Le bal a tourné au cauchemar. Nombre d'élèves ont été emmenés sans raison valable. Tout ce qu'elle a put faire, c'est d'empêcher Enoch d'être attrapé, de protéger les efforts de Béring. Elle a tout fait pour le sauver mais est-ce vraiment le cas ? Les doutes plein la tête, la peine au coeur, elle n'a pas dormi autant qu'elle l'aurait voulu. Une heure, un peu plus. Entre larmes et désarroi, elle est arrivée en première dans la cabine. Les yeux rouges, les cernes à peine camouflées, elle s'est assise près de la fenêtre, fixant l'extérieur en attendant la venue des autres.

Elle a cru pouvoir protéger ce qui comptait à ses yeux mais au final, ses choix n'ont eu que des conséquences inverses. Elle ferme ses paupières, pose son front sur la vitre, profite de cette fraîcheur éphémère avant qu'un énergumène indésirable ne prenne la parole. Immédiatement, Ene lui jette un regard noir. Elle se souvient qu'il n'a même pas essayé de protéger Constance. Pire, il l'a complètement laissée se faire prendre. Combien de fois elle lui avait dit que ce gars n'en valait pas la peine ?

« Où est ta cavalière Declan ? Tu l'as abandonnée. »

Les mots sortent sans filtre. Elle se moque bien que sa présence dérange, qu'elle devrait simplement se taire. Ce n'est pas son genre. Elle lève les yeux au plafond, soupire de lassitude. Un vrai fanatique le Bergling. Incapable d'avoir une réflexion développée.

« C'est ridicule. Les élèves n'étaient pas une menace. Ils ont été emportés simplement pour que le Ministère perde la face. »

Faire tomber les plus forts en leur faisant commettre des erreurs. Une belle idée, du corbeau. Si la prochaine fois, il pouvait éviter d'impliquer des innocents, peut-être qu'elle montrerait plus d'enthousiasme.

Son regard s'assombrit quand Lux prend la parole, elle tourne ses yeux vers elle, lasse. Lux et sa soit-disant confiance. Ah ? Parce que quand on veut avoir la confiance des autres, on s'en prend à leurs proches ? On les emprisonne ? Ce n'est que de la manipulation. Il place les chaînes autour de leurs chevilles pour s'assurer de leur fidélité. Le corbeau ne leur fera jamais confiance. Lux est naïve de croire à cela. Et ensuite, Gabrielle rajoute une couche de stupidité.

Ene lève les yeux au plafond, désespérée. Simplement parce qu'elle s'exprime, elle a l'air de vouloir se rebeller ? De vouloir finir comme cette pauvre fille ? A quel point les Serdaigles sont aveugles ? Elle pose son menton dans sa main, fixe le paysage derrière la fenêtre et ne cherche même pas à se défendre. Elle garde toutes ses pensées pour elle. Elle se contente d'écouter et se demande pourquoi ils se sont réunis. Les questions s'échangent, les théories, les inquiétudes. Elle a un minimum d'informations. Mais à quoi cela lui servirait de leur dire ? Ils devaient déjà avoir compris par eux-mêmes. Ou pas. Vu la remarque de Nour.

« Tu penses vraiment que The Crow aurait causé tout ce grabuge en risquant de perdre trois de ses précieux subordonnés ? C'est évident qu'il les teste. Pour vérifier leur loyauté. Ou alors, il voulait les disculper en les faisant emprisonner. Ou l'un d'eux est un espion et il s'en chargera. Si "tout va bien" c'est qu'il a la situation en main. Tu ne comprends même pas quelque chose d'aussi simple ? »

Il n'y a aucune raison de s'inquiéter. C'est comme s'ils avaient déjà gagné une partie. Les adversaires que représentaient les membres des Foxes ont été arrêtés à leur place. Les professeurs devaient faire face à cette crise et surtout rassurer les parents. Le ministère était occupé à essayer de trouver des coupables là où il n'y en avait pas. Ils avaient le champ entièrement libre pour continuer dans leur lancée, pour poursuivre leur envol. Elle espère ne pas devoir aussi expliquer cela. La porte s'ouvre à ce moment, elle tourne vivement la tête, s'aperçoit que c'est une âme en plus qui les rejoint. C'est ça, la raison du regroupement ? Un recrutement ? Bienvenue dans le nid, il va falloir se serrer sur les banquettes.