| déranger - daphné | | déranger - daphné Jeu 5 Avr - 16:33 | |
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surtout, pas de geste brusque
Le regard vitreux, fatigué, tiraillé, la face maussade, blanche, creusée. Il file à travers les couloirs tel un fantôme, rase les murs comme un Bertram bien élevé, baisse la tête comme une âme vide. Sa tignasse d'or est recouverte d'une capuche de sweat vert, un signe distinctif, reconnaissable entre mille pour tout bon élève de Poudlard. Serpentard de mauvais poil, ne pas s'en approcher. Simple, efficace.
Et le sanguinolent élève en question est des plus mordants. Il cherche un havre de paix, quelques centimètres d'ombre et de liberté, fuit tous les visages familiers, ne cherche pas même à bousculer. Serait-ce une crise existentielle que tu vis, Yannis ? Est-ce que tu remets en cause toute la monstruosité dont tu fais preuve, est-ce que tu as décidé de changer, de réparer tes erreurs ? Non, ne rêvez pas. Il réfléchit. Il pense comme il le fait lorsque vous ne le voyez pas, il dirige son imagination vers de nouvelles surprises. La veille, il s'est penché sur Gilbert Grape, et depuis le visage de l'anciennement jeune DiCaprio lui trotte dans la tête, il veut voir Gatsby le Magnifique.
Ses jambes le guident rapidement vers la salle de cinéma, qui, pour son grand plaisir, est inoccupée. Il n'a besoin de personne pour lancer son film, et peu sans gêne s'installer au premier rang. Et bouger. Gigoter. Le film l'emporte, mais son corps reste distrait, alors il se tourne et se retourne, il s'installe et se désinstalle, la bouche toujours grande ouverte devant cette imposante oeuvre de Baz Luhrmann, il pourrait gober le jeu d'acteur de Tobey Maguire. Si bien qu'il finit par s'installer à l'envers sur son fauteuil. Les pieds vers le haut et la tête vers le bas.
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| | | Re: déranger - daphné Mar 10 Avr - 12:37 | |
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déranger
Les yeux mi-clos, les cheveux à peine brossés, Daphné arpente les couloirs, blottie dans un gros gilet en laine. Le sommeil agité par des rêveries incessantes, sa nuit perturbée se lit sur son visage embrumé, pour peu qu'on y prête attention. Trop épuisée pour se donner un but quelconque pour la journée, elle laisse la masse anonyme de ses camarades guider aveuglément ses pas, le regard rivé sur son téléphone. Alors que de vieilles photos, parfois cryptiques, parfois nostalgiques, défilent sous ses yeux, la jeune fille calque sa démarche sur celle des autres, trop absorbée pour remarquer qu'elle a quitté les escaliers en même temps que les gens devant elle.
Bien plus tard que de raison, Daphné commence à se rendre compte qu'elle est au sixième étage, alors que l'odeur si caractéristique du couloir heurte ses narines. Son regard fatigué se détache alors des souvenirs qui l'avaient aspiré, pour parcourir l'endroit de gauche à droite. Il y a beaucoup trop de monde ici, et en plus ils font beaucoup trop de bruit. Comment est-ce qu'ils font pour tous être aussi réveillés aujourd'hui ? Irritée, elle a envie de partir. Mais en même temps, elle a techniquement déjà fait tout le chemin jusqu'ici, non ? Et puis, quitte à être ici, autant en profiter. Pourquoi pas regarder un de ces films dégoulinants de niaiserie qu'elle aimait tant ? Elle ouvre doucement la porte de la salle de cinéma.
Le bruit du film couvre son entrée, et l'explosion de couleurs et de lumières à l'écran l'aveugle un instant. Les yeux aussi plissés que possible, elle descend à pas de loup les escaliers. Après tout, s'il y a un film, c'est qu'il y a déjà quelqu'un ici. Et s'il y a quelqu'un ici, alors elle ne doit pas se faire remarquer : ce serait de mauvais goût. … Mais en parlant de mauvais goût, est-ce que ce sont des pieds qui dépassent de ce siège ?
Curieuse, Daphné s'en approche lentement, veillant à ce que chacun de ses pas soit aussi silencieux que possible. Elle finit par arriver jusqu'à la première rangée, et ne tarde pas à reconnaître le visage attaché à ces pieds. Yannis. Qu'est-ce qu'il fait là ? Elle se dit qu'elle n'aurait peut-être pas dû céder à sa curiosité, finalement. Mais bon, trop tard pour fuir quoique ce soit. Alors Daphné se penche vers lui pour essayer de déchiffrer son expression - bien consciente qu'elle cache complètement l'écran ce faisant. Oups.
— T'as pas honte de mettre tes gros pieds qui puent sur les sièges de l'école ?
Dos à l'écran, son sourire est indiscernable, mais il s'entend. Est-ce qu'elle sourit parce qu'elle est fière de sa vanne à deux balles ? Ou est-ce qu'elle sourit pour autre chose ?... Pas le temps d'y réfléchir. Une réplique du film attire son attention, et elle se retourne. Etrange. Elle a une impression de déjà vu, elle est même quasi sûre que la tête de cet acteur lui dit quelque chose. Pensive, elle tapote le genou du Serpentard du bout des doigts.
— … Tu regardes quoi, dis ?
La voilà, notre distraite Daphné, à l'attention instable et baladeuse. La voilà qui s'incruste et qui s’assied doucement, sans quitter l'écran des yeux, à la fois pleine de doutes, et pourtant étrangement sûre d'elle. Si ça avait été n'importe qui d'autre, elle n'aurait peut-être pas osé l'ouvrir, ni prétendre à rester. Mais c'était Yannis, alors pourquoi s'embêter ? Elle était bien trop fatiguée pour ça, de toute façon. Alors qu'elle s'enfonçait dans son siège, son cerveau vagabondait entre l'impression de connaître ce film, et la prochaine pique sur ses pieds qui attendait son camarade. |
| | | Re: déranger - daphné Ven 27 Avr - 13:29 | |
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déguster
Un truc qui le dérange, le titille, la sensation qu'il n'est plus seul, ça le déconcentre, il perd un centième de son film, ça ne lui plait pas, alors il fixe l'écran deux fois plus fort, il admire Carey Mulligan à l'envers, respire avec le film, littéralement.
"T'as pas honte de mettre tes gros pieds qui puent sur les sièges de l'école ?"
Et cette ombre qui cache l'écran, il fronce les sourcils et se détend à la fois en reconnaissant la silhouette et la voix qui osent troubler son repos. Daphné. Il souffle, derrière eux les acteurs s'animent autour d'une table. Elle se retourne, mais la main de Yannis vient chercher le visage de la brune, qu'il pousse doucement en grommelant que sa tête est trop grosse pour l'écran. "… Tu regardes quoi, dis ?" Il souffle encore, mettre le film en pause ne serait pas une mauvaise idée dans un cas comme celui-ci. Daphné occupe une trop grande part de son attention. Mais bon. C'est Daphné, elle peut. "Un classique adapté d'un classique, c'est Gatsby le Magnifique, tu ne connais pas ?" Il s'étire un peu, la musique le captive, mais la présence de Daphné aussi. "Curieusement, de ce que je connais de la filmographie du réalisateur, il n'a fait que des histoires d'amour. Mais de belles histoires, tu sais, les amours interdits, douloureux, grandioses..." Il réfléchit deux secondes. "Moulin Rouge, Roméo + Juliette, Australia, Ballroom Dancing, que des histoires d'amour. De très beaux décors, une belle époque, la grande classe, toujours. C'est fou, il a passé sa vie à embellir les choses." Il fixe l'écran, pas trop sûr de s'adresser à Daphné ou à lui même, si tenté qu'elle comprenne de quoi il lui parle, ces films ont tous au moins 20 ans, ils sont vieux.
Il relève un peu la tête "Tu vois de quoi je parle, au fait ?"
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