wires ☾ perséphone

c’est rare qu’il regrette d’avoir baisé, floyd – toujours à se vanter d’avoir serré telle ou telle meuf, de s’être tapé tel ou tel mec et de les avoir tous fait crier à en devenir putain de muet ; pourtant avec toi y a toujours eu un truc qui l’empêchait de toucher, comme une espèce de voile qui l’obligeait à t’voir comme une amie plutôt qu’un potentiel plan cul.
Jusqu’à ce qu’il snap et que vous partiez en couilles, en l’espace de quelques minutes. Ça s’est multiplié, ça s’est refait entre deux cours, les soirs où il s’faisait chier, où t’allais pas bien ou inversement – de quoi faire passer le stress la colère la frustration et putain, il en a profité à s’en cramper la queue, à en lâcher d’la farine et à en faire un demi-million d’analogies dégueulasses. Mais aussi à en connaître chaque détail de ton joli p’tit corps, de pouvoir replacer le moindre de tes grains de beauté et retracer les constellations qu’ils formaient dans ton dos à l’aveuglette ; sauf que ça crois-moi, il en parlera jamais.

C’était pas beau, pourtant – des va-et-vient de taulard cassé pour une gonzesse dans un deuil semi-assumé ; mais ça l’dérangeait pas, ou alors il faisait tout comme. Mais quelque part elle lui manquait, la p’tite perséphone – celle qu’il kiffait soûler, celle qui pouvait probablement lui péter la gueule s’il avait le dos tourné ou quelques grammes dans le sang. L’ancienne toi ; et c’est con à dire, mais ça l’a encore moins dérangé, d’arrêter d’venir dans ta chambre, de t’faire venir dans la sienne et venir tout court.

Et ça fait un bail que y a plus eu d’fringue retirée, de baiser-morsure et de coups de reins à en voir les étoiles – ça fait un bail et on s’attendrait à une évolution, un truc qui change ou tout qui r’devient comme avant mais putain, non. Y a qu’un malaise, moins de rigolade, plus de regards bizarres et la gêne qui s’glisse entre vous quand y a des contacts physiques pas prévus ; ça commence à le faire chier, et floyd est pas réputé pour être patient. Particulièrement quand c’est avec quelqu’un qu’il croise tous les jours, qu’il côtoie 24/7 et, pire, qu’il apprécie.

Du coup cette fois, il craque – comme quand il a craqué en voyant l’autre connasse (la douce) avec un autre, sauf qu’il t’arrache pas ton t-shirt mais t’attrape par le bras et t’entraîne, comme un con, dans la première salle vide qu’il trouve ; au final, il arrête son choix sur les balcins. Pas un mot tant qu’il a pas refermé la porte et pas un sourire quand il souffle toute sa frustration, beaucoup trop sanguin pour se retenir de déblatérer tout c’qu’il a à dire.

« bon écoute percy, c’était marrant cinq minutes de jouer les adolescents prépubères, mais faut qu’on fasse quelque chose. J’en ai marre de pas pouvoir être comme avant alors, bordel, c’est fini. » l’interprète pas mal – il parle pas d’arrêter de te fréquenter, mais plus d’arrêter de faire comme si y avait rien, alors que y a tout. Main passée dans sa tignasse, il prend deux ou trois poignées de secondes pour s’autoriser un temps de réflexion ; et tu sais d’habitude, quand il se r’trouve face à un obstacle comme ça, il s’contente d’abandonner la personne derrière. Tu devrais t’sentir honorée, percy. « on a merdé, c’est vrai – dis pas que y a que moi sinon j’te jure j’te prends ici et maintenant pour t’prouver que t’es aussi responsable que moi. » rictus de merde qui revient au galop ; il le fera pas. « bref, c’est pas une raison pour être… comme ça. J’veux qu’on red’vienne potes. » mots mâchés, comme pour étouffer ce truc dégueulasse et rosâtre qu’il assume pas ; tu lui manques, et il aime pas ça.

Lippes pourléchées furtivement lorsque son regard te tombe dessus – et l’onyx de ses yeux scintille presque ingénument, semblant de vulnérabilité faisant frétiller sa pupille en quasi-permanence dilatée. C’est qu’il tient à toi, l’enfoiré ; qu’il sait que, même en se perdant entre plusieurs dizaines de paires de cuisses, il trouvera pas cette flamme qui l’a souvent attiré à toi. T’as pile ce qu’il lui faut, ce qu’il cherche chez une nana – pour la compter parmi ses amis plus que pour une partie de jambes en l’air.

Sauf que Floyd a jamais été adroit avec ses sentiments, pas plus que ceux des autres. A attiser de tendres espoirs, à jouer avec des amours vaines. Dieu sait qu’on lui a dit qu’un jour, ça lui retomberait dessus. « Toujours aussi poétique, Lindberg. Malheureusement, je me verrais contrainte de décliner ta proposition de me prendre ici et maintenant, car je suis parfaitement consciente de mon erreur. » Son sourire se fait balafre tranchant la largeur de son faciès blafard, il retient un éclat de rire et se contente d’un rictus carnassier – c’est qu’il pourrait être pris pour un loup-garou, avec ses relents de prédateur enchaîné et son attitude perpétuelle de chasseur. « C’est un truc de Serdaigle, le vocabulaire ? Ou t’essayes juste de m’énerver ? »

Le ton est doux, mielleux ; pourtant la menace couve, rampant dans la moindre des syllabes qu’il fait sciemment rouler sur sa langue percée. Il aime pas être pris pour un con Flo, et il aime encore moins qu’on lui manque de respect. Pourtant, avec toi, il laisserait presque passer. « Ca ne me dérangerait pas, de redevenir comme avant. Mais est-ce qu’on peut véritablement y parvenir ? Est-ce qu’on peut oublier nos… coucheries et faire comme si de rien n’était ? » Sa petite grimace arrogante disparaît instantanément, remplacée par une moue agacée – main passée dans le bordel sans nom qui forme sa tignasse brune, et il laisse un soupir affaisser ses épaules.

« Oublier, non. Faire semblant non plus, t’as bien vu où ça nous a mené. Sérieusement, Blackwell, j’étais à deux doigts de t’arracher la tête. » Sanguin, incapable de garder son calme – il a pété des gueules pour moins que ça. « Mais peu importe. On a plus douze ans, on peut passer au-dessus de ça. T’es pas la première de mes potes que j’me fais Persy, et sûrement pas la dernière. » L’envi de mentionner Arya caresse sa gorge et se bouscule sur ses lèvres tordues, mais il ravale le commentaire ; ce qu’il a avec Arya, sans être capable de le nommer, présente guère un bon exemple d’amitié préservée. « A part si t’as réalisé à quel point je suis un mec d’enfer, et que t’es tombée amoureuse de moi. »

Immédiatement sa voix s’ourle de velours, il se glisse dans ton espace personnel en te pousse jusqu’à la première table pour t’y encadrer de ses bras, la suffisance de nouveau lisible sur les traits joueurs de son visage prétentieux. « Tu t’sens capable de résister à tout ça, Persy ? » Il se penche, provocateur, pour ronronner contre ton hélix – y reste quelques secondes, trop longtemps pour se clamer insensible, avant de reculer et de plonger ses phalanges éclatées dans les poches de sa veste séculaire. « Passe au-dessus, bouffonne. J’me ferais chier, si tu m’cassais pas les couilles à la moindre occasion. »
Et un demi-sourire, plus honnête que les précédents, se fraie un chemin sur la courbe de ses lippes difformes.