[EVENT #5] Groupe 2 — Alienor, Bertram, Cecilia, Alexander

Il faisait froid. Froid à se laisser couler, noyer et enterrer.
Aurais-tu un regret ? Aurais-tu la moindre larme qui coule Cécilia ?
Tu peux te réveiller, tu peux te rendormir
Qui sait ce que tu peux ? Tu n'es personne après tout.

Ce rêve. Le même qui danse derrière ses yeux clos, les mêmes mots et les mêmes sons. Cécilia, l'étrange. Cécilia, la difforme. Piques qu'elle a apprit à assimiler et à comprendre. Parce qu'elle n'était pas normale, peu importe combien de fois, elle se convaincrait qu'elle l'est. Les mêmes mots, les mêmes sons et les mêmes...odeurs ? Le nez fut brusquement réveillé et animé. Ça sentait fort et mat, elle ne pourrait pas mettre exactement le terme sur ces flots de sens qu'elle percevait. Le Lotus, une odeur prédominante et violente. Bertram, elle sentait son odeur. Elle était mélée à tellement d'autres, Heaven et un autre. Elle ne le reconnaissait pas mais ses yeux s'ouvraient lentement.

Confirmation du nez, tout était presque onirique. Ces lotus blancs qui semblaient s'étendre comme à l'infini, ces arbres qui luisaient d'un tendre lumière blanchâtre. Ils étaient quatre, quatre comme on pourrait être une centaine ou être un. Elle n'arrivait pas à parler, perdue et bouleversée. Son esprit ne faisait pas le point, son corps n'arrivait pas à suivre. Perdue et comprimée dans cet océan de sensations. Elle n'avait pas froid, elle n'avait pas si froid. Cécilia et sa manie de dormir les pieds couverts. Cécilia portait une épaisse paire de chaussettes montantes blanches rayées violettes et un t-shirt trop ample flaqué avec le slogan du ministère. Un vieux cadeau de son père qu'elle gardait avec un intérêt presque disproportionnés. Son corps ne suivait plus très bien, tandis que dans un élan curieux, elle venait disloquée une fleur sous son pied. La fleur s'effritait sans une complainte tandis que Cécilia comprenait enfin. C'était la vérité. Elle ne rêvait plus, elle n'a jamais rêvée. La condition de son corps revenait enfin, prendre conscience de ses doigts. Prendre conscience de ses mains. Elle était assoupie, comme si elle avait marché sans s'en rendre compte. Somnambulisme ? La peur reprit le dessus de son cœur, tandis qu'elle n'entendait que des fragments de ce qui se passait à l'extérieur de son être. Elle ne devait pas perdre le contrôle, ne surtout pas perdre le contrôle. Ils guettaient, ils attendaient.

Puis un craquement, un appel à l'aide. Elle est enfin sortie, sortie de ce bourbier épais et gluant. Heaven ? Où était Heaven ? Bertram semblait presque trop à l'aise dans cette situation, comme un enfant devant une boîte magnifique qui regorgeait de surprises. Elle a glissée, sans un bruit auprès de ce kaleidoscope vivant, cette petite souris qui devient tantôt loup et tantôt renard.  Elle était un tourment magnifique, mais tellement douloureux à regarder. Cécilia n'aimait pas, non. Elle n'aimait pas ça du tout pour pour Heaven. Alors sa main fit doucement de son épaule, que faire de plus ?

-Heaven… On va...sortir d'ici.

Ses mots semblaient hésitants, mais que dire de plus. Elle n'avait ni baguettes pour faire apparaître un espoir ni son téléphone dont elle n'arrivait même pas à le débloquer. Puis, elle se tourna vers celui qui ne semblait avoir de lien qu'avec Heaven et elle murmura lentement son prénom.

-Cécilia, je suis Cécilia. Ca sera plus simple pour la coopération.

Un fragment de mémoire revient, des mots lancés par Bertram auquels elle pouvait répondre que maintenant

-Je ne sais pas ce qu'on fait ici. Je dormais...du moins. Peut-être est-ce un rêve où tout nos esprits sont reliés ou une vision d'un paradis commun ? Je ne sens qu'une odeur trop forte de Lotus.

Sa chaussette était encore souillée des pétales blanchâtres.
-Nous devrions peut-être tenter de définir la sortie ? Ou au minimum, d'avancer pour voir le bout. Ce lieu ne peut pas être sans fond ni bout.

N'est ce pas ? Sa main  se faisait plus douce sur l'épaule changeante et tremblante d'Heaven. Les cheveux caressaient et se retiraient de la main de Cécilia, témoin muet des crises internes d'Heaven.

Personne ne semblait sûr de rien, tout le monde se regardait comme des chiens en faïence. Certains mots fusaient ici et là mais Cécilia n'y prêtait pas grande attention. Elle était focalisée sur Heaven, tentant de son mieux de trouver un moyen de l'apaiser. Ses actions basiques eurent l'air de l'aider, permettant un lèger regain d'espoir dans son esprit.

Elle avait absorbée les paroles et l'espèce de chamaillerie entre Bertram et le fameux Alexander. C'était curieux de voir Bertram répliquant sur ce ton, c'était si loin de l'homme aux traits lisses et réguliers qu'elle connaissait. Pourtant, elle n'en n'était pas surprise, elle l'avait sentie dès le début. Et elle ne put s'empêcher de chuchoter autant pour elle que pour répondre à Alexander dont l'accusation l'avait curieusement affectée. Elle en ressentait encore des étranges tiraillements dans son cœur.

-Si j'avais voulu faire cette blague, je n'aurai pas mêlé Heaven et Bertram -son ton se faisait plus hésitant sur Bertram, sachant pertinemment qu'il aurai sans aucun doute apprécié une chose encore plus étrange- et j'aurai mis des quenouilles au lieu des lotus.

Cette affirmation étant faite avec le plus sérieux des regards envers ce serpentard relativement violent. Comme dirait nos amis les hongrois un utcagyerek. L'idée de rajouter encore une couche fut subitement détruite par l'idée d'amener Heaven à l'infirmerie. C'était assez inquiétant qu'Heaven, la joyeuse (enfin on peut le dire ainsi) et vivante Heaven ne soit qu'une coquille emplie d'angoisse. C'était horrible à regarder, et elle ne put qu'accepter la proposition de Bertram en proposant d'un ton le plus uni possible pour ne pas stimuler plus son amie

-Très bien Bertram, fait attention aux Chauvemoux.

C'était quoi les Chauvemoux ? Un jour, elle le dira mais ce n'était pas le moment car peu de temps avant d'avoir prononcé ces paroles, il s'était enfoncé dans la semi-obscurité. C'était presque inquiétant, l'odeur des lotus était si forte qu'elle couvrait tout. Pire que devenir aveugle. Elle ne pouvait pas s'empêcher de regarder de façon furtive les deux restants, tentant d'ignorer ses démons qui revenaient à elle.

Mais elle n'eut pas le plaisir de s'y tenir longtemps car une forte lumière vient lui agresser son regard embué. C'était douloureux, trop vif. Puis, ça s'était calmé. Comme une diode moldu, un écran de démarrage. Le monde a recommencé à démarrer sans Cécilia, perdue dans ses ombres dansantes devant son regard. Puis un long cri qui semblait être si long, des gestes et un contact si brusque contre elle. Elle flottait si long, si long qu'elle ne touchait plus le sol. Mais un petit quelque chose lui fit ramener sur terre. Et elle fit Heaven accrochée à elle, le visage tordue d'une expression insoutenable. Mal, elle avait mal. Des pétales glissaient le long de ses doigts, elle n'eut pas l'envie de comprendre sa rage brusque, se doutant des causes. Elle prit Heaven dans ses bras, raffermissant son attache pour tenter vainement d'absorber sa douleur, fermant les yeux et ne se concentrant que sur l'odeur sucrée d'Heaven. Elle tentait de lui chuchoter des choses à l'oreilles, de petits morceaux de chant croates avant de lui caresser doucement la tête. Elle ne savait pas quoi faire de plus, desemparée par ces douleurs si proches de celles qu'elle avait l'habitude de connaître.

-Penses à une plume, Heaven. Souffles doucement et elle va monter.

Des méthodes, celles-çi était la plus efficace. Puis, elle jetta un coup d'oeil à Alexander, l'intimidant presque de l'aider ou de rejoindre Bertram. Car, celui-çi était trop loin pour le nez de Cécilia et son odorat ne lui permettait pas de s'assurer qu'il ne subisse pas un sort comparable à celui d'Heaven. Elle ne voulait pas crier pour ne pas affoler encore plus sa protegée alors, elle siffla d'un ton presque hors de son caractère habituelle

-Depêche-toi Alexander.

-

Montagnes de chair purulentes. Chanson d'une teinte monotone, l'esprit de Cécilia semblait enfin avoir trouvé un sens et une harmonie que lui seul arrivait à accorder. Sourire léger à Heaven dont le cœur de Cécilia battait pour. Elle n'eut même pas été surprise par tout ce qui se passait autour d'elle. Son esprit s'était enfin envolée loin de tout ça, l'angoisse avait deserté son cœur. Le portail de la catatonie s'était ouvert par le souffle calme et les centaines de pages dont l'esprit de Cécilia s'abreuvait.

Aucune réaction à tout ça, elle flottait enfin dans un monde qu'elle connaissait. Assise désormais en tailleurs, devant une fleur de lotus. Elle soufflait doucement, tentant d'accorder sa respiration à ces bruits qu'elle entendait si et là. Pur bruit de sa folie ou vrais bruits ? Elle ne le savait pas. Ses émotions étaient coupées et lentement, elle s'immergeait devant cette fleur qui s'épanouissait dans le parfait silence.

Que voulait-elle dire ? Que voulait-elle faire ? Il fallait lui parler, la comprendre, l'attirer. Le doigt de Cécilia vient doucement caresser l'un des pétales, s'excusant silencieusement pour les meurtres sauvages de ses sœurs.

Désolée les autres, Cécilia était partie. La poussière des arbres rentraient un peu partout mais pas dans le calme parfait de son silence.

Résumé: