La mort.
C’était un concept si proche et pourtant si lointain.
Abstrait.
Tu en avais autant peur que de vivre.
Elle était cette libération comme cette malédiction qui hantait ou qu’attendaient le commun des mortels. Tu savais que la Mort viendrait t’embrasser un jour lointain. Après tu aies vu tes proches périr. Après avoir senti leur cadavre pourrir.
Sous cette Terre que tu foules chaque jour sans avoir aucune volonté.
Des visages en ce bas monde te faisaient avancer et apportait une saveur à chaque bouchée de vie que tu avalais. Des sourires et des cries. Comme celui de Fallen, devenu si rare avec le temps. Comme celui de Lola, si précieux et si tendre. Comme les réprimandes et les rires de Borea Boswell, vieille cousine et âme soeur. Etait-ce une trahison pour les deux autres filles que de désirer vivre à travers le coeur flamboyant de Borea ?
Etait-ce une trahison pour celles que tu chérissais de cesser de vouloir respirer et croire en cette vie en sentant la disparition de son aura ?
Quelque chose ce matin avait boulversé ton esprit.
L’aurore t’avait extirpé de ce sommeil mouvementé. Tu errais dans les couloirs vides du manoir des Blackwell, à la recherche de l’elfe de maison encore présent pour t’apporter ta coupe de sang. Tes canines s’allongent alors que tu saisis le nectar entre tes doigts filiformes. Tes traits sont creusés, ton teint toujours aussi blafard. La pulpe se teinte d’une couleur vermeille. Aucune saveur.
Tu jettes d’une rage démente le gobelet de cuivre au sol. Et les pierres maculées d’hémoglobines font écho à celui d’un proche. Quelque chose.
Ne va.
Pas.
Et cette sensation te tord le coeur, t’emprisonne de cette folie qui se nourrit de ton désespoir et de tes pressentiments. Ton pinneapple sonne.
Mais alors que tu tâtes tes poches, tu ne le sens pas.
Il n’est pas sur toi.
Tu l’entends en réalité de ta chambre. L’ouie fine l’avait détecté, comme un appel au secours. Et alors que tu coures, dépassant ton ombre recluse dans les ténèbres, tu arrives à temps pour décrocher.
—
« Elle.. Elle est quoi ? »Tu lâches ton téléphone. Sans raccrocher, tu restes immobiles.
Peut-être des secondes mais peut-être aussi bien des heures.
Tu ne t’en souviens plus.
En réalité tu espérais oublier, sombrer dans le néant pour la rejoindre et la ramener.
Tu écrases ton téléphone d’une impulsion violente.
Tu n’as pas les larmes qui te monte aux yeux car tu ne te souviens pas avoir jamais pleuré.
Tu te sens seulement vidé. Sa disparition avait annihilé toute volonté d’exister.
Et le pire dans tout ça ?
Ce qui te faisait sourire jaune.
C’est que tu ne la connaissais pas plus que ça.
Eternelle aurore boréale qui aurait bousculé un instant l’espace d’une minute de ta vie, si on comptait ce qu’il te restait avant de t’échouer à ton tour.
Quand tu reprends tes esprits, tu es toujours debout.
Fixant cette fenêtre qui donnait sur les forêts embrumées qui entouraient le château des Blackwell.
Quelle vie de merde.
Soudain, et enfin.
Le prénom de Lola te vient enfin à l’esprit.
Elle était sa meilleure amie.
Tu n’imagines pas ce qu’elle, elle doit ressentir. La peine que tu allais devoir essuyer.
Tu en voulais presque à Borea de vous avoir abandonné, toi le prince des ténèbres impénétrable. Une ombre passe derrière toi, s’arrête à la porte de ta chambre.
—
« Je ne veux pas discuter. »Tu lèves ta baguette et la porte se ferme.
Et tu restes à contempler ce paysage fantomatique.
Quand soudainement tu décides de prendre ton manteau et tes affaires.
Laissant ce trou noir qui aspirait tout sur son passage derrière toi.
Ainsi que la bague des Boswell qui appartenait à Adelaide. Qu’elle t’avait remise avant d’être internée. Avant que tu sois emmenée.
Tu la laisses en équilibre sur le rebord de la fenêtre.
Et d’un coup de vent la fera s’échouer et disparaitre à jamais dans le brouilard, s’écrasant sur la terre mouillée entre les arbres qui seront son sanctuaire.
Adieu Borea Boswell, puisse tu reposer en paix dans ma demeure.
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