Shiver || Vega Solberg (terminé)

Miroir, beau miroir qui reflète les espoirs et les rêves, parfois même la vérité à ce qu’il paraît. Tu le fixes, malgré les toiles d’araignées qui peuvent effrayer, malgré la poussière de l’endroit qui montre qu’il n’est pas entretenu mais pourtant, le sol est balayé de plusieurs traces de pas qui prouvent que tu n’es pas la seule à venir ici, à te perdre dans ces images que ton cœur réclame. La rentrée est passée depuis quelques jours, les événements récents te font de plus en plus réfléchir Lola, tu as l’impression d’être une autre personne, de devenir un peu plus folle au fur et à mesure que le temps passe. Tu fixes ces silhouettes qui apparaissent, tu as un sourire qui menace de se changer en moue triste en fixant cette scène qui te fait face.

Il y a quelques mois encore, ton reflet n’aurait pas changé. Mais maintenant, il te montre autre chose, d’autres silhouettes, d’autres rires, d’autres choses que tu souhaites au plus profond de toi. On dit que des gens sont morts à force de regarder ce miroir et tu peux comprendre. Oh oui Lola, tu aimerais regarder ce que tu vois pendant encore tellement longtemps que tu en oublierais ta propre existence. Ta main glisse vers la surface glacée du miroir pour la toucher du bout des doigts, tu effleures cette image de ton père disparue qui te sourit aux côtés de Borea qui rigole doucement. Ils semblent vivre et être heureux, mais tu sais que ce ne sont que des illusions Lola et que rien au monde ne les fera revenir.

Fragile Lola, avec ce qu’il s’est passé et ce que tu as pu voir, tu es perdue. Tu recherches des réponses sans pouvoir les trouver, tu ne sais pas ce qui a bien pu se passer pour que tu deviennes ainsi, à voir et entendre des choses que personnes d’autres ne peut percevoir, même Vega et ses sens extraordinaire n’a pas entendue ou vu ce qui a bien pu se passer près du Lac Noir cette nuit-là.  Il n’était pas non plus dans son état normal, mais… Tu n’en sais pas plus. Juste que tu as des visions capricieuses qui sortent de nulle part. Tu ne consommes pourtant pas de drogue… Tu soupires, tu recules et les images de tes proches disparaissent alors que tu entends la porte grincer. Tu te tournes, tu fixes alors le jeune homme qui apparaît dans l’encadrure de la porte et pendant un court instant, tu le regardes sans rien dire. Puis tu prends la parole, sur un ton moins joyeux que tu ne l’aurais voulu.


« Vega… Tu vas bien ? »

Tu souris, tu essais de cacher cette mélancolie qui t’a tenue le cœur pendant un moment et qui doit maintenant laisser sa place à quelque chose de plus heureux. Car Vega n’a pas disparue lui et sa présence te fait toujours du bien, il arrive à te faire oublier tes plus grandes peines l’espace d’une étreinte et tes sentiments à son égard ne font que grandir un peu plus, rendant ta vie plus belle en sa compagnie et surtout, plus facile à traverser.

Sa réponse est floue, il en pose une autre sans pour autant donner son état actuel, mental ou physique et ça te fait froncer les sourcils Lola, tu n’aimes pas quand il n’exprime pas clairement ses pensées, ses envies, ses besoins, ou même simplement s’il n’arrive pas à poser des mots sur ce qu’il est en ce moment. Bien ou mal, pensif, ailleurs, triste, en colère, assoiffé… Ce dernier mot te fait tiquer, ça te fait toi-même revenir quelques mois en arrière où il t’a proposé d’être son calice, tu avances encore de quelques semaines après, durant le bal où il t’a promis qu’il allait passer le pacte le soir même avant de briser ses paroles suite à la nouvelle de son mariage arrangé avec Hazel. Ce souvenir te pince le cœur, mais tu ne montres rien.


« J’avais besoin de… me retrouver en quelque sorte. »

D’être sûre que tu es bien toi, toute ta tête et tous tes espoirs, tes rêves et surtout, la tristesse qui les accompagnait. Tu le laisses s’approcher pour qu’il puisse ainsi laisser ses doigts s’emmêler dans tes mèches blondes et sa phrase te laisse interrogative. Tu le fixes en essayant de comprendre, tu plantes tes prunelles claires dans les siennes, plus foncés au vu de l’obscurité de la pièce.


« Qu’avais-tu à régler Vega ? … C’est en rapport avec ta famille ? »

Et surtout il était temps de quoi au juste ? Il t’échappe, tu crois comprendre qu’il parle peut-être justement du pacte, peut-être est-ce autre chose ? Tu ne veux pas t’avancer ou bien le bousculer, alors tu restes sur tes questions en attente de ses réponses, tu oses lever ta main pour la glisser sur le dessus de la sienne qui reste dans ta crinière dorée, geste tendre accompagné du sourire désolée sur le fait que tu insistes, tu sais qu’il n’aime pas trop se dévoiler et la dernière chose que tu veux faire, c’est bien le forcer.

Il en parle justement, de sa fiancée. Et sans que tu puisses le contrôler, ton regard s’assombrit. Jalouse Lola, mais surtout effrayée de le perdre, tu n’aimes pas cette idée qu’il puisse être avec quelqu’un d’autre. Que ce qu’il te reste disparaisse pour te laisser seule. C’est peut-être égoïste, mais il ne te restait plus que lui, cet être si cher à tes yeux. Il se rattrape dans ses propos en précisant qu’il n’est pas attiré par cette fille de la même façon, mais il reste attiré par elle non ? Tu lâches un petit soupir mais tu n’en tiens pas compte, tu n’as pas à te faire d’idée Lola, n’est-ce pas ? Alors tu te contentes de rester accrochée à son regard pour qu’il comprenne que tu prends conscience de la situation.

Et alors, tu le vois s’abaisser pour se mettre à genoux, son sourire étrange aux lèvres pour te faire alors une demande des plus étranges. Enfin, pas si bizarre que ça et tu rougis. Tu ouvres la bouche mais aucun son n’en sort au début, tu ne fais que le fixer lui pour ensuite détourner les yeux vers sa bague, ce fameux bijou de vampire qui participait à ce pacte, indispensable pour eux. Tu n’as pas peur Lola, tu l’as déjà clamée plusieurs fois même. Alors tu glisses ta main dans la sienne en souriant d’un air serein, prête à tout affronter pour être avec lui.


« Arcturus Vega Cassidy Solberg Blackwell, j’accepte de faire le pacte avec vous. »

Tu le fixes, prête à passer à l’étape suivante. Rien ne t’arrêtera, il est impossible de reculer maintenant.

Il te fait reculer contre le mur, tu te laisses faire en sentant l’atmosphère changer petit à petit pour devenir plus intime et pourtant, plus sérieux. Tu frémis quand tu sens son doigt parcourir ton cou, puis ses lèvres se poser sur ton épiderme. Un frisson plus fort encore t’envahit quand il plante ses crocs pour que ton sang coule, une faible douleur se répand mais tu la contiens facilement car tu es détendue Lola, tu n’es pas effrayée par Vega car tu as une foi inébranlable pour lui. Et tu sais qu’il ne te fera jamais de mal. Inconscience ? Non, c’est autre chose, ça fait battre ton cœur un peu plus fort quand il est là, ça te fait oublier qu’il est à moitié vampire et qu’il peut te détruire quand il le souhaite. Mais il ne le fera jamais, n’est-ce pas ?

Son baiser est sanglant et en grimaçant légèrement quand tu dois avaler ton hémoglobine, ce goût métallique n’est pas appréciable mais il est nécessaire pour passer cette étape et quand finalement il s’écarte pour te montrer sa bague, tu sais que tu dois finir de sceller le pacte en embrassant cette pierre surnaturelle qui vous liera ensuite pour une durée indéterminée. Il tiendra votre avenir entre ses mains et tu déposes alors un baiser sur le rubis étincelant, te donnant alors corps et âme à cet être que tu n’appréciais que trop. Démesurément même.


« C’est… fini ? Le pacte est fait ? »

Question stupide, mais tu voulais t’en assurer. Tu sens alors une brûlure sur l’un de tes doigts et tu le lève alors pour voir une bague similaire à celle du brun apparaître avec la même pierre, démontrant alors ton appartenance à son égard. Cela répondait d’ailleurs à ta question et tu as un drôle d’air sur le visage, avant de replonger ton regard dans celui de Vega.


« … Cela officialise un peu la chose. Que je sois à toi. »

Et qu’il soit tien.

Il a l’air plus taquin dans son ton quand il te répond et tu rigoles légèrement, plus détendue que tu ne le devrais. Tu viens de passer un pacte qui donne presque ton corps à lui et pourtant, tu n’es nullement effrayée. Au contraire, ça te ravie que ce soit toi et aucune autre personne. Il te coince de nouveau contre le mur et ton regard se fait plus… désireux ? Plus tendre mais en même temps plus… passionnée. Et quand il t’embrasse le cou, tu deviens plus fébrile, cédant aux frissons de ses lèvres sur ta peau en mordant les tiennes sous l’envie grimpante qu’il te fait naître.


«  … Je ne demande pas un Roméo, je te veux juste toi. »

Et qu’importe qu’il ne soit pas le garçon parfait, toi cela te va très bien ainsi. Tu ne voulais rien d’autre que Vega, Acturus ou Cassidy, qu’importe son nom finalement. Sa personne était la seule qui te faisait tourner la tête, la seule dont tu désirais ardemment. Tes mains glissent dans son dos, une restant à caresser sa colonne vertébrale tandis que l’autre remontait pour venir s’amuser avec ses cheveux sombres. Il est étrangement tactile, mais tu ne vas pas t’en plaindre Lola, après tout, vous vous appartenez maintenant et rien d’autre ne compte.

Tu te laisses aller Lola, tu relèves son visage pour le contempler quelques secondes avant de doucement l’embrasser malgré le goût amer de ton sang encore présent, tu lui voles ce baiser dans cet élan de désir qui t’envahit, souhaitant qu’il ne s’arrête juste jamais. Fragile Lola, tu ne veux rien de plus que d’être avec lui, pour ce moment et pour tous les autres.


« Je t’aime Vega. »

Tout simplement, tu le regardes, tu lui fais un sourire sincère, ne craignant plus qu’il puisse te repousser parce que tu as pris ton courage à deux mains pour le lui dire. Non, la peur a disparue, il n’y a que tes sentiments à son égard et rien d’autre. Plus rien d’autre.

Sa réaction te laisse un peu perplexe, tu le regardes sans pour autant te démunir de ton sourire alors qu’il recule un peu, sous le choc. Il n’a peut-être pas l’habitude qu’on lui exprime son affection, ou bien tu étais peut-être la première à lui dire ça sans que ça puisse le laisser indifférent. Tu te demandes alors s’il ne va pas se refermer comme une coquille, s’il ne va pas laisser la place à Arcturus sous le coup de l’émotion, juste parce que ces derniers pourraient lui échapper.

Sa réponse est pourtant loin d’être polie et froide, non elle te fait frissonner, elle fait tambouriner ton cœur dans ta poitrine alors que tu sens tes joues s’empourprer et sans plus attendre, tu t’approches de nouveau de lui pour l’avoir contre toi. Tu lui offres une étreinte tendre et chaleureuse, heureuse d’être avec lui, d’avoir passée cette étape où vos sentiments s’expriment.


« Merci… »

Merci d’être là, de te soutenir, de t’aimer. Tu ne t’es jamais sentie plus en sécurité que maintenant, dans ses bras, sentant son souffle proche de tes oreilles même s’il était beaucoup plus grand. On peut dire que c’est un moment plutôt niais où vous appréciez simplement la présence de l’autre, mais ce genre d’instant tellement rare est l’occasion où il faut justement en profiter un peu avant qu’une mauvaise nouvelle n’arrive pour tout réduire à néant. Tu recules un peu. D’ailleurs c’est le moment idéal pour parler d’un sujet plutôt étrange, n’est-ce pas Lola ?


« … J’ai quelque chose à te dire. Ça va paraître un peu étrange alors… J’espère que tu ne me prendras pas pour une folle. »

Il fallait que tu lui en parles tôt ou tard Lola, parce que ça te dépassait. Beaucoup. Ces visions qui t’accablent depuis un certain temps, ces choses que tu as vue et entendue durant cette nuit où vous avez perdus le contrôle. Tu relèves la tête pour le fixer, à la fois un peu effrayée par son jugement mais en même temps on ne peut plus sérieuse.

Ses lèvres sur ton cou te déconcentrent un instant, ce contact simple a tendance à te faire facilement penser à autre chose. Cependant ce sujet est sérieux Lola, tu ne peux pas éviter d’en parler plus longtemps car oui, avant tu avais trop peur pour aborder le sujet. Maintenant, tu sais qu’il ne te jugera pas, qu’il ne te prendra pas pour une aliénée qui a besoin d’aller chez un médicomage pour se faire soigner la tête.


« Eh bien… Depuis quelques temps j’ai… »

Tu recules un peu pour mieux capter son regard, pour lui faire comprendre que tu ne rigolais nullement, que tout ce que tu allais dire était bien vrai. Et alors que tu fixes ses prunelles, tu crois voir un éclat écarlate à travers l’une d’entre elle. Un court instant, tu te remémores ses yeux quand cette couleur les envahit, d’un rouge sang hypnotisant du à son côté vampire, tu l’avais déjà vu plusieurs fois ainsi sans en avoir peur.

Mais tes yeux Lola, se font soudainement plus lointain. Ton esprit est parti explorer des choses au-delà de ton corps sans vraiment les comprendre. Un brouillard engourdit tes sens, tous sauf la vision. Tu vois les choses nettement, comme si tu regardais une télévision qui zappait sans que tu puisses le contrôler. Sauf qu’il n’y a pas d’écran et que les images ne sont pas accompagnées de son. Les yeux rouges de Vega réapparaissent, tu crois que ce sont les siens mais l’image se brouille et une autre paire d’œil apparaît, comme pour corriger l’image précédente. Toujours de la même couleur, ils sont différents mais tu ne les reconnais pas et elle laisse place à une autre vision. Une personne aux cheveux blonds qui te tourne le dos, tu sais pertinemment à qui appartient cette crinière dorée mais tu n’as pas le temps de réagir, elle disparaît dans une fumée sanguine et ton cri reste étouffé. Boréa !

Tu clignes des yeux, revenue à la réalité, tu regardes Vega en face de toi comme si tu venais de voir un fantôme. Ce qui n’est pas loin de la réalité.


« Boréa… Je. Je viens de voir Boréa. »

Tu ne comprends pas vraiment ce que tu viens de voir, n’accordant pas d’importance à la première partie de tes visions mais à la deuxième. Elle disparaît si subitement… Et tout ce rouge présent. Dans les yeux, dans la fumée… Tu secoues la tête.


« Je vois des choses… Je comprends pas Vega. Et c’était pire durant cette nuit-là. Est-ce que… Est-ce que j’ai un problème ? »

Ou bien est-ce que quelque chose s’est réveillée en toi pour te mettre en garde contre l’avenir qui se profile devant toi ?

Un état de choc ? Tu fronces les sourcils, non ça n’était pas que ça, tu en étais persuadée. Tu secoues la tête en reculant, n’acceptant pas son explication. Non, ce n’était pas que ça, sinon tu n’aurais pas eu cette vision avant la mort de Borea.


« Non Vega, ce n’est pas ça. Je suis sûre que c’est autre chose, j’ai déjà eu une vision… Avant qu’elle ne parte. Ce n’est pas le choc. »

Non, tu te souviens encore de cette première fois où tu tenais la baguette de ta meilleure amie, où tu entendais ces murmures souffler ce qui allait arriver avant même que les vacances ne commencent. Tu regardes tes mains comme si la réponse était écrite dans les lignes de ces dernières, mais rien ne te vient. Inconsciente du pouvoir qui s’éveille lentement en toi, tu sais pourtant que ce n’est pas un hasard.


« Et durant cette nuit à la rentrée… Toutes les personnes ayant des capacités hors normes ou n’étant pas entièrement humaine ont vu leur… pouvoirs devenir hors de contrôle. Si ce n’est qu’un choc comme tu le dis Vega, pourquoi je me suis mise à voir et entendre des choses que même toi tu ne percevais pas ? »

Tonalité sérieuse, tu n’es pas folle Lola. Non, ce n’est pas ton cerveau qui part en vrille, la seule raison qui te fait penser ainsi est ce que tu as vue avant les vacances. La timeline est importante, elle est apparue bien avant que tout cela n’arrive.


« Quelque chose est en train de m’arriver… Crois-moi. »

Sa confiance est primordiale pour toi, tu as besoin de savoir qu’il sera là, toujours là. Qu’il a autant de foi en toi que tu n’as de foi en lui. Tes prunelles cherchent son approbation, cette lueur qui montre qu’il ne doute plus, qu’il t’aidera même à trouver ce que c’est. Qu’il ne t’abandonnera même si tes paroles peuvent s’avérer être une folie.