s'il est con ? sûrement, mais ça lui fait du mal de l'avouer. réfléchir - ah qu'il est facile de dire cela quand la protection est apportée ! c'est facile de dire cela quand la tête est tout contre le sein d'une mère conciliante. c'est facile de ne pas considérer la violence sentimentale de voir un être proche immobilisé quand la douceur est au bord des doigts, qu'il suffit de les tendre pour avoir une étreinte et tout oublier.
putain qu'est-ce qu'il maudit le monde. jules reste immobile, stupéfié par la propre force qu'il a trouvé pour utiliser le sort. il n'a pas tremblé. il ne tremble pas. il ne baisse pas sa baguette, les sourcils toujours froncés par une haine fourmillante. ça grouille dans son corps - dans son coeur. ses mots sont figés en une photographie blanche, une photographie vierge de méchancetés parce qu'il ne sait soudainement plus parler en entendant, en devinant - c'est vrai ça, le poids du futur vient s'ajouter à celui de l'honneur. c'est un homme mort s'il n'est pas loyal. c'est un homme mort sans lendemain. il ne bouge toujours pas. sa poitrine s'élève anormalement fort, et il enverrait bien tout valser - qu'est-ce qui le retient d'en ajouter ? de viser à nouveau ethan ou de faire danser contre le mur dorothy - qu'est-ce qui l'empêche ? dans la recherche d'une satisfaction vaine, il aimerait une revanche - parce que ni lui ni payne ne sont demeurés.
il y en a assez de ce mépris acquis parce qu'ils sont eux. c'est seulement à la voix de son ami qu'il se décide à se décaler, sans lâcher la baguette. il les laisse passer avec son regard dégoulinant de rancune, sans un mot, la gorge serrée. une fois qu'ils sont loin il se précipite à côté de payne pour retirer de mouvements secs et nerveux les cordes, sans jamais ne regarder son visage. jules qui a d'habitude la parlote a un silence navrant ancré dans le gosier. jules a, à la lisère de ses cils, quelques larmes de rage retenues, une fureur nerveuse qui le tue à petits feux. après un peu d'acharnement toujours silencieux, la baguette à côté de lui, il finit par réussir à dénouer les liens traîtres.
jules ne dit rien quand il serre la mâchoire jusqu'en ça en devienne douloureux et que son affliction se déploie en perles trempées, le long de ses joues. jules ne dit rien quand il s'assoit à côté dans un soupir tordu, un soupir qui lui arrache la bouche et qu'il regarde le vide par honte de céder à de telles infanteries que sont les larmes face à la menace.
Tadhgán Payne
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Re: Apocalypse Now - Payne Dim 24 Fév - 15:31
Ils s'en allaient. Payne anticipait le contraire, comme s'il avait pu se préparer au retournement de situation, à ce bordel que ça aurait été si Ethan comme Dorothy avaient décidés de désarmer Jules alors que lui était à terre. On ne lui avait pas laissé une chance de se défendre et on s'en prendrait à deux contre un à son frère – et Payne ne pourrait que regarder, impuissant, Jules prendre les sorts. Ça l'aurait mis dans une rage folle, mais qu'aurait-il pu y faire ? Ça l'aurait mis dans une rage folle et c'est cette idée horrible, créée par sa méfiance et sa vigilance impuissante, qui l'amena à se calmer. Il réalisa qu'il s'était emporté contre Martin mais que sa colère n'était rien face à ce qu'elle déclencherait si elle décidait de s'en prendre à son ami. Il relativisait. La Serdaigle n'était pas importante, l'autre Poufsouffle non plus. La haine qu'il avait pour eux n'avait pas ni le pouvoir ni le droit de menacer Jules, parce que cette haine n'égalait en rien l'amitié qu'il avait pour son frère. Alors Payne se tut, Payne attendit qu'ils partent, et même si les liens se desserrèrent puis le lâchèrent, il ne réussit à se calmer vraiment que lorsqu'il fut en mesure de s'asseoir, de constater qu'ils ne revenaient pas. Sa respiration se calma un peu. Il s'essuya la lèvre – c'était ça qu'il avait mordu – ça saignait juste un peu.
"Merci."
Il se tourna vers Jules. Ils étaient beaux et grands, tous les deux, avachis contre le sol froid après la fuite sans gloire de leurs ennemis. Ah, vraiment ! Le seul grand, c'était Jules, qui avait agi plus vite que l'éclair. Il dégainait plus vite que son ombre !
"Est-ce que j'dois t'appeler Lucky Luke maintenant ?" lâcha Tadhgán dans un sourire qui lui fit mal.
Il aurait pu lui poser des tas de questions, demander s'il allait bien, comment il l'avait retrouvé, mais il préféra plaisanter, ignorant la douleur. Même si Jules avait dégainé pour tirer dans le dos d'un ennemi, Payne était fier de lui. Il savait qu'il pouvait compter sur lui. C'était ce qu'ils faisaient, entre amis. Peu importaient les conséquences. Il posa une main sur la tête de Jules. Jules était plus grand que lui, mais là, assis à côté l'un de l'autre, il semblait beaucoup plus petit. Jules était son cadet, il aurait pu être son petit frère – Payne préférait le considérer juste comme son frère – son égal. Il ébouriffa légèrement ses cheveux, en le secouant un peu, comme s'il pouvait par ce geste chasser ses larmes. Ça voulait dire beaucoup de choses : qu'il était content qu'il soit là, que lui aussi, il était là. Et que ça craignait vachement, cette histoire, mais que ce n'était pas grave. C'était fini.
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