[FB] You better work, witch! | Dodo

Tu remontes la petite allée bien entretenue qui mène à la maison qui t'a vu grandir, la chemise en vrac et les pieds en coton. Les buissons sont bien taillés, le cerisier plus resplendissant que jamais. À force de le voir dépérir, tu avais presque oublié à quoi il ressemblait. C'est beau. Et c'est l'œuvre de Machin. (Tu l'appelles Machin parce que tu refuses encore de retenir le nom de ton beau-père.) T'espères qu'il n'est pas là. Ce n'est que le début de l'après-midi mais t'es déjà fatigué. Tu réajustes le col de ta chemise avant de monter les marches et d'ouvrir la porte. Tu tombes nez à nez avec ta mère, chargée d’un gros panier de lessive sale, qu'elle te met instantanément dans les bras.

Ah, poussin, tu tombes bien! Tu me mets ça dans la cuisine s'il te plaît.

Bonjour à toi aussi, anne... ((m'man))

C'est pas comme si tu l'avais pas croisée depuis hier matin... Sa voix crie quelque chose depuis l'étage et tu t'arrêtes en plein milieu du salon pour écouter.

Ça va?

Non, ça va pas! Mrs. Friggs m'a pété le dos!

Comment une vieille dame peut te casser le dos?

À cause de sa tondeuse à gazon à la con! Elle date du siècle dernier!

Pourquoi tu ne retournerais pas chez les De Luca? Stan, le fils des Cooper, tu sais? Il gagne 20 de l'heure. En plus, ils ont une piscine.

Tu cries, agacé, parce que ta mère ne cesse de faire des allers et retours entre les chambres sans s'arrêter:

Ah non, plus jamais! Mrs. De Luca, elle me paye deux fois moins, et tu sais pourquoi? Parce que Stan, il enlève son t-shirt pour tondre le gazon.

Ta mère apparaît en haut des escaliers, imperturbable:

Dans ce cas, tu n'as qu'à enlever ton t-shirt toi aussi.

Anne!

Stan a des abdos, maman.

Quoi? Pense à ton dos, et surtout aux 20 livres. Et à la piscine.

Ugh.

Ta mère. Elle n'a pas étudié à Poudlard, mais il ne fait aucun doute qu'elle aurait fini à Serpentard. Tu lèves les yeux au ciel et tu poses le panier devant la machine à laver, entre la cuisinière et la petite table ronde. Tu te redresses avec un grommellement, les vertèbres en vrac. Peut-être que si tu suppliais le supérieur de ta mère au journal, ils te reprendraient pour classer les archives un mois encore? Mais il fait tellement chaud là en-dessous, y'a pas la clim. Même pour toi, c'est difficilement supportable. D'un autre côté, t'en as marre de te casser le dos chez les voisins incapables de s'acheter une tondeuse à gazon qui ne pèse pas trente tonnes. Mais l'essence de ta moto ne va pas se payer toute seule... C'est dur la vie d'étudiant. T'aimerais bien avoir un job d'été plus sympa. Vendeur de glaces comme Billy, lifeguard comme Payne ou même... ce que fait Beck pour gagner son argent de poche, quoi que ce soit. Probablement rien de légal. Tu ricanes doucement en prenant ton téléphone pour vérifier tes messages, et là tu vois le nom de Mrs. De Luca. Ah, non! Tu refuses de prostituer tes abdos inexistants pour sa piscine à la con et...

25 livres??

Stan doit être malade. Très malade. Évidemment, tu acceptes son offre. Évidemment. C'est là que la sonnerie retentit. T'attendais personne, si? Tu te traînes jusqu'à la porte en te massant la nuque, et c'est là que ça te revient. Merde. On est quel jour déjà? Et t'as même pas prévenu ta mère... Non qu'elle se préoccupe des gens que tu invites, ou qu'elle ait son mot à dire de toute manière. C'est une maison libre ici, chacun fait ce qu'il veut. Tu ouvres doucement la porte, un petit sourire aux lèvres.

Heeey! Salut James...

Comment te dire qu'avec ta chemise froissée, les restes de gazon sur les genoux, ton visage fatigué et le t-shirt plein de transpiration en option, elle va tout de suite deviner que tu l'avais oubliée. La crédibilité d'un homme.