[END] welcome to the fire - mars/avril 2029 (solo)

L'impression d'avoir échoué.
L'impression d'être un raté.
L'amertume d'avoir tout perdu.
Le regret d'exister.

Le premier poing avait claqué la porte de sa chambre. Le second avait heurté le mur juste à côté. Le troisième fut un coup de tête contre le bois. Le quatrième un hurlement, râle de colère, râle de peur. D'épuisement. Le cinquième fut pour ces objets sur les bureaux, ce qu'il restait des affaires de Trésor, des affaires de Samuel, ce qu'il y avait de ses affaires à lui. Brisées, sur le sol. Le sixième était une pensée pour Joy, un regret, une honte, la colère faisant rencontrer le plat de ses poings sur le bureau, presque défoncé. Le septième laissait céder sa jambe, fébrile par les tremblements et les soubresauts de son être en larmes. Les suivants qu'il ne comptait plus furent des dizaines de coups portés un peu partout. Des surfaces dures que l'adrénaline empêchait de réellement sentir. Les suivants furent pourtant les plus douloureux car ils étaient ceux qui faisaient réaliser.

Qu'on l'avait prévenu.
Qu'on avait voulu l'aider.
Qu'il avait tout gâché.


On l'avait prévenu.
On avait voulu l'aider.
Il avait tout gâché.



Comme d'habitude.


L'impression d'avoir échoué.
L'impression d'être un raté.
L'amertume d'avoir tout perdu.
Le regret d'exister.

Il n'avait pas compté le temps passé à frapper pour tout briser, il n'avait pas compté le temps perdu à s'achever, les os massacrés. Il avait l'habitude, Kain, d'être celui qui frappait. L'habitude de finir les poings en sang, cette habitude malsaine d'extérioriser en violence des sentiments impossibles à canaliser. Il avait cette impression de mourir lentement, consumé par des flammes bien trop chaudes pour lui. Il n'avait pas su les dompter.

Et Joy.
Joy.

Oh Joy si tu savais
À quel point il était désolé.
Désolé de t'avoir perdue
Désolé d'être incapable de te récupérer.

Désolé de t'aimer si fort.

Et Owain.
Oh Owain si tu savais à quel point il regrettait.
Tu ne méritais pas quelqu'un comme lui, Owain.
Quelqu'un capable de briser ses promesses pour
Un rêve.
Une chimère.
Un espoir aussi vin que l'était son dessein.

Il avait pleuré.
Dévalant sur ses joues des sillons de larmes salées qu'il ne savait plus arrêter. Désespéré il avait pleuré. Seul, il avait pleuré, sans faire attention à ces possibles élèves qui pouvaient le regarder. Il n'avait rien dit, ni rien fait d'autre que pleurer. Dévasté. Comme un enfant. Brisé. Comme ces morceaux de verres, vestiges du mois passé qu'il n'avait pas voulu nettoyer.

Tu étais partie le coeur en larmes.
Tu devais le détester, pas vrai ?
Dis lui, hurle lui Kate, que tu le détestes
Il ne mérite que ça.

Il ne pouvait pas mériter autre chose, ce garçon perdu et amoureux qui n'avait pu que te rejeter. Par couardise. Par lâcheté. Et de regret à cette heure de la journée, il pleurait. Il pleurait.

Pleurait.

Encore.

Encore.

Pleurait toujours.

Sans s'arrêter.

Les heures avaient passées, le dîner aussi depuis bien longtemps mais il n'avait pas bougé. Il s'était allongé sur le canapé, celui qu'il n'avait pas quitté. Où dans ses bras il te serrait, un peu plus tôt dans la journée. Incapable de se calmer, les larmes toujours dégoulinantes il n'avait cessé. De s'excuser, en silence, incapable de parler. De t'aimer, en silence, incapable de l'avouer. De se maudire en hurlant sa haine au monde entier.

Kate.
Kate si douce.
Il se sentait si laid de t'avoir rejetée.
Il voulait te protéger
Il voulait simplement oublier
Se priver, de toi, des autres,
Pour peut-être avoir la chance d'exister enfin.

Il ne pensait pas que ça pouvait être si douloureux, de t'aimer puis de t'abandonner. Il n'avait pas conscience de la nature de sa peine, pourtant si présente, si durement présente. Il t'aimait.

Il pleurait.

Toute la nuit sur ce canapé.

Tous les jours depuis.