle en effervescence; l’essaim fougueux, enragé, pris de spasmes orgastiques à chaque seconde. Car une nouvelle drogue en vogue s’importe entre les paumes, incroyable et phénoménale.
Démentielle. Elle arpente les palais en échange d’un peu de
Queen; elle s’imprime dans les nerfs pour quelques quid.
Get high, dans sa forme la plus littérale et la plus fidèle. Pour un encéphale et ses connexions bousillés, on a le droit — le prestige — de flotter dans les airs, se libérer de la gravité de la Terre et s’octroyer une place dans un cimetière.
Tout cela en participant à cette subreptice manoeuvre se tramant en salle depuis cinquante-quatre minutes exactement.
«
Les gens sont au courant que votre merde va les déglinguer ? »
Son faisceau d’aiguilles se trempe dans l’encre ébène tandis que le regard vadrouille l’Agora, devenue méphitique et brumeuse dues aux émissions régulières de diverses substances embrasées.
«
Les gens en ont toujours eu conscience дорогая.. C’est souvent ce qui les pousse à la consom’ et c’est pour ça qu’on les aime ces gens-là, car les camés sont notre plus fidèle pompe à fric. »
Tattoo gun en main, elle assène la peau d’un geste brusque, faisant couler perles d’écarlate sur le tatouage inachevé tandis qu’un râle émane des lippes.
«
Pas de pitié pour les enculés. »
— 03:07, douze avril 2019 à glasgow —
«
VARLEGA SUR MON MATOS SHITHEADS ! »
Élan meurtrier. Elle fonce vers les cops, le visage impavide et les poings aiguisés par la fureur. Coups et injures pleuvent, scindant les corps comme lames de rasoir, dans les veines pulsant l’ichor dont elle s’abreuve pour attiser l’ardeur; la vision vermeille et déchaînée, les sens animés par l’appel de l’adrénaline et les vociférations de ses victimes meurtries. Et tandis que la cohorte prend de l’ampleur, que le foutoir attire et alarme les autres clébards, la baguette atterrit dans la paume, ses faisceaux d’aiguille devenant projectiles d’armes à feux, dirigés par un
waddiwasi hurlé. Les instruments fusent alors dans la chair, déchiquetant la peau avant d’en ressortir ensanglantés et d’aller taillader à nouveau un autre compère, sans jamais s’arrêter, incoercibles dards qui insufflent clabaudages de ces maudits bastards. Et son carnage est féroce et sans pitié; le corps en transe, frénétique et fiévreux, les iris dévorées par une passion abrasive et enivrante, la main habile, précise dans ses cruels méfaits.
Et tandis que le glas de la victoire résonne entre les tempes, l’Impétueuse se prépare et s’apprête à disparaître, à fuir de ce chaotique champ de bataille et à se désister de ses charges après avoir instauré l’effroi et l’horreur. Regard railleur sur la scène de crime, il n’y avait en effet plus rien à voir, cette descente inopinée devenue échec misérable de la part des forces de l’ordre magique. Le transplanage s’effectue ainsi, jusqu’à que chair extérieure s’accroche à ses pans et assiège son esprit, déglinguant la modification de leur atterrissage.
Get fuckin' lost, son.— 03:34, douze avril 2019 à selfoss —
Sans cesse avait-elle cherché sa place en ce bas-monde, pugnacité dans l’âme à survivre sans jamais rendre les armes, ingambe face aux périlleuses péripéties qui s’activaient à lui pourrir l’existence. Alors lorsqu’on lui demande de se taire, accusée de crime et de complicité, qu’on l’opprime dans ses protestations, qu’on refrène et comprime ses pulsions carmines; sourde l’arsenic et les palabres distinguées, s’envenime la bouche et s’expriment les poings. Assauts et tentatives de l’envoyer dans l’abîme et lui faire
(se) voir, concevoir sa date butoire et sa mort prochaine, mais il est encore plus rapide et plus vif cette fois-ci; ainsi les genoux s’affaissent, le corps s’écrase lourdement et la tête bourdonne contre l’asphalte.
Je te scinderai la baguette en deux. «
Je répète une dernière fois : vous êtes en état d’arrestation pour coups et blessures, outrage à agents magiques ainsi que complicité dans ce trafic de stupéf.. » Elle lui cracha au visage. «
Ta gueule cocksucker. »
— 18:49, vingt-quatre juin 2023 à londres —
« [...]
y a une putain de taupe chez nous [...]
Je lui briserai les deux jambes [...]
Mec, ça va faire cinq fois de suite qu’ils savent où nous trouver [...]
T’es vraiment un shithead [...]
Arrêtez de vous chier dans l’froc, on le retrouvera [...]
En attendant, prenez vos précautions. » Situés dans l’annexe de l’Agora nommée
The Head, le Conseil parlementait d’affaires — ou essayait, interrompus par les incessables joutes verbales. Et en parlant affaires, il parlait d’elle. Nansý le savait. Devenue indic pour échapper au même futur que son géniteur, elle avait peut-être merdé quelque part. «
T’en sais quelque chose de cette histoire, дорогая ? » Se doutait-il de quelque chose ? Elle se redresse légèrement, effectuant un faible mouvement rotatoire sur son tabouret pour croiser ses yeux et dissiper toute hypothétique délation. «
Comment j’pourrais ? J’suis que tatoueuse magique dans votre sale histoire. » Un haussement d’épaules, tandis qu’il renifle bruyamment. «
T’as pas envie d’une promotion ? J’ai vu comment t’as flingué ces clébards la dernière fois. T’étais sacrément se.. » Comment en était-elle venue à devoir perdre son temps avec un queutard ruskov qui ne lui donnait que la moitié de ce qu’elle était censée gagner ? «
Ta gueule. T’aurais pas pu me venir en aide, d’ailleurs ? »
J’ai croupi pendant une semaine en taule. «
D’solé princesse, la came était plus précieuse. » Elle n’avait besoin de personne, de toutes les façons. «
Arrête de bouger ou j’vais te rater. » Ses faisceaux dardèrent à nouveau la peau.
— 23:14, dix-neuf janvier 2026 à birmingham —
Il se mit soudainement à genoux, enveloppant sa main dans la sienne, son regard embrassant tendrement ses pupilles. Il n’allait tout de même pas.. «
Non, attends, qu’est-ce que tu fais ? Non, non, non. Attends, je ne— » Un rire vint naître contre l’embrasure de ses lèvres, tandis qu’autour de l’un de ses doigts se manifestait une bague. De fiançailles. «
Veux-tu m’épouser ? » La voix chevrotante, le débit cardiaque ébranlé, elle ne sut quoi dire — les mots ayant peine à se frayer un chemin entre le coeur et les lèvres. Des interrogations au creux de la bouche, des craintes, une hésitation certaine. Et les dents serrées, le contour de sa silhouette s’évanouissait, brumeux et trouble. «
Ne pleure pas, dis-moi juste oui Nansý. » La carrure s’abaissa à son niveau, et enroulant ses doigts contre les siens, elle chuchota : «
C’est sérieux ? Tout ça ? Tu ne veux pas plutôt attendre que ça se finisse ? En es-tu au moins sûr que tu veuilles bien de moi ? » Un baiser vint panser ses larmes et étreindre le bonheur florissant au fond de la cavité. «
Dès l’instant où je t’ai immobilisée au sol et que tu es venue me cracher dessus en me traitant de cocksucker. »
— 20:03, huit juin 2027 à birmingham ; conversation téléphonique —
«
Vous viendrez nous rendre visite, prochainement ? —
C’est compliqué en ce moment. Il est occupé et je ne peux pas vraiment t’en parler pour l’instant. —
Il sait, pour le bébé ?—
J’te l’ai déjà dit, c’est compliqué actuellement. J’attends le bon moment pour lui annoncer la nouvelle. Ça dure depuis des années, mais tout va bientôt finir par se tasser. Donc il faut juste que j’attende le bon moment.—
Tu comptes le garder, au moins ? —
… Je sais pas trop. Je ne sais vraiment pas. Peut-être. —
Ça veut dire que je vais être grand-père ? —
Peut-être, écoute. Peut-être.. J’ai juste peur, tu vois ? Que ça ne tienne pas la route, que tout se déglingue du jour au lendemain. Dans quelques semaines se déroulera le coup décisif à toute cette affaire et je n’devrais même pas t’en parler mais, j’ai vraiment peur que ça merde, que tout foire, que ça ne marche pas.—
Tout va bien se passer, elskan. Te surmène pas trop avec ce genre de pensées, c’est mauvais pour le bébé. Va te reposer, d’acc ? Tout va bien se passer. —
J’espère, j’espère. »
— 05:21, trois juillet 2027 à reykjavik —
Un apaisement se lisait sur son visage; les traits adoucis, sereins — radieux d’une vie simple et éthérée. Comment se passait sa réintégration à la société ? Parvenait-il à rattraper le temps disparu, réussissait-il à couvrir les kilomètres lointains ? Tandis que la Terre continuait sa rotation, parvenait-il à redevenir engrenages ? Avait-il assimilé les nuances de ce nouveau monde qu’il arpentait dorénavant ? Elle n’y avait jamais pensé. Pas jusqu’à maintenant. Trop obnubilée par sa propre course contre le bonheur, à laquelle elle avait décidément perdu. Faute d’avoir essayé. Et maintenant qu’elle était retournée au point de départ, que se passerait-il ? Était-elle seulement en droit de venir gâcher sa journée, de venir empester ses pensées de son foutu malheur ? Un sourire étire ses lèvres; un sourire à en fendre le cœur, un sourire à en faire pâlir la Mort. «
Je vais bien aussi. » Il avait remonté la pente avec la sueur de son front, le sel de ses larmes. Elle n’était pas en position de tout détruire, de foutre en l’air la vie qu’il tentait maintenant de mener. Que lui restait-il, sinon ? Son père était déjà un homme brisé. Il n’avait pas besoin de se tordre davantage; elle n’avait besoin de perpétuer la fêlure qui gisait au fond de ses entrailles. Il n’avait pas besoin d’entendre ces mots, de se démener pour le malheur de son enfant; il avait besoin de se renouer avec lui-même et de se retrouver, après toutes ces années. Avant que le temps ne décide de l’emporter, lui aussi. «
La descente a été un succès. Et.. Je vais garder le bébé. Tu seras grand-père. » Elle restera digne. Elle n’ira pas pleurer la mort de son fiancé. Elle n’ira pas larmoyer la disparition de toutes ses possessions. Elle restera belle, intacte, rayonnante de Bonheur. Elle prouvera au monde qu’elle éclate de Bonheur. Elle sourira au monde et continuera de vivre avec ce sourire, aussi tordu soit-il. Elle ne s’arrêtera pas maintenant, non. Ni devant la cruauté de la vie, ni devant son dernier souffle. Personne ne lui enlèvera son Bonheur, qu’importe les efforts. «
Je vais rentrer, je me sens fatiguée. Passe le bonjour à frænka. »
— 10:20, premier septembre 2027 à poudlard, dans le bureau du directeur Scamander —
Le château était resté fidèle à lui-même. Rien ne semblait avoir changé, comme intemporel, hors du Temps et de sa décrépitude. «
Je serai intransigeant, qu’importe ta… condition. Dispose maintenant. Et tu sais déjà où se trouvent les dortoirs, donc je m’aviserai de t’y accompagner. » Lui également, était resté inchangé. Peut-être plus froid, plus cruel. Qu’importe.
En arpentant à nouveau les murs de l’immuable demeure, elle sembla ressentir au fond de la carcasse une impression de se retrouver chez soi. Et en s’allongeant contre le matelas poussiéreux de cet espace désormais sien, serrant entre ses doigts la bague devenue pendentif, elle dormit sereinement pour la première fois depuis son décès.
- yo:
ça a été méga long j'étais pas prête. si toi aussi t'es pas prêt, mate ce récap. que je ferai plus tard. déso pas déso.