Do not fall | EZRA

Les mots ne sortent plus, tu n'avais même plus l'envie de lui répondre. Tu en avais marre de tout, de la voir, là, se tenir droite comme si elle semblait savoir tout mieux que les autres. Comme si apprendre que sa propre mère était comme toi, dénuée de magie. Qu'est-ce que cela pouvait bien y changer ? Son attitude était exécrable, c'était ça que tu voyais, pas le reste. « Je n'ai jamais clamé savoir quoi que ce soit Mikhal. Je vois les faits. Je ne cherche pas à comprendre ou à justifié. Encore moins à prendre en pitié. » Tes mots sont secs, dénués de toute variation.
Tu veux vraiment savoir ?
Non.
Tu t'en fous de ses problèmes.
Tu t'en fous de ses soucis, de ses marques, de ses cicatrices. Tu en as, elles vont rester et tu ne viens pas les mettre sous le nez des gens. Tu ne viens pas étaler tes soucis, tes malheurs sous le nez des autres. Ton regard ne prends même pas la peine de se baisser pour voir, pour observer ou même chercher à comprendre où elle voulait en venir. Tu étais borné Ezra. Trop con pour assimiler ce qu'elle voulait te faire comprendre. Son regard tu le vois, tu le comprends et tu sais qu'elle a mal de te montrer ce que tu refuses d'affronter. Tu comprends et en même temps tu refuses de lui accorder cette compréhension, cette compassion inexistante. « C'est tout ? Tout ce que t'as à dire ? » Un souffle s'échappe de tes lèvres, cet air arrogant et détaché de tout qui revient au grand galop. Mais c'était bien plus fort que toi. Tu avais en horreur cette attitude qu'elle avait devant toi.

« Tu penses que "ça", ça va changer quoi que ce soit ? Tu as raison Mikhal, tu ne sais pas grand chose non plus. » Tes mains brisées montre alors ses bras au fil de tes paroles alors que ton regard ne se perturbe pas. « Juste parce qu'une bande de cons t'infligent des choses il n'y aura personne qui te regrettera ? Continues ainsi, tu es sur la bonne voie pour que cela soit réellement le cas. » Et tu repousses ses bras sans douceur. Prononçant des mots que tu devrais t'adresser aussi.

Lorsqu'elle semble sous-entendre que tout ça t'étais aussi adressé tu ne répondis rien. Taisant tes reproches, tes remarques, taisant toute la rancœur qui te maintenait éveillé avec cet air de chien enragé qui en veut au monde entier. Pour quelque chose dont personne n'est responsable, pour quelque chose que l'on t'a imposé, que tu veux réparer, effacer, pour que l'on te laisse être ce que tu veux. Pour devenir quelqu'un.

Tu aimerais dire que tu n'es pas concerné, que tu n'en veux à personne mais c'était faux. Tu en voulais à tes parents, tu en voulais à beaucoup trop de gens dans l'école, tu t'en voulais et tu ne voyais même plus tant tout ce que tu avais déjà. Toutes les personnes qui ne t'ont pas laissé tomber, tout ceux qui sont encore là sans que tu ne réalises réellement. Tes yeux se penchent sur les petites pierres qui tombent dans le vide.

Un soupir qui se perd de nouveau, un haussement d'épaule qu'elle ne verra pas car son dos était déjà tourné. Tu ne la regardes même plus, tu fixes juste le vide à ses pieds. Ta voix fini enfin par lâcher avec cette intonation lasse, vide de toute envie. « J'étais sincère aussi quand je disais que je n'avais pas l'intention d'accepter les mains tendues. » Parce que trop fier, trop con. Trop stupide pour te rendre compte que tu ne t'en sortiras jamais tout seul et que ton égoïsme te perdra et qu'il t'aveugle déjà.

Tu te retournes alors faisant un signe de la main que tu supposes qu'elle ne verra pas, t'éloignant sans dire un seul mot de plus. Tu n'avais plus envie de parler, plus envie de creuser plus. Tout ça, te suffisait déjà.