cœurs givrés // dove

Le monde pétillait des couleurs imperceptibles à ses yeux, mais indéniablement plus présentes, dominant la teinte unique d'un monde morne sans réel espoir. Le monde était différent depuis ce jour-là, en bien meilleur, mais la joie de ces sentiments découverts l'empêchait d'analyser les faits avec un quelconque recul. Car pourtant, si tout allait bien, plus rien n'allait, à présent.
Depuis cette nuit, leur réunion forcée ; depuis les brises des émotions naissantes, écrasées par une angoisse dominante. Elle l'avait ignoré. Ouvertement, le regard détourné dans une honte qu'il parvenait à percevoir, et rien de plus que cela ; tout était flou, comme le désespoir silencieux d'un bonheur déjà ruiné. Un élan cassé dans le premier mouvement ; le morceau ruiné dans ses premières notes, et il hésitait, au bord du précipice sans savoir s'il était à même de croire en un bonheur qu'il avait tant attendu.

Magnus s'était tourné vers Dove. Il l'appréciait, et en l'instant, il ne voyait personne d'autre vers qui se tourner - et elle avait toujours été d'agréable compagnie pour un gamin hyperactif dont la seule occupation régulière qu'il n'abandonnait pas au bout de quelques semaines était le vol de nourriture.
Un souffle de vent sous les pieds, comme une motivation silencieuse ; les mouvements à mi-chemin entre la motivation, le désir de la voir et l'impatience de connaître ses réponses. Il avait le cœur qui dansait à l'idée de penser à Chanel, quelques pas musicaux avant qu'il ne fonde dans le gouffre d'une asphyxie douloureuse.

Il était incapable d'avancer. Incapable de vivre dans cet état, poser un pied devant l'autre ; incapable d'espérer en un futur tant que le présent le torturait.

« Hey, Dove ! T'es rapide ! Tu veux des gâteaux ? On peut aller à Pré-Au-Lard acheter du chocolat sinon, c'est moi qui offre. »

Le regard terne, où brillait cette excitation presque forcée, car s'il était vraiment heureux à l'idée de la voir, celle de pouvoir frôler le bonheur, en l'état, lui semblait insupportable. Il ne comprenait pas ses sentiments. Son cœur battait si vite, et pourtant, il ne lui avait jamais semblé si mort.
Il avait besoin d'aide, et il se sentait pitoyable à l'idée de ne pas prouver se débrouiller seul alors qu'il s'était promis de n'être pas une gêne dans un monde auquel il n'appartenait qu'à moitié.

Mais là, dans ce début de soirée, alors que l'air devenait déjà frais au point d'en faire oublier les chaleurs de la journée, au point d'en givrer les moindres sentiments, son angoisse revenait, comme l'inéluctable vérité, froide et crissante, d'un bonheur amputé.

« Je crois que... hum, en fait, ces derniers jours, Chanel m'évite et je ne sais pas trop pourquoi... J'ai peut-être fait quelque chose qu'il ne fallait pas. »

« Coeurs givrés »

Feat' Magnus

Dove A. Tudor

T’étais surprise de recevoir un SMS de la part de Magnus. Tu avais déjà passé pas mal de temps avec lui et Chanel et c’était un mec super chouette selon toi, mais il restait un ami de ta sœur avant tout donc la plupart du temps tu avais de ses nouvelles par ta cadette et non pas directement de sa part. Tu étais intriguée de découvrir ce qui le travaillait assez pour te demander de le rejoindre. Tu t’es donc déplacée rapidement, courant dans les couloirs du château sans te soucier de ceux que tu manquais de pousser au sol dans ta course effrénée.

Tu le vois enfin, au balcon, là où il t’avait donné rendez-vous plus tôt.
Essoufflée, tu lui réponds cependant avec enthousiasme.

« Salut Magnus ! J’ai couru, ça avait l’air plutôt urgent… Va pour les chocolats, mais sois pas débile c’est moi qui offre, ça me ferait davantage plaisir ! »

Tu ris doucement, pas habituée que quelqu’un en dehors de ta famille t’offre de te payer quelque chose. Vous étiez riches et tu n’avais pas d’inconvénient à débourser pour un ami, surtout dans les sucreries. Dans le pire des cas, ça passerait sur ton estomac de gloutonne.
Ses propos te surprennent, t’arrachent un haussement de sourcil. Tu pouvais lire dans ta petite sœur comme dans un livre ouvert, seulement tu ne l’avais pas vue dernièrement ce qui limitait ta lecture pour l’instant. Si ta frangine évitait Magnus, par contre, tu te donnais comme mission d’éclaircir le tout des deux côtés. Le poufsouffle allait devoir t’éclairer sur sa dernière conversation avec ta cadette et tu devras rencontrer cette dernière par après.

« Hmm je t’avoue que je ne l’ai pas vue non plus dernièrement, elle m’en a pas parlé… Mais il s’est passé quoi la dernière fois que vous vous êtes vus? Je pourrais peut-être t’aider comme ça, et promis ce sera notre secret. »

Pressée par l’idée de recevoir ta dose quotidienne de sucre, tu te mets en marche, enjoignant le garçon à te suivre pour que vous puissiez poursuivre la discussion ailleurs que dans Poudlard, là où les murs ont des oreilles. Au moins sur la route, vous seriez tranquilles et l’air frais vous aidera peut-être à y voir plus clair. Chanel n’avait pas pour habitude de repousser les gens, alors si elle ignorait intentionnellement Magnus, c’est que quelque chose se passait entre eux. Et ce quelque chose devait la décourager de confronter la situation.

© Kibara

Il aime. La réponse est évidente, mais il se conforte dans les doutes, le silence, l'innocence de l'enfant. Il aime, mais il feint de s'inquiéter, de chercher des réponses quand la sienne est déjà donnée.
Magnus est inconscient ; ses émotions s'agitent d'elles-mêmes, expriment la vérité derrière ses actes simples. Il ne réalise pas, se contente de la simplicité d'une résolution, qu'importe ce qu'elle donnera. Il veut retourner aux jours d'antan, s'inquiète du changement sans pour autant le repousser.

Il aime ; mais ne veut jamais que retrouver ces temps joyeux. Il aime, sans avoir la prétention de pouvoir l'exprimer. Sans pouvoir la combler, parce qu'il est si imparfait, homme gris, détaché des moindres couleurs.

Magnus se cherche, et il ressent le bonheur, la chance de tomber sur des sourires et tant de sincérité. Magnus se cherche et il se sent si reconnaissant à l'égard de Dove, comme des innombrables silhouettes bienveillantes du passé.
Magnus se cherche ; hoche la tête avec gourmandise, et cesse de s'inquiéter pour sa maigre bourse à présent qu'elle projette de l'inviter. Il n'éprouve pas de honte, quoi qu'un peu de gêne ; son immaturité le libère de ces émotions sans intérêt, et il sautille presque sur place, son skate sous le bras, comme à l'abri des moindres soucis.

Ce sera un secret. Dove a cette manière si simple d'énoncer les choses qui lui semblent compliquées ; c'est peut-être l'âge, ou le fait qu'elle ne soit pas concernée, mais Magnus oublie la complexité de ses émotions, comme si ce n'était qu'un ensemble d'inquiétudes dont elle pouvait le libérer avec quelques mots salvateurs.

« Euh, d'habitude on rigole sur un peu n'importe quoi, mais cette fois... l'ambiance était différente ? C'était... plus intense, je crois... »

Il se plonge dans ces bribes de souvenirs, tout en se concentrant sur sa marche pour éviter l'immersion. Il sent déjà ses joues chauffer, se force à ne pas se laisser aller, à rester maître de lui-même. Parler de tout ça, c'est déjà quelque chose, mais si Magnus a surmonté ça, c'est pour arranger les choses.
Quelque chose ne va pas. Quelle qu'en soit la raison, ces derniers jours se sont mal passés - entre le silence et cette soirée dans le parc où elle évitait son regard, Magnus a tout bonnement refusé de laisser les choses s'éteindre.
Tout ira mieux.
Ce n'est pas une promesse dans le vent, mais la certitude qu'il s'est engagé, au fond de lui, à réaliser. Pré-au-Lard pointe le bout de son nez ; Magnus maintient le rythme, un maigre sourire aux lèvres que ses souvenirs éludent lorsqu'il continue son récit.

« Je l'ai emmenée dans ma cachette, et on a discuté... ah, je sais pas comment dire ! On a passé un bon moment et j'étais heureux et euh je crois que elle aussi, alors pourquoi elle ne veut pas me parler ? »

Il s'agace presque, mais au fond, son cœur est sur le point de fondre.
Craquelé par un doute que sa volonté ne suffit pas à effacer.

Il aime. C'est la raison, autant que la réponse aux problèmes.

« Coeurs givrés »

Feat' Magnus

Dove A. Tudor

Tu crois comprendre. Sous tous ces détours utilisés par Magnus, toutes ses actions informulées, tu crois comprendre enfin une partie du problème. Douce innocence du plus jeune dans laquelle tu t’es reconnue un moment, ton histoire avec Kenneth t’as cependant appris quelque chose : ce que c’est d’aimer. D’aimer quelqu’un d’autre que son frère ou sa sœur, aimer quelqu’un qui ne partage ni ton sang ni tes parents. Les amitiés, c’était une facette de l’amour, mais jamais aussi puissante que ce que ressent un cœur amoureux. Et le jeune Poufsouffle semblait souffrir de ce mal qui pouvait créer les étoiles de bonheur comme les larmes de douleur.

La réelle question après ce constat, après l’avoir écouté, c’était si Chanel partageait ses sentiments. Tu ne voulais pas t’avancer sur ce terrain, formuler de vagues promesses pour apaiser le garçon, trahir ta petite sœur en annonçant un secret bien gardé qui ne te concernait en rien. Si elle était distante, tu pouvais supposer qu’elle s’était attachée à Magnus et qu’elle ne savait trop quoi faire de ces sentiments – tu étais passée par là aussi avant, et cette réaction était semblable à celle que tu avais eue au même âge que ta cadette. Mais tes suppositions n’amèneraient rien de bon si ce n’était pas la vérité absolue, si ce n’était pas ce que Magnus désirait entendre. Tu ne pouvais formuler l’informulé.

« Plus intense… Vous ne vous êtes pas disputés? Si vous étiez heureux tous les deux je ne suis pas certaine de comprendre pourquoi Chanel t’évites. Tu lui as envoyé des SMS ou t’es allée la voir? »

T’es pas certaine d’être claire, mais votre arrivée à Pré-au-Lard t’empêche de creuser davantage la question pour le moment, l’attrait des bonbons étant plus forte que ta capacité de concentration. Tu aimerais pouvoir apporter davantage d’aide au garçon, mais tu sais pertinemment que c’est impossible tant que tu n’aurais pas parlé à Chanel pour comprendre ce qui se passait. La famille avant tout.
Tes pas t’orientent vers Honeyduckes, Magnus à ta suite, et tu tâtes doucement la bourse dans ta poche de jeans. Vous en auriez pour une bonne récolte de sucreries, certainement. Et t’allais en ramener pour ta fratrie, motivée à faire plaisir à tout le monde en cette belle journée.

« On achète les bonbons et on en reparle après, ça te va? J’peux pas me concentrer quand j’suis entourée de bonbons et que j’peux pas en manger. »

Une moue désolée étire tes lèvres alors que tu entres dans l’échoppe. La conversation sérieuse attendra quelques minutes, c’est le temps de faire plaisir à vos ventres avant tout.

© Kibara

Il pense, il pense, il pense. Le cœur extensible, les pensées inamovibles. Magnus songe, malgré les sucreries, malgré son attrait pour la nourriture et son désir de paix. Son esprit le tiraille, son cœur l'affaiblit - et c'est parce qu'il était incapable de se soustraire à sa propre réflexion qu'il a décidé d'aller la voir.
Ses yeux bleus sont insondables, son visage fermé ; il repasse les paroles de Dove dans sa tête, impassible dans ce décor qui ne saurait que le faire sourire. Magnus aimerait profiter, mais il est incapable de remettre les problèmes à plus tard, de se laisser porter par l'inactivité.

Sans être le plus responsable, il n'a jamais supporté de laisser place au silence. Ce n'est pas une question de calme ; mais son cœur n'a jamais pu divaguer loin de cette simplicité qui le rend unique.
Attachant, direct, ne cherchant jamais de détours pour essayer d'atteindre ce bonheur rendu inaccessible. Magnus ne voulait que la joie qui tenait à ses rêves, désormais impossible ; Magnus ne voulait que des sourires, et il cherchait son bonheur ailleurs, trop innocent pour arriver à l'ignorer.

Il la suit jusqu'au magasin, attiré par la douce odeur des friandises et se laisse aller, le temps d'une minute. Son cœur lui pèse, sourire lui tire la mâchoire. Magnus n'est pas malheureux, juste forcé dans cette solitude qu'elle lui faisait oublier, et qu'elle le force maintenant à ressentir.
C'est parce qu'elle est importante qu'il se sent ainsi balader par ses propres sentiments - ses mains se perdent dans ces lots de sucre, et il se balade dans les rayons, attrapant quelques poignées de bonbons divers à la forme parfois inquiétante.

Les mains pleines, il retourna près de Dove avec un maigre sourire, gêné de se laisser inviter. Bien qu'une part de lui apprécie l'offre, cela va sans dire - et Magnus n'attend pas qu'ils soient sortis, une fois la marchandise payée, pour commencer à grignoter sa sucette.
Le goût unique du sucre, le parfum discret du fruit imité - la saveur collante des bonbons qu'il apprécie, qu'importe ce qu'on dit. Magnus oublie, un instant, mais il lui suffit d'y penser un instant pour se perdre dans un soupir qu'il n'arrive même plus à taire.

« Tu as déjà vécu ça, Dove ? On dirait que oui. »

Il tourne ses grands yeux bleus vers elle pour l'observer. Adouci par le goût des friandises, dressé par son péché mignon - il s'est légèrement ressourcé, assez pour ne pas tomber dans la déprime. Au fond, c'était sûrement la bonne décision.
Se confier, extérioriser l'ensemble de ses sentiments - Magnus baigne dans une tristesse profonde d'indécision, et il hoche la tête négativement, incapable de voir plus loin que son état actuel. Pour elle, tout semble normal, mais pour un garçon qui n'a jamais senti son cœur battre si fort, son destin semble s'envoler.

« ...Non. Pas depuis que je l'ai croisée un soir, et... je voyais bien qu'elle m'évitait. J'ai l'impression que tout est en train de changer et... Je- Je ne sais pas quoi faire. Si tout doit redevenir comme avant, ça me conviendrait. Je ne veux pas qu'on se dispute. »

Il exprime, d'une voix enfantine, colérique, détruire par ses pensées.
Au fond de lui, juste un regard, juste un mot lui suffiraient.

« Coeurs givrés »

Feat' Magnus

Dove A. Tudor

Comme si tu connaissais l’établissement par cœur, tu déambules dans les rayons pour récupérer les différents bonbons qui feraient le bonheur de tous et chacun : des éclairs à la rose pour Maybelline (même si ce ne sont pas ceux de Google), des étoiles à la cannelle pour Finley, des patacitrouilles pour Hennessy (comme c’est ton jumeau, tu te permets d’en mettre davantage dans sa part pour le gâter un peu), des dragées surprises au melon d’eau pour Dalmore et une poignée mélangée pour Sephora et des chocogrenouilles pour Chanel et toi-même. Tu arrives ainsi à la caisse avec les bras pleins et dépose ton butin dans un lourd fracas – aussi lourd que des bonbons puissent être. Tu observes le Poufsouffle du coin de l’œil et sors ta bourse pour payer vos achats, un sourire gourmand étirant tes lèvres fines.

Tu enfournes le tout dans ton petit sac muni d’une extension indétectable et t’attaques à une chocogrenouille, dévorant du regard ta friandise préférée. Pourtant, tu as à peine le temps de croquer dans la sucrerie que Magnus te questionne, curieux d’en savoir plus sur ton passé amoureux il semblerait.
Avec ta récente rupture avec Kenneth, duquel tu étais tombée amoureuse à l’âge de Magnus et Chanel, tu ne peux qu’afficher une moue nostalgique. Si la relation s’était terminée sur une bonne note, tu ne pouvais t’empêcher d’éprouver un peu de tristesse en te replongeant dans votre passé de couple.

« À ton âge oui, j’étais amoureuse d’un gars vraiment génial. On a été deux ans ensemble… Ça vient de se terminer en fait, on préférait n’être qu’amis. »

Tu termines ta chocogrenouille lentement, te délectant du sucre qui craque sous ta dent avec la douceur du chocolat, te replongeant dans le début de ta relation avec ton premier amour pour aider le blond du mieux possible. Il vivait l’hésitation, le doute, la crainte de l’amour, l’espoir que rien ne change ou que, du moins, si changement il y avait, il serait positif.
Tu ne sais comment le rassurer, comment lui expliquer qu’il n’y avait qu’une seule façon de savoir enfin ce qui se passait dans la tête de Chanel. Lui en parler, c’était la clé pour résoudre sa solution, mais c’était alors l’angoisse, la peur de se faire rejeter. Et c’était parfois pire que de renoncer à ses sentiments, tu pouvais en témoigner. Il t’avait fallu beaucoup de temps pour accepter tes sentiments pour Kenneth et s’il n’était pas venu te parler des siens tu n’aurais probablement jamais soupçonné que tu avais tes chances avec lui.

« Quelque chose semble s’être brisé ou effrité… Faudra en parler pour voir ce que tu peux faire Magnus, mais… Faut que tu la laisses t’approcher. J’peux essayer de lui parler pour la convaincre d’aller te voir rapidement si tu veux. »

Tu ne pouvais pas faire grand-chose, si ce n’était le réconforter et répondre à ses questions. L’amour contenait des sentiers sinueux propres à chaque relation et tu ne pouvais parler que de ton unique expérience pour l’aider.

© Kibara

Brisé. Effrité. Quelque chose avait disparu de ce bonheur parfaitement ficelé.
Tu ne seras jamais sorcier.
La vérité avait cogné contre ses entrailles vides, sa tête résonnant comme un creux, privé de rêves et des moindres espoirs. Il resta quelques mètres sans rien manger, le goût amer dans sa bouche susceptible de faire tourner le goût délicat des bonbons. La peur de l’échec, malgré tous ses efforts.
Lui, il n’avait jamais rien fait à personne.
Lui, il s’était contenté de vivre, d’espérer de toute son âme.
Magnus, comme un enfant raté, à moitié terminé, privé de couleurs. Il avait tout fait ; et de ses jours de bonté à la déprime chronique, il ne trouvait pas la réponse à cette question interminable qui le rendait si triste et susceptible.

Lui, il s’était contenté d’aimer.
Dove comprenait, en un sens. Magnus ne l’avait pas deviné, mais peut-être qu’inconsciemment, il s’était tourné vers elle pour cette raison-là. Pour lui, elle ne dégageait… qu’une maturité étonnante, la malice de son regard voilée par un sérieux qui s’affirmait parfois. Elle incarnait l’équilibre, et il n’avait vu ça chez personne d’autre.
Dove était jolie, sérieuse, parfaite.
Alors, qu’est-ce qui avait pu tourner aussi mal ?
L’essentiel demeure invisible pour les yeux - Magnus se souvenait d’avoir lu cette vérité quelque part, dans l’un de ses livres moldus, et jamais cette vérité ne lui avait semblé aussi pétillante, comme si elle servait à effacer le mal que ses pensées dessinaient.

« Désolé de te rappeler ça. » s’excusa-t’il à voix basse, trop gêné pour articuler.

Yggdrassil, l’arbre monde. Magnus commençait à comprendre les bases de cette légende qui incarnait l’univers. La vie, comme ce tronc auquel se liaient les moindres branches… tous les atomes s’entrechoquaient, bouleversant l’existence des uns et des autres.
Cette rupture, effritant son cœur.
Et ses mots à lui, bouleversant Dove, lui aussi…
N’avait-elle pas assez souffert ? Avait-il vraiment à la déranger avec tout ça ?
L’arbre monde. Et c’est peut-être pour ça qu’il culpabilisait tant, à chaque action, chaque mot, chaque regard. Lui, éveillant son amour, tandis qu’elle s’efforçait de laisser le sien disparaître.

Lui, le ventre tordu par cette culpabilité enivrante,
Le mal était attirant, n’est-ce pas ?
Magnus le savait, et faisait de son mieux pour ne pas y céder. Il était trop jeune pour étouffer l’espoir dans l’œuf, trop jeune pour accepter de vivre d’une renaissance dépressive. Il devait vivre, loin de tout ça, vivre d’amour et de joie, vivre, vivre, et pas se contenter de survivre. 

« Est-ce que… en grandissant, on devient tous tristes ? Est-ce que c’est ça, être adulte ? »

Voir son innocence, ses rêves brisés.
Voir ses amours décortiqués, compris, rejetés.
Elle lui laissait cette impression, d’une romance envolée à tout jamais…
Magnus, si tu pouvais comprendre.

« C’est vraiment impossible d’être juste heureux sans avoir à y réfléchir ? Je ne veux pas que ce bonheur se brise, c’est ce qu’il m’est arrivé de mieux. Je ne sais pas quoi faire. »

« Coeurs givrés »

Feat' Magnus

Dove A. Tudor

C’est le silence entre vous qui te fait réaliser que tu parles d’amour sans qu’il n’ait jamais prononcé le mot lui-même. Tu t’es tellement reconnue dans sa situation, c’était si évident pour toi qu’il s’agissait d’un écho de ta situation avec Kenneth des années plus tôt que tu ne lui avais pas demandé de précisions. Le bonheur, cette lueur qui brillait dans les prunelles du garçon, tout semblait indiquer l’amour dans son cœur. Cet amour chancelant de celui qui ressent pour la première fois l’émotion destructrice et qui ne sait trop quoi en faire, vers où l’envoyer pour qu’elle se déploie en mille merveilles.

Ton sourire creuse davantage tes joues et tu banalises le sujet pour le rassurer, pour lui montrer qu’il n’a absolument pas causé de tort en rappelant le passé.

« T’inquiète pas, ça fait pas mal. »

T’étais sortie grandie de ta relation achevée, comme une femme nouvelle, toujours plus épanouie.
Pourtant, tu sembles avoir laissé entendre à ton cadet qu’il n’y aurait pas de fin heureuse possible, qu’il serait condamné à vivre dans la tristesse une fois son enfance passée. Tu saisis trop tard la gaffe, l’erreur qui s’est glissée malgré toi dans l’annonce de ta rupture avec ton ancien amoureux. Tu ne pouvais pas le laisser logiquement agoniser dans ses rêves brisés, tu devais au moins tenter de tout rebâtir pour qu’il y demeure l’espoir, l’espoir du bonheur, de la joie, des bons moments passés avec l’être aimé.

Après tout, rien n’était impossible, Chanel était trop indéchiffrable pour que tu puisses affirmer avec certitude ce qui se passait dans sa tête et la raison pour laquelle elle évitait le Poufsouffle. Personne ne pouvait vraiment déchiffrer ta petite sœur… Sauf elle-même. Tu pouvais deviner, émettre une hypothèse, mais la certitude n’appartenait qu’à Chanel, et même pour elle parfois il était difficile de s’accrocher à une réponse stable.

Tu poses ta main sur son épaule, respirant un bon coup pour incarner le rôle de la grande sœur et agir comme Maybelline l’aurait fait dans ta situation. Avec classe, gentillesse et douceur.

« La tristesse c’est pour ceux qui ne veulent pas connaître la joie. Dis-moi, tu rêves Magnus? Tu rêves la nuit et le jour aussi? »

Tu te laisses bercer par les tiens, reconnectant doucement avec ce qui rassurait ton esprit dernièrement : un animal effleuré, un sourire arraché, les bras de ton frère. Cela suffisait pour te projeter là où tu te sentais bien, là où tu te sentais toi-même.

« La vraie question, Magnus, c’est qu’est-ce qu’il te faut pour être heureux? »

Car c'était ça la clé du bonheur.

© Kibara

Il rêve Magnus, il rêve tous les jours. Il rêve de simplicité, de bonheur, des joues colorés des beaux jours. Magnus a l'esprit clair et les pensées dansantes, Magnus a le cœur lourd et l'amour puissant. Il n'est pas un enfant, mais il en porte les traits. Il n'est pas adulte, mais il en porte la rancœur. Il est à la frontière du mal, s'y refusant l'accès.
Il tourne le dos aux mauvais actes, se refusant à les assumer. Magnus est une boule de bienveillance achromate, désirant plus que quiconque rencontrer les couleurs.
Magnus est un salvateur, survivant aux sentiments déchirants - le mal contenu dans les sourires qu'il se sent obligé de porter.

Quelque part, il aimerait presque que ça fasse mal. Il aimerait presque s'attendre au pire pour être prêt à l'affronter, savoir le mal avenant pour se dresser face à son jugement.
Magnus a le regard droit, fièrement levé ; ses iris de ce gris métallique unique qui est aussi doux qu'il vibre de force. Dove l'a-t'elle cerné ? Dans ses yeux, cette tristesse maternelle, cette bienveillance doucereuse. Dans ses mots doux, sa voix délicate, ses gestes rassurants.
Il laisse l'étincelle d'admiration lui colorer les iris, la reconnaissance lui peindre les parois du cœur. Ce moment, comme bien d'autres, semble devenir important.
Il se dit que, quoi qu'il advienne, il n'en oubliera pas la portée.

Il est là, avec elle, dans un froid à peine pesant tant l'ambiance est chaleureuse, les regards partageants l'envie d'un bonheur malicieux. Si tout était si simple, il n'en serait pas rendu là - mais si tout était si simple, il n'aurait pas pu la connaître si bien.
En l'instant, Magnus réalise ; tout le bien qu'elle incarne, tous les efforts qu'elle fait, la patience qu'elle partage.
En l'instant, Magnus se promet : il ne fera jamais de mal à Chanel.
Il se l'était déjà dit, parce que ses sentiments sont réels, parce que son cœur la rend si belle, mais maintenant, plus que jamais, parce qu'il se gonfle d'affection pour Dove, il veut la rassurer, elle aussi.
Ça ne fait peut-être plus mal, mais il aimerait lui faire oublier la douleur passée - lui prouver, par son propre cas, que les choses sont capables de bien finir.

« Je rêve tout le temps ! Et je crois que je ne m'arrêterai jamais. Ça a tendance à en agacer certains, mais ça ne m'arrêtera pas. »

Tout en engloutissant les dernières bouchées de sa sucette, il lui adresse un sourire en coin. Magnus ne voit pas les couleurs, mais en ressent la présence. Magnus est inapte à la magie, mais en ressent la portée.
Le monde peut paraître cruel, mais il est aussi merveilleux par ces possibilités immenses, dans la séquestration d'un impossible devenu ridicule. Au fond, tout ça n'a pas d'importance. Il n'y a jamais que ses plus profonds désirs, et il se moque bien du possible.
Avec un geste lent, Magnus sort une petite boîte cartonnée, enfilée d'un ruban de cadeau pour la tendre à Dove. Une petite boîte de chocolats faits maison - depuis son aventure avec les elfes, Magnus avait un petit accès privilégié aux cuisines.

« Je ne sais pas ce qu'il me faut. Mais j'ai... j'ai vraiment envie de la voir. Alors, euh... »

Il sentit ses joues chauffer légèrement et détourna le regard.
Magnus se sentait mal de partir là-dessus, si soudainement. Mais son cœur frappait contre sa poitrine à mesure de cette brusque réalisation, et chaque instant lui semblait comme étant une perte.
Il voulait la voir - maintenant, là, tout de suite. Et rien ne saurait l'en empêcher.

« C'est pour toi. J'aimerais te rendre la pareille, un de ces jours, mais je vais commencer par te montrer un amour en lequel on peut croire ! »

Si simplement,
Innocemment.

« Coeurs givrés »

Feat' Magnus

Dove A. Tudor

Sa détermination naïve t’arrache un énième sourire, son innocence d’enfant te rappelant clairement la tienne. Tu avais parfois l’impression de remonter le temps de quelques années et de t’observer dans un miroir lorsque tes prunelles détaillaient sa bouille d’ange adorable qui s’étirait avec le charme des jeunes années. Il s’anime par sa détermination à rêver et à poursuivre dans cette direction peu importe l’opinion de ceux qui l’entouraient et c’est à ce moment qu’il te convainc qu’il n’a plus besoin de toi pour savoir où aller. Si le rêve était présent dans sa vie, s’il continuait de s’accrocher à ceux-ci comme à l’étoile polaire qui guiderait ses pas, il était prêt. Magnus n’avait plus besoin que tu prennes le rôle de grande sœur, Dove.

Tu reçois la boîte cadeau d’un haussement de sourcils sincère, surprise que ta présence et tes conseils maladroits aient pu te valoir autant de reconnaissance de la part du jeune homme. Il était venu te voir à la base pour comprendre les agissements de ta cadette et tu n’avais même pas pu lui répondre correctement en ne sachant pas exactement ce que cachait ta sœur. Les bonbons devaient être la seule touche amusante et positive que tu avais pu apporter au Poufsouffle, ça et la motivation d’aller retrouver Chanel au plus vite.
T’étais touchée par une reconnaissance aussi candide et pure de sa part, encore plus lorsqu’il affirme vouloir te montrer un amour inspirant l’espoir.

« Merci beaucoup. »

Il n’y avait pas grand-chose à ajouter, surtout en le voyant aussi pressé de partir. Tu voudrais l’encourager, le pousser à vivre et à rire, mais avait-il réellement besoin de toi pour faire tout ça?
Tu l’avais toi-même constaté Dove, plus maintenant.
Alors tes lèvres creusent tes joues avec fierté, ravie de savoir que ta petite sœur aurait quelqu’un comme lui à ses côtés quand toi tu n’es pas là.

« Prends soin d’elle, Magnus. Je compte sur toi. »

Tu lui donnais ainsi ton approbation de grande sœur de filer voir Chanel au plus vite et de suivre ses envies, parce que s’il suivait ses instincts il réussirait tout ce qu’il entreprendrait. Avec un cœur d’enfant et des rêves astronomiques.

© Kibara