Il était parti, et il se sentait déjà revivre. Ses parents avaient laissé une lettre dans sa valise, il les avait entendu l'écrire la veille de son départ, des larmes aux yeux et des émotions fatiguées au bord de leurs lèvres qui murmuraient des tendresses. Ils étaient peut-être aimants, mais ils étaient surtout envahissants et l'enveloppe devait sûrement contenir plus de regrets que de fierté, de sorte qu'il n'était pas encore certain d'avoir envie de l'ouvrir.
En arrivant à Poudlard – un jour après la rentrée des autres -, il s'était senti intimidé par l'immensité du château et avait failli reculer lorsque la porte du hall s'ouvrit devant lui. Il avait été accueilli par une montagne de paperasses, à régler entre Ilvermony et Poudlard ; quelques formalités auxquelles il s'était préparé. Une fois qu'il eut terminé, la première heure de cours n'avait pas encore débuté, et il s'apprêtait à vagabonder à la recherche de quiconque pourrait l'aiguiller.
Mais en s'aventurant dans la foule naissante, une chevelure rose et un faciès tendre fit s'arrêter son mouvement – fit s'arrêter son battant, pour une seconde seulement, durant laquelle il cru s'éteindre. Au fond de son crâne se débattirent un million de souvenirs douloureux et meurtriers, et pour chaque seconde qu'il laissait passer, il se maudissait de ne pas la retenir. Mais son corps ne réagissait pas et il aurait été incapable de la rattraper. Alors sa voix se lance en écho dans le hall immense.
─ Ellia!
Il était sûr que c'était elle. Ça ne pouvait être qu'elle. Elle se retourna, et il cru mourir sous son regard, faiblir sous son hésitation. Il voulu lui hurler que c'était lui, qu'il n'avait pas oublié ; mais maintenant qu'elle le regardait, il ne savait plus quoi faire.
─ Ellia..
Il avait répété son nom comme un écho, d'une voix apaisée maintenant qu'elle ne partait plus à l'opposé. Plus aucune pensée ne hanta son esprit lorsqu'il avança d'un premier pas, complètement hypnotisé par sa silhouette, effrayé à l'idée qu'elle disparaisse s'il la quittait des yeux. Et en quelques enjambées, il arriva à sa hauteur, et sans ajouter un mot de plus, il l'avait entourée de ses bras, l'avait ramenée contre lui.
Il avait retrouvé une partie de son âme brisée, et il n'avait plus l'intention de la laisser partir.
─ Combien de temps ça fait, Ellia?
Lui-même ne savait plus.
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Re: ghost of mine (ellia) Jeu 15 Mar - 9:55
Une nouvelle année qui commence, nouvelle à errer dans les couloirs sans réel but, à découvrir les nouveaux visages, les nouveaux virages, rien dans ce château qui ne changeait mais bel et bien une réalité. Chaque début d'année ici laissait entrevoir l'amorcement d'un changement, oh pas forcément pour tout le monde mais pour quelques-un qui changeaient à chaque fois. Ellia dans sa cape qui volerait presque sur les pavés, Ellia à peine réveillée mais déjà souriante pourtant. Magnifique soleil à l'extérieur, un tendre air frai à l'intérieur ; on avait beau être la fin de l'été, elle était certaine de passer une bonne journée. Une chaude journée.
Les élèves s'agglutinent aux portes de la grande salle, pressé sans doute -ou pas pour certains- de la quitter rapidement. Petit déjeuner succulent à peine terminé, elle se lève et lui la troupe, quelques bouquins dans les mains avec cette idée de faire un effort pour une fois. Ne pas réviser, seulement travailler. Aller en cours et tenter de comprendre quelque choses aux explications beaucoup trop compliquées de Redmond, le prof d'alchimie. Tout ça sans se dire que si elle prenait la peine d'écouter convenablement y aurait aucun soucis, bien entendu. Ellia s'échappe, furtive glisse à travers la foule, se mêle et se démêle à l'influence changeante de cette masse qui se meut. Ellia s'échappe à la recherche de Noah, observe de sa taille pas très grande les alentours pour tenter de l'apercevoir mais rien du tout. Il a dû s'en aller avec Sloann déjà bien avant, c'est que ça fait un moment qu'elle avait dit qu'elle les rejoindrait. Bon, bah tant pis. Soupir rapide pour évacuer la pointe de déception et la route reprend bien vite comme si de rien était.
Ellia s'échappe. Ellia! se retourne bien vite lorsqu'on l'appelle de si loin à travers les gens.
Oh. Oh. Mon dieu.
Elle n'y croit pas et tu t'avances pourtant vers elle qui a cessé tout mouvement. Le regard surpris, iris écarquillés, les bras pressés contre son coeur tenant à peine ses bouquins. Crispée comme rarement elle l'avait été. Elle y croit pas, elle est choquée. Oh Elijah, c'est vraiment toi ? Cette douceur lorsque tu la serres contre toi lui fait dire que oui, cette odeur si familière à ses narines lui fait dire que oui, cette odeur qui l'apaise et qu'elle inspire comme pour croire que ça n'est pas un rêve. C'est beaucoup trop doux pour l'être, beaucoup trop tendre, bien trop réel pour n'être qu'un vulgaire rêve n'est-ce pas ? Ta voix lui prouve qu'elle a raison. Que ton regard dans le sien, si profond, si beaux, tellement hypnotisant, rien de tout ça n'est un rêve.
« Tu es bien là, Elijah... » qu'elle murmure à peine pour confirmer la réalité.
Combien de temps ? Aucune idée. Les souvenirs remontent pourtant comme si tout s'était passé la veille et les jours d'avant, que les années qui séparaient ces retrouvailles n'avaient jamais existé. Tu es bien là, devant elle, et elle a l'air un peu conne à réagir comme une pucelle en manque d'amour c'est ce qu'elle se dit. Ce qu'elle efface dans un rire avant de claquer doucement une main sur son front pour faire venir l'immense sourire que tu vois maintenant. « Elijah ! Bordel, ça fait tellement longtemps ! » Ses doigts dans tes mèches qui ébouriffent pour cacher le semblant de gêne qui prend racine sans trop d'explications.
« Mais... Qu'est-ce que tu fous là ? »
Une seconde de blanc, le temps qu'elle réalise. Allonge et serre ses doigts pour asséner un coup, pas si fort, à la verticale sur ton crâne.
Tout à coup, le monde autour n'avait plus d'importance ; il n'existait en cet espace temporel que Ellia et Elijah, leurs corps réunis et leurs cœurs chantants une nouvelle mélodie. Combien de temps avait passé sans qu'ils ne s'envoient le moindre message ? Combien de temps avait passé sans qu'il ne voit son visage ? Les années à rire lui paraissaient si loin ; les années tendres et niaises s'étaient démembrées pour ne laisser que des sentiments douloureux et fanés.
Et maintenant qu'elle était là, il ne restait de ces sentiments que de vagues séquelles, décousues en son cœur lâche ; il ne restait en sa poitrine combattante que des souvenirs trop laids sur lesquels il voulait fermer les yeux, pour cette seconde au moins.
Quelques gênes se décèlent dans le rire de Ellia, mais il n'a que faire, ne relève pas, et son rire l'accompagne dans une musique heureuse, dénuée d'artifices. Et il baisse la tête, honteux de ses manquements. Est-ce que c'était à lui, de prendre des nouvelles ? Oh, il aurait du le faire, certainement, mais quelques rancœurs avaient demeuré en sa chair quand elle était partie – sans même un baiser posé sur sa joue solitaire.
Elijah avait beaucoup de colère ; mais Elijah était aussi beaucoup trop heureux pour s'en soucier.
─ C'est que tu n'as rien demandé..
Il lui adressa un sourire, léger mais honnête, incapable de définir s'il s'agissait de reproches ou non. Avait-il vraiment envie de lui exprimer toute la tristesse – le désarroi – dans lequel il s'était retrouvé, lorsqu'elle l'avait laissé seul ? Laissé pour compte à l'orphelinat. Elijah aurait aimé ne pas nourrir tant de rancœurs.
─ Ca fait au moins deux ans que je pensais..
Il s'arrêta, hésitant. Allait-il vraiment le dire ?
─ Deux ans que j'avais fait un trait sur mes souvenirs et le tien.
Il était idiot, une fois encore. Il était fébrile, comme toujours. Mais Dieu ce qu'il était heureux d'avoir eu tords. Et même lorsqu'il s'était décidé à partir vers l'Angleterre, il n'avait plus repensé à la possibilité de reconstruire ses sentiments déchirés. Ellia n'avait plus jamais existé dans son univers, jusqu'à ce qu'elle réapparaisse ainsi, tel un fantôme, de la même manière qu'Elijah devait avoir l'air d'un spectre.
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