❝ can you feel it | Pv. Isaac (terminé)

Tu ne sais plus vraiment dans quelle classe tu es et quel cours tu révises. Tu étais tellement fatiguée ce jour là que tu avais rangé le retourner de temps dans ton sac, le plus loin possible de toi pour travailler à tête reposée. Ce n'était pas la charge de devoirs ou de travail qui t'épuisait, mais les journées qui s'éternisaient, les heures que tu vivais en double, en triple. Et cette impression de ne pas assez dormir, de trop vivre pour ne plus ressentir.

Tu lâches ton stylo sur ton cahier et tu te mets à bailler. Tu regardes l'heure, bientôt 19h, bientôt le repas. Ça tombe bien, tu avais fin depuis déjà deux bonnes heures. Alors que tu rangeais tes affaires, tu entends des bruits dans le couloir, comme si on courrait. Agacée par le vacarme et convaincue que des premières années s'amusaient à défier les règles, tu te lèves et ouvre la porte pour crier.

— « ON NE COURS PAS DANS LES COULoiiirs... »

Mais ta voix s'éteint alors que tu venais de hurler dans les oreilles d'Andersen, qui se trouvaient sur le pas de la porte. Depuis combien de temps tu ne t'étais pas retrouvé seule avec lui ? Très longtemps. Et pas trop. C'était volontaire. Vous n'aviez échangé aucun mots même pendant la polémique du vaccin et du referendum. Cet homme ne se serait pas empêché de donner son avis, et dieu sait que tu souhaitais presque sa mort quand il le faisait.
Son venin depuis trop longtemps se répandait.
Dans tes veines, et encore à sa vue elles se glaçaient.

— « An-Andersen. »

Tu recules et instinctivement tu le laisses entrer, vu que tes affaires étaient encore à ta place, tu pouvais pas te barrer en courant et les abandonner. Surtout avec ton retourneur de temps planqué au fond du sac.

— « Vous n'êtes pas au repas ? »

Sois poli, surtout ne t'énerve pas.
Sois maligne et ne le provoque pas.
Même si tu voudrais lui hurler la haine et la colère qu'il te faisait ressentir juste avec son regard méprisant, avec ses yeux intrusifs et son sourire médisant.
Dégage. Va t-en.

— « Vous allez avoir faim après. C'est pas bien de sauter le diner du soir. »

Et toi c'est pas bien de sauter les heures, il est minuit dans ta tête et tu rêves en plein cauchemar.

Il est infâme. Il te donne envie de vomir. Tu voudrais lui jeter tes affaires à la gueule mais tu lui as déjà jeté tes stylos une fois et ça s'est mal passé.
Il a déjà été violent et tu ne voudrais pas que tout ça se remette à recommencer.
Tu plisses les yeux, le suivant comme un animal sauvage du regard, prête à bondir. Mais sans jamais bouger.
Est-ce que tu avais peur ? Tu jugerais sur ton âme que non mais peut-être que oui, au fond.

— « Non, vous avez pas l'air de courir. Même si j'aimerai bien. Et dans l'autre direction. »

Tu peux pas t'empêcher d'être insolente. Vous vous détestez, certes, mais il te poussait à bout. Et il allait chercher la fille violente, le tonnerre qui grondait en toi. Il voulait se prendre la foudre, il se la prendra.
Car tu n'es plus cette adolescente qui se faisait marcher dessus, tu écraseras leur monde s'il le fallait et tu brûlerais tout.
Tout sur ton passage.

Mais face à lui, tu n'avais pas de putain de répartie. Ça s'arrêtait dans l'agressivité mais tu ne trouvais pas aussi facilement les mots.

— « Oui, comme vous le voyez. Et j'allais tout remballer. Je vous laisse la place? Peut-être que vous voulez étudier les sorciers ou donner un cours qui sait ? »

Mais ferme ta gueule Andy. Prend tes affaires et barre toi. Cours.
Tu ramasses ton sac avec lenteur sans le regarder, une goutte de sueur perlant lentement le long de ton front et tu passes à côté de lui en serrant les dents concernant sa remarque désobligeante. Abandonner ? Pas aussi prêt du but.

— « Vos remarques ne changeront rien. »

Si ce n'est creuser la douleur en silence.
Ça change tout et il le sait.
Tu le hais.

Il reste. Il reste parce qu'il s'amuse. Pourquoi se priverait-il d'un plaisir malsain alors que toi, tu bouillonnes de râles assassins.
Il aurait été d'une beauté éblouissante s'il avait été un homme bon. Mais il ne sait que cracher sur tout ce que tu représentes et il te donne la nausée. Tes poings se serrent alors qu'il te barre la route. Que cherchait-il encore à trouver après toutes ces années ? Il ouvre ses bras et tu finis par reculer, encore, jusqu'à heurter une chaise derrière toi dans un vacarme étouffé par son aura.

— « Rien à ... rattraper. »

Ta gorge est sèche, ton coeur bat vite et ta tempe aussi.

— « Et c'est Ollivander pour vous, ça a toujours été Ollivander. »

Quelle était leur manie à tous, de pouvoir croire avoir le droit de te nommer par tes prénoms ? Le respect se perdait et l'appréhension grimpait. Tu ne voulais pas qu'il sache, quoi que ce soit pour le don qui subsistait en toi. Tu ne voulais pas que ça dérape et que tu l'envoies se bouffer le mur. Self-control Andy. Barre toi.

— « Ça vous ferait trop plaisir que je tienne pas hein ? Pour l'instant, ça va. Je vous remercie de vous préoccuper de ma santé. »

Tu serres encore une fois les dents à sa dernière remarque, te retenant de lui envoyer tes cours dans la figure (mais non c'était bien trop précieux).

— « Au moins je fais quelque chose de ma vie, j'avance, j'essaie. Qu'est-ce vous faites vous déjà ? Ah oui, deux ans de prison et professeur raté. »

Tu étais allez trop loin. Démesurément. Mais ces mots avaient brulé tes lèvres trop longtemps.

Il tapait là ou ça faisait mal. Il savait parfaitement ou appuyer pour te détruire, pour anéantir tout l'égo et l'estime de toi que tu avais accumulé depuis des années. Il était difficile d'être quelqu'un dans cette école, et même si ton nom de famille t'avait aidé, il t'avait également desservi. Les moqueries, les insultes, l'humiliation de porter cet uniforme gris. Tu es acceptée à Poudlard Andy ! Mais pas totalement. On te rappelle sans cesse que tu te bats pour du vent, que ta romance avec Felix est intéressée, pour le pouvoir, l'attention et l'argent.

Andersen mentionne Aileen et tu détournes le regard, sourcils froncés et lèvres pincées. Evidemment, il remet Miss Scamander sur le tapis. Comment échapper à un argument comme celui ci ? C'est elle qui est devenu ton épouvantard aujourd'hui, et la décevoir ne fais pas parti de ton pari.

— « Vous ne dites que des mots absurdes pour me déstabiliser. Si vous pensez avoir tant raison, vous avez déjà gagné. Alors pourquoi continuer ? »

Ta voix est faible. Il s'assoit devant toi et tu ne peux t'empêcher de le regarder dans les yeux, de chercher au plus profond de lui peut-être quelque chose à quoi te raccrocher. D'humain derrière le rocher.

Et la suite t'effondre. Pourtant il n'avait pas le pouvoir de lire dans les pensées, seulement de protéger les siennes. Alors comment pouvait-il deviner tes peurs ? Une larme discrète coule sur ta joue, que tu t'empresses d'essuyer comme si ce n'était rien, comme si tu étais loin de t'effondrer, pour demander d'un ton cassé.

— « Pourquoi me détestez-vous encore après toutes ces années ? Je ne vous ai rien fait. Vous êtes odieux comme si je salissais votre vie alors que j'ai toujours fait pour éviter votre cadre. »

Mensonge. Tu les brûleras tous Andy. Lui y compris.

Il était le démon. Jamais tu n'avais pu entrevoir autant de méchanceté en un être humain. Lui et Scamander, tu les détestais du plus profond de ton âme. Mais ils ne comprenaient toujours pas qu'ils te rendaient plus forte... du moins c'est ce que tu continuais d'espérer croire. Car peu à peu, le jeu des vérités se montre de plus en plus rude, de plus en plus dur à avaler, à assumer, à encaisser.

Tes yeux se ferment un instant, tu ne veux plus le regarder. Il te dégoute en même temps qu'il te fait mal. Des mois ou tu l'as esquivé qu'il s'amuse à rattraper. Mais le colère continue de monter et dans ton coeur commence à gronder.
Comme le tonnerre tu le foudroieras d'un coup sec, marchera sur son cadavre et t'en ira.

— « Ne me regardez pas, alors. »

Tes paupières se rouvrent et il s'était levé de sa chaise. Tournant autour de toi comme un vautour, le moment parfait pour s'enfuir et retourner dans la grande salle. Harry Sharl et Joy vont se demander ce que tu fous.
Mais tes jambes sont paralysées. Par la peur et par le péché. Car au fond de toi, tu voudrais voir jusqu'ou il pouvait aller, et le défier pour le faire tomber.
Il chope ton visage, et tu poses tes mains sur le sien pour le repousser dans un sursaut, observant un instant son patronus comme hypnotisée par la lumière.
Quel enfoiré.

— « Les amulettes deviendront de plus en plus performantes !! »

Tu t'étais levé d'un coup, sous la rage et l'impulsion. Et l'organe s'affole à battre de plus en plus vite. Le cardio tu le maitrises plus, Andersen tu le méprises encore plus.
Tu te souviens de la première fois ou c'est arrivé, en plein munera t'avais envoyé voler Yannis Damon en arrière. Il doit savoir que s'il continuait ça finirait par lui arriver. D'un mouvement de bras, tu lui envoies toute la haine que tu as accumulé, dans un champ de force qui le propulse contre le plancher. Ce n'était pas aussi violent que tu aurais secrètement aimé, mais il ne fallait pas le sous-estimer. Un sorcier de sa puissance pouvait facilement l'encaisser, cette fois ci ça avait peut-être marché mais l'effet de surprise allait difficilement le surprendre la prochaine fois.

— « ET NE ME TOUCHEZ PAS ! »

Expulso.
C'était comme une petite bombe qui avait explosé près de ton ventre, te propulsant sur un amas de chaises et de tables. La chute est rude, car les coins font des bleus. Un peu sonnée, tu te redresses difficilement sur tes deux jambes, pas très stable. T'as mal aux genoux. En fait, t'as mal partout.

Tu relèves les yeux dans le vide vers lui, pas du tout prête à riposter. Tu passes ton bras pour essuyer ta bouche, levant instinctivement les poings comme Persephone Blackwell t'avait appris l'année dernière. Bat toi, Isaac Andersen. Avec tes mains.

— « Aaah... ! »

Mais ta jambe se soulève et t'entraine comme si elle était accrochée à une corde invisible. Tu l'as gardé. Comme si c'était une tare, comme si c'était une honte. Mais tu n'avais même plus la force d'être fière, d'être agressive et indestructible. Le bouclier était capricieux et ta magie perdait peu à peu confiance en elle. Ses mots parfaitement choisis, même sous la colère et la haine, transperçaient ta chair pour venir carboniser l'essence même de ta dignité.

— « Faites moi descendre... »

Essoufflée et la tête à l'envers pas facile de respirer correctement. Ni même de s'exprimer. Quel sortilège barbare que celui-ci, et quand il lâche, le sol a un goût amer. Toujours sonnée, même pas le temps de reprendre totalement tes esprits que tu sens émaner une douce chaleur t'apaiser. Mais sans pour autant te rassurer. Tu comprends ses mots, chacune de ses intentions. Tu es juste dans l'incapacité émotionnelle de réagir. Tes mouvements sont doux et ralentis, alors que tes bras se tendent pour atteindre son visage.

— « Non.. »

Pas ça, tu ne voulais pas qu'on te prenne ça. Cette magie, personnelle et particulière, était le seul dédommagement à ton calvaire, à cette vie de frustration et de misère. Et dans son égoïsme, il osait vouloir punir le tien. Tes yeux s'embrument, de larmes et d'amertume, alors que tes jambes tremblent.
Au mot sang, tu tressailles. Comment douter que ses connaissances en occultisme ne pourraient pas trouver réponses à sa volonté ?

— « Felix.. »

Le seul prénom qui encore résonnait.

La douleur a l'effet d'un électrochoc.
Qui te maintenait en vie alors que tu rampais lâchement vers la mort. Que cela cesse, que toute la souffrance disparaisse dans le vent.
Tu aurais voulu le tuer en cet instant, l'assassiner de tes propres mains. Le réduire à néant pour qu'il ne puisse plus jamais te faire du mal. Qu'il ne puisse plus jamais t'adresser la parole. Qu'il cesse d'exister, dans ta vie ou dans tes pensées.

Il était devenu fou, sûrement insensé. Qu'avais-tu seulement fait pour mériter un tel traitement, pour recevoir ce châtiment ?
Ses doigts dans tes cheveux te donnent la nausée, tu veux recouvrer le pouvoir de résister. Ne pas t'offrir à lui dans cette faiblesse qui ne t'a jamais caractérisé.
Mais ses mots font office d'un crucifix, qui te cloue au sol dans la douleur et la honte.

— « Ne parlez pas de lui comme s'il vous le connaissiez... »

Mais il n'est pas là non plus pour te regarder, te protéger. Tu le savais Andy, Felix finirait par s'éloigner lui aussi. Si ce n'est pas Ramsay Gaunt qui vous séparerait ce serait l'univers tout entier.
Tes orbites s'écarquillent et tu te mets à crier, poussant des hurlement aigus rythmés par des convulsions sursautées.
Quelque chose s'enfonçait dans ta peau sans que tu ne puisses identifier la source exacte de ta douleur.
Et si la terre est sombre, et si la pluie te noie, raconte nous qu'on puisse trembler ensemble.

A sa question ultime tu lèves difficilement le bras gauche, celui ou était encore tatoué "01", que tu arborais comme une fierté, comme une survivante. Pourquoi devrais-tu dissimuler tes cicatrices ? Tu avais survécu, et ça en était la preuve.
Tu survivrais encore, à cette prochaine épreuve. Et dans un sourire faible, tu lui adresses la provocation suivante.

— « Même dans le couloir de la Mort, je resterai toujours la première. »

Dans un gémissement, de douleur, tu enchaines péniblement.

— « Qu'est-ce que vous cherchez à faire ? On ne modifie pas un gêne aussi facilement... espèce d'idiot... »

Tu prends la dernière force que tu puises au fond de ton âme pour lui cracher à la figure, laissant retomber ta tête contre le sol, t'abandonnant à ton injuste punition, succombant à sa rédemption.
Dans des hurlements murmurés.
Et si le jour ne vient pas, raconte nous qu'on puisse crier tout bas.

— « Et maintenant, que dois-je dire ou faire pour que vous arrêtiez ? »

Les larmes de honte que tu as versé, il faut maintenant les oublier.

La première à échouer.
Mais loin d'être la dernière.
Tu l'énerves et il sait que tu sais. Tu le sens au plus profond de tes veines qui bouillonnent sous la douleur. Le sang s'échappe mais tu attrapes ton courage au passage. Lui ne doit pas s'enfuir.

Il admet savoir, comment cela fonctionne. Tu aurais été impressionnée dans d'autres circonstances, mais la dernière entaille qu'il dessine sur ton bras aura sûrement du mal à cicatriser. Etait-ce votre destin à toi et Felix, de devoir endurer en silence ? Les amants maudits, au diable cette appellation, vous étiez des martyrs dans votre ascension.

La sentence tombe, il enlève des points à ta maison. Sentence douloureuse pour quelqu'un comme toi, tu serres les dents. Ce n'était rien comparé à cette torture physique qui n'en finissait pas. Et aux moments ou ces mots te viennent à l'esprit, il met fin au supplice. Il annonce ta liberté et tu n'as plus la force de te lever.

Toujours allongée au sol, fixant le plafond en sanglotant, tu sens ses doigts dessiner quelque chose sur ta joue. Dans une râle de dégout, tu roules pour te mettre en boule, et effacer avec tes mains, sans arrêter de pleurer. Il range pour toi tes affaires, trop d'honneur. Quel bon coeur.

— « Je peux y aller. Toute seule. »

Et qu'est-ce que tu diras ?

— « Je me suis écorché. »

Tu attrapes ton sac pour le mettre sur ton épaule, lui accordant encore un regard noir ampli de colère.
Mais aucun mot ne s'ajoute, tu veux juste partir le plus vite possible avant qu'il ne change d'avis. Et tu remercies le ciel de ne l'avoir jamais eu professeur au vu de ta condition. Mais peut-être que tout ceci serait très différent.

Tu claques la porte derrière toi, courant jusqu'aux toilettes afin de tout dissimuler pour le dîner. Hors de question de te plaindre de quoi que ce soit aux autres. Quoique ...
Tu sors ton retourneur de temps, et au risque d'être encore plus fatiguée, tu remontes d'une heure pour aller au repas. Et quand tu te rejoins toi même, tu te souris et la honte et la douleur des entailles reviennent.