chantons sous la pluie // azard

Il était tard, très tard… Après avoir dormi encore une fois toute la journée et celle de hier, tu n’étais pas du tout fatigué ce soir. La lune et les étoiles étaient pourtant des signes évidemment pour les autres corps qu’il était temps d’aller se mettre en veille, mais pas pour le tien. Lui, il était plutôt en train de s’échauffer prêt à en découdre sous les constellations, enfin plutôt les nuages pour ce soir… En effet, les magnifiques étoiles manquaient à l’appel, remplacées par d’épaisses masses duveteuses dont la lumière lunaire révélait les contours. Vous vous baladiez en dessous de tout cela, toi et Joey, lui équipé de son uniforme d’hiver et toi d’un épais sweatshirt. Il ne faisait pas si froid que ce que vous auriez pensé, en même, vous n’étiez qu’en septembre. Tu adorais ces délicates nuits de fin d’été, douce et enivrante, tout te faisait du bien, le vent, le calme, la lumière pâle de la lune… Tu ne pouvais décidemment pas t’en passer, elles te provoquaient toujours des sensations et des émotions tellement agréables. Tu regardais Joey à côté de toi. Il avait été si gentil de t’accompagner, toi qui te serait encore retrouver seul en ce moment, en complet déphasage avec le rythme des autres élèves et de tes amis. Tu savais que cette grande tige rousse était un bon ami et il savait souvent te le rappeler par sa présence, bravant même le règlement que tu ignorais une fois encore. Si tu devais suivre à la lettre tout ce qui était marqué sur ce vieux bout de papier défraîchi, tu ne ferais pas grand-chose de ta vie à part dormir, déjà que cela représentait la grande majorité de tes activités…

Joey avait un don pour raconter les histoires, une manière bien à lui qui te faisait toujours rire. Cependant, elle présentait toutes un énorme défaut, leurs longueurs ! Pour ne pas mentir, tu arrivais rarement au bout, tu finissais soit par ne plus écouter, soit par t’endormir prit par une de tes crises. Cependant, cette fois-ci, tu avais réussi à arriver au bout de celle qu’il était en train de te raconter. Tu attendais avec impatience le dénouement de cette anecdote quand ce dernier s’arrêta de parler pour se plaindre d’une goutte dans l’œil. Tu étais là, la bouche ouverte, attendant la suite. Tu n’eus pas eu le temps de lui réclamer la fin que déjà la pluie s’intensifiait, passant d’un petit égouttement à un véritable rideau aquatique. Tu voyais cela comme un signe, il ne fallait plus jamais que tu écoutes ses histoires jusqu’au bout.

Toi et ton ami cherchèrent alors un abri dans cette rue déserte, mais en vain, tous les portes étant fermées depuis bientôt une bonne heure déjà avant votre arrivé. Ton ami te demandait en riant ce que vous allez bien pouvoir faire désormais. Tu t’apprêtais à lui répondre, quand celui-ci frappa avec puissance une flaque devant lui, couvrant ton pantalon d’eau et de boue. Il venait de prendre un air faussement désolé. Tu voyais qu’il n’avait qu’une envie, c’était d’exploser de rire. Cela tombait plutôt bien car toi aussi ! Tu t’en fichais complètement de ton pantalon, tu auras tout le temps de le faire sécher et de le nettoyer plus tard alors, tu éclatas de rire à gorge déployé. Mais bon, Joey n’allait pas s’en sortir comme cela et comme un vieux gamin revanchard tu sautas à pied joints dans une autre flaque, situé jusqu’à côté de lui car quitte à être sale autant y aller franchement ! Tu riais de plus belle, fier de ta bêtise comme un enfant sachant pertinemment que ce n’était pas correcte de faire cela. Tu pensais alors que si les adultes interdisaient aux enfants de sauter dans les flaques, c’étaient peut-être simplement parce qu’eux mourraient d’envie de le faire mais qu’ils ne pouvaient plus se le permettre à leur âge, au vu de la société. Cette idée te donnait encore plus envie de te lâcher. Le jeune Poufsouffle qui t’accompagnait était de plus, le partenaire idéal pour ce genre d’amusement. Vous deux ensembles, cela finissait toujours par donner du grand n’importe quoi. Le lampadaire que tu voyais au loin et la pluie torrentielle, t’inspirait énormément et te rappelait un de tes films préférés « Singin in the rain » et sa fameuse scène mythique. Il fallait que tu le fasses, il fallait que tu chantes et surtout il fallait que tu danses !

-"Viens Joey, suis-moi !", lanças-tu à ton camarade avec un sourire emplie de malice.

Tu sortis ta baguette et lança le sortilège du parapluie, faisant apparaître un petit champ de force en forme d’ombrelle au bout de ta baguette. Tu commenças à fredonner le fameux air en te promenant jusqu’au lampadaire.

-"I’m singin’ in the rain. Just singin’ in the rain. What a glorious feelin’. I’m happy again", à ces mots tu grimpas sur le lampadaire, l’accrochant d’un bras, l’autre portant ta baguette-parapluie avec laquelle tu faisais maintenant signe à Joey de monter te rejoindre pour chanter la suite.

Tu n’avais pas demandé à n’importe qui de t’accompagner ce soir. En choisissant le jeune rouquin tu savais pertinemment que tu n’allais pas être le seul à partir dans tes délires aussi soudains que curieux. En effet, ce dernier ne t’avait encore une fois pas déçue. Tu l’avais vu arrivé en trombe, t’arrosant copieusement au passage, avant d’entamer gaiement et ardemment le reste de cette si célèbre chanson. Il arrivait même à te surprendre, descendant au sol, genou à terre comme un amant en dessous d’un balcon. Tu lâchas un rire de surprise devant l’hilarité de la scène. Tu déployas tes bras juste après les siens afin de l’accompagner sur ces dernière phrases en y mettant tout ton cœur. Vous terminâtes tout cela en un gigantesque éclat de rire spontané qui faisait du bien. Tu lèvas cependant ton doigt en l’air comme pour marquer l’idée d’un rappel.

-Il nous manque encore une chose importante, regarde on est encore sec à certain endroit ! Ce n’est décidemment pas concevable !!, lui lanças-tu en pouffant de rire.

Sur ces mots tu te lanças dans la suite de cette chorégraphie mythique, qu’en bon danseur tu connais parfaitement. Tu n’oubliais bien sûr pas de fredonner les fameux : -La la la la, la la la la la qui se devait d’accompagner tout cela. Ton camarade ne mis pas longtemps à te suivre et ce rythme populaire de claquette résonna alors avec force sur les pavés de la rue et tout cela dans des éclaboussures d’eau et de rires.

Après avoir passé plusieurs minutes s’en vous arrêtez de battre le sol, la fatigue commençait à se faire sentir chez toi et sûrement aussi chez ton camarade. Tu avais peur de t’endormir maintenant, peur que cette légère fatigue soit les prémices dissimulées d’une énième attaque soudaine de Morphée, te tirant une nouvelle fois aux joies de la vie que tu appréciais tant. Tu espérais alors que tu sois en plein cœur d’une de ces phases si libératrices d’insomnie. Voyant que la pluie, pourtant puissantes il y a peu, commençait à s’estomper et que les nuages semblaient déjà commencés à se dissiper sur la toile charbonneuse, tu décidas de t’allonger sur le sol au milieu de toute la myriade de flaques dans lesquels vous pataugiez. Tu fixais le ciel attendant que les petites perles de la nuit se montrent enfin et sortent de derrière leurs cachettes cotonneuses pour se montrer à vos petits yeux brillants. Tu ne prenais jamais le temps de prendre le temps car après tout tu n’en avais pas, du temps. Mais quand tu y pensais bien, essayer de tout faire sans prendre le temps, ce n’était peut-être pas vraiment profiter. Après tout ceux qui vivaient constamment, « normalement », ils prenaient le temps de regarder le temps, eux.

-Tu aimes l’astronomie toi Joey ? Moi je n’ai jamais pris le temps d’apprécier cet art et ce qu’il le compose. Mieux vaut tard que jamais non ?