The Ravenclaw Nest.

Otília a la nette sensation que ses réponses vis-à-vis des questions de l’italienne jettent un léger froid. Elle espère se tromper mais elle sent bien des regards plus fermés, peut-être, à son encontre. Pourtant… elle remplit son rôle. Il est inutile pour elle de promettre monts et merveilles à ses élèves. Elle a toujours opté pour un maximum de transparence à tous les niveaux, et cela continuera en tant que directrice de maison. L’idée n’est pas de leur faire croire qu’elle parviendra à les favoriser ou qu’elle se fera soudainement laxiste à leur encontre. Non. Il y a des choses qu’ils doivent entendre, comme le fait qu’ils seront traités de la même manière que n’importe quel autre élève de l’établissement, qu’il soit Serdaigle ou non. Oui, elle fera tout ce qu’il faut pour que la maison de bleu et de bronze conserve sa réputation et que ceux qui la représentent jouissent du meilleur confort possible pour leurs études. Elle plaidera en leur faveur aussi souvent que nécessaire, mais elle saura rester juste. Et si pour cela elle doit leur dire « non », elle leur dira.

Poudlard est un lieu d’épanouissement et d’apprentissage, c’est vrai. Elle aime d’ailleurs suivre les élèves au fil des années et les voir évoluer, changer et mûrir. Pourtant, l’école ne doit pas non plus être un cocon sur-protégé complètement déconnecté du reste. Il est important que chacun garde en tête que c’est également un tremplin – surtout dans leurs dernières années – pour les amener dans les meilleures conditions qui soient face au monde « en dehors ». Celui qui n’est pas toujours rose, jamais simple, et assez peu à l’écoute de toutes les réclamations personnelles, malheureusement. Du regard, la hongroise voit bien l’élève Silvola qui se renfrogne et ne s’en cache pas. Elle n’est pas ravie des réponses de la directrice… c’était à prévoir, mais c’est ainsi. D’un autre côté, Otília remarque aussi une élève qui prend des notes. Intérieurement cela l’amuse, elle ne voit guère dans ce qu’elle a dit ce qui mériterait d’être écrit. Enfin, il ne s’agit pas de Serdaigle pour rien.

Par chance, la salle ne reste pas trop plongée dans le silence, car une autre élève prend l’initiative d’une question. Il s’agit de la jeune Martin aux cheveux roses.

« Et bien, vous avez tout compris Mademoiselle Martin. Mon rôle n’est pas punitif, à la base, ce n’est pas ainsi que j’envisage ma fonction. Comme vous le dites, un professeur, autant qu’un directeur de maison, est là pour transmettre ses connaissances et vous accompagner, le tout dans un climat de confiance. Je souhaite mettre tout en œuvre pour instaurer un tel climat. » Otília jette un regard circulaire sur les élèves, avec un sourire doux. « J’insiste sincèrement sur le fait que mon bureau vous sera ouvert et si nécessaire vous pourrez aussi venir vers moi à la fin d’un cours. Si vous avez besoin d’échanger, que vous souhaitez des réponses à certaines de vos questions, au sujet de vos études et même plus personnelles, je serais là pour vous écouter. Je m’y engage. Je ferais en sorte de me rendre disponible, et si le moment est vraiment mal choisi, nous conviendrons ensemble d’un autre créneau horaire, le plus rapidement possible. »

L’Ambrozy ne sait pas si la question de l’anglaise fait écho à un besoin personnel, mais elle préfère bien insister sur le fait que oui, elle répondra présente pour répondre à toutes les demandes des élèves. Et puisqu’on en vient aux questions importantes, c’est au tour d’Edwyn Ollivander d’aborder de manière plus générale ce que Otília envisage vis-à-vis de la maison Serdaigle. Une question bien large et sérieuse, que l’on poserait presque face à un politicien en campagne. Elle comprend toutefois les craintes que peuvent avoir les élèves face au changement, comme l’a exprimé à sa manière la jeune Ene un peu plus tôt.

« Je vous rassure de suite, je n’ai nullement l’envie ou la prétention de vouloir tout changer au sein de cette maison. Vous l’avez dit vous-mêmes, mes prédécesseurs ont eux aussi agi dans le sens du bien pour les élèves Serdaigle et ma volonté reste d’en faire de même. J’ai des attentes envers vous comme vous en avez envers moi, je m’en doute bien. »

Elle marque un temps d’arrêt. « Je ne sais guère dans le détail comment mes prédécesseurs à la direction de cette maison envisageaient leur rôle et j’imagine que mes objectifs seront semblables, bien que mes méthodes différentes, peut-être. J’espère simplement faire de cette maison un lieu où chacun d’entre vous sera à même de s’épanouir en tant que personne, en tant que sorcier et plus particulièrement en tant qu’individu à même de réfléchir et d’appréhender en pleine conscience ce qui l’entoure. »

Ouh, les grandes phrases. Elle sent bien qu’elle prend un élan facile, il faut dire que depuis qu’elle sait que la fonction de directrice lui revient, elle a eu le temps de se préparer à se présenter aux élèves et leur parler (face à son perroquet, le plus souvent, qui caquetait sans discontinuer). « Bien sûr, Monsieur Ollivander, mes réponses doivent vous sembler évidentes. Je souhaite que cette salle commune Serdaigle reste un lieu d’échange et de respect avant toute chose. Chacun avance à son rythme, avec ses forces et ses faiblesses, je ne tolérerais aucun mépris entre les élèves. Il est important pour moi que chacun se sente bien ici et libre de s’exprimer, quelque soit son savoir, ses résultats ou sa naissance. »

Elle est toujours debout, face aux élèves, et elle se dit qu’elle ne serait pas plus mal assise, finalement. D’un coup rapide de baguette, elle fait s’avancer vers elle une chaise vide jusque-là. « Si vous me permettez… » Elle s’assoit et lisse d’un geste réflexe un pan de sa robe de sorcière, puis se redresse et reprend le fil de la discussion. « Pour cela, j’espère pouvoir m’entourer de préfets efficaces qui partageront, je l’espère, cet état d’esprit. Concernant nos équipes de Quidditch et d’Hippoball, je ne vais pas le nier, j’aime la compétition. Se classer en tête et briller face aux Gryffondor ou aux Serpentard sera toujours une grande source de satisfaction, vous en conviendrez ? »

Disant cela, elle s'attarde un instant sur Bertram, qui joue dans l'équipe de Quidditch. Elle affiche également un petit sourire et ajoute : « Dans une idée de partage des connaissances, d’ailleurs, je me demandais si un système d’entraide et de… « tutorat » – elle fait des guillemets avec ses doigts - ne serait pas intéressant ? Sur la base du volontariat, bien sûr. Lorsque j’étais moi-même élève ici, cela se faisait de manière informelle, et c’était quelque chose de sympathique et qui portait ses fruits. Je m’explique. Sur le tableau d’affichage – qu’elle désigne de sa baguette – inviter ceux qui le souhaitent à inscrire les matières dans lesquelles ils sont en difficultés. Un élève qui, lui, serait plus à l’aise pourrait alors se proposer pour aider l’élève – ou les élèves – en question. Très souvent ce sont les étudiants des années supérieures qui se proposent comme tuteurs. Rien de révolutionnaire, bien entendu, mais cela favorise les échanges à tous les niveaux. Qu’en pensez-vous ? Cela se faisait déjà les années passées ? »

Suite à ses réponses et ses remarques, Otília repère quelques regards qui se croisent, des visages qui expriment plus encore que des paroles. Beaucoup ne parlent pas forcément, mais elle sent bien que chacun se fait sa petite idée. Elle ne sait pas si c’est ce qu’elle dit, réellement, qui provoque cela, ou si c’est simplement des échanges silencieux à propos de tout autre chose, ou simplement sa personne. Elle sait bien que lorsqu’on est élève, on a une nette tendance à juger les professeurs, à s’en faire une image plus ou moins faussée, parfois difficile à défaire. Ce n’est pas bien grave. Les années passées lui ont donné l’expérience nécessaire pour ne pas s’attarder sur ce genre de facilité. C’est humain, après tout, de vouloir critiquer son prochain ou projeter sur lui des opinions.

Cela se fait entre adultes et les élèves ne sont aucunement épargnés. C’est à elle de savoir rester imperturbable. De filtrer ce qui vaut le coup de s’attarder ou non. Elle sent bien que nombre des élèves face à elle ne sont pas enclins à participer à la discussion. Certains par timidité, sans doute mal à l’aise à l’idée de s’exprimer en public, ou bien de lui parler, à elle. D’autres par manque d’intérêt, évidemment. Elle sait que ce genre de rencontre comporte ce risque. Celui de ne pas provoquer spécialement d’émulation. Que les élèves se sentent obligés de venir ou n’aiment pas ce qu’elle leur dit, ce qu’elle projette. Ce n’est pas grave, elle n’est pas femme à travestir ce qu’elle est ou ce qu’elle pense pour se faire bien voir. Dans ce qu’elle a pu leur dire, jusque-là, elle est parfaitement sincère. Il est important pour elle de bien transmettre sa manière de penser la Direction de la maison Serdaigle.

Tant mieux si cela leur convient.
Si ce n’est pas le cas… tant pis.

On ne peut jamais plaire à tout le monde et elle a largement eu le temps, depuis qu’elle enseigne à Poudlard, de savoir que sa fermeté, par moment, crispe certains élèves. C’est comme ça. Elle essaie toutefois de formuler sa manière de pensée de la façon la plus douce qui soit. Elle n’est pas un monstre de froideur, malgré ce que certains peuvent penser. Disons qu’elle a des principes qui lui tiennent à cœur et des valeurs sur lesquelles elle peut être intransigeante quand on les bafoue. Pour le reste, elle est ouverte au dialogue et au compromis, si tant est qu’on vienne vers elle pour lui en parler. Le dialogue a toujours été une nécessité, pour elle. Dans ses dernières années dans l’établissement, elle a compris que cela pouvait être une force. Elle l’a entretenue dans son rôle de diplomate et aujourd’hui encore elle sait que les mots et les tournures de phrases peuvent changer une situation du tout au tout.

Quand elle évoque l’idée de « tutorat volontaire » entre les élèves qui pourraient être intéressés, elle s’attend à plus de réaction qu’un léger silence et des regards qui se croisent sans rien exprimer. Alors, elle attend, un sourire courtois sur les lèvres. Quand on développe une opinion et qu’on demande des réactions, c’est toujours bien d’avoir un retour, non ? Elle pourrait attendre éternellement et laisser la gêne se répandre… Fort heureusement, un bras s’élève et une voix se fait entendre, celle de Wendy Mulligan. Ce que dit cette dernière est intéressant et Otília acquiesce de la tête, tout en l’écoutant, le regard droit sur elle. La blonde ne semble pas complètement à l’aise à l’idée d’attirer l’attention et finit par conclure ses remarques. Par chance, Ene rebondit sur ses propos.

« En effet Mademoiselle Mulligan, vous pointez du doigt l’intérêt de ce type de tutorat. C’est avant tout une manière de créer du lien entre des élèves d’années différentes qui ne sont pas forcément enclins à se côtoyer, spontanément. De plus, il est vrai que le retour d’expérience de ceux en ASPIC ou en DEMA peut toujours être intéressant pour les plus jeunes cherchant à s’orienter ou veulant des conseils sur les années qui les attendent. Et vous savez comme moi qu’entre vous vous pouvez certainement échanger plus librement qu’avec des professeurs sur les difficultés que vous avez pu rencontré ou les doutes que peuvent avoir certains. Ce n’est pas forcément original, en effet, mais cela reste un moyen de peut favoriser le dialogue entre vous. Si vous êtes volontaires, bien entendu. »

Non pas qu’elle néglige son rôle dans l’orientation de ses élèves, loin de là. Elle est toutefois bien consciente que l’expérience vécue par les élèves et leur manière de la retranscrire loin des oreilles du corps enseignant attireront plus aisément l’attention des plus jeunes. C’est pour cela que ce type de tutorat, sans être innovant comme le dit bien la brune, peut-être intéressant.

Otília sent bien que l’attention s’étiole au fil du temps. Cela fait une petite demi-heure qu’elle est là et il est évident qu’elle a peut-être trop profité de la disponibilité des élèves. Il y en a qui ont décroché depuis plusieurs minutes et essaient – avec plus ou moins de réussite – de ne rien en montrer. La hongroise se relève alors et salue légèrement Wendy et Ene.

« Merci aux deux courageuses qui ont accepté de me donner leur avis sur cette idée. Comme dit, ce n’est rien qui vous sera imposé, cela va de soi. Je ferai donc apparaître un parchemin prévu à cet effet sur le panneau d’affichage de la Salle commune pour ceux qui voudront se prêter au jeu. Nous verrons bien ce que cela donne. »

Elle est optimiste, même si une seule personne tente le coup, ce sera toujours ça de pris. Elle sait que les élèves ont parfois tendance à se mettre des freins, que ce soit par crainte ou vis-à-vis de l’image qu’ils peuvent renvoyer… elle croit toutefois en la valeur de l’exemple, et elle espère sincèrement que dans le lot certains sauront faire preuve d’initiative.

« Sur ce, je ne vais pas vous retenir et empiéter plus longtemps sur votre soirée. Je vous remercie tous d’avoir été présents. Comme je vous l’ai dit, je suis entièrement disponible si vous avez des questions ou que vous souhaitez vous entretenir avec moi de manière individuelle. Mon bureau se situe à côté de la salle des Potions et je vous y accueillerais avec grand plaisir. »

Elle s’avance en direction de la sortie de la Salle commune.

« Je vous souhaite à tous une excellente fin de journée. »