so get on your knees and pray for forgiveness • SHAELYN

Pour être honnête, j’aimais pas spécialement venir dans la salle d’art. Trop de monde, trop de bruit, pas assez de place. Quand j’y allais c’était parce que j’avais l’intention de m’investir à 100% dans quelque chose et pas parce que j’avais envie de taper la discut’ avec quelqu’un. Le pire étant quand quelqu’un ne pouvait pas s’empêcher de venir regarder ce que je faisais par-dessus mon épaule, je détestais ça, au plus haut point. Mais cette fois, j’avais décidé de faire de l’aquarelle et même si j’en avais, je ne possédais que les couleurs de bases contrairement au set de la salle d’art qui était beaucoup plus fournis. Et de toute façon ça demandait de la place mais aussi d’utiliser de l’eau et je préférais ne pas risquer de provoquer une catastrophe dans ma chambre ou dans la salle commune. Ainsi, j’avais tout mis mon nécessaire a aquarelle et dessin dans mon sac, branché mes écouteurs sur mon ipod et j’étais partie m’installer en salle d’art.

Une fois installée, il avait fallu dire bonjour à ceux que je connaissais, parler un peu parce que même si j’aurais préféré éviter, ça ne me dérangeait pas, puis j’avais dû, juste après m’être installée, tout nettoyer parce que mon pot avec l’eau s’était renversé sur ma table. Plus de peur que de mal mais tout ça avait contribué au fait qu’une fois enfin installée et prête à dessiner, toute mon envie avait sembler s’être évaporée. Alors j’avais fait défiler la quantité astronomique d’images que j’avais téléchargés sur mon téléphone jusqu’à trouver l’inspiration en voyant dessiné un joli renard aux couleurs flamboyante. A la base j’avais voulu faire un dessin en rapport avec l’automne pour accrocher dans ma chambre parce que j’adorais les couleurs flamboyantes de cette saison et aussi parce que ça commençait à faire un moment que je n’avais pas dessiné avec de l’aquarelle.

Quand Soleil s’avança vers moi, je venais juste de finir le brouillon de mon dessin au crayon. L’année dernière j’aurais été ravie de la voir mais maintenant je n’en étais plus aussi sûre. Beaucoup de choses avaient changés entre nous et si ça ne me posait pas de problème que les choses changent, le fait qu’elle m’ait repoussé comme elle l’avait fait ne m’avait pas du tout plu. Elle était mon amie alors naturellement quand les choses c’étaient dégradés j’avais voulu l’aider mais Soleil m’avait fait passer cette envie et depuis, on ne s’était pas vraiment parlé. Sauf quand j’avais posté un commentaire à propos du Stupeshit et encore, ça c’était plus moi qui rageais qu’une véritable conversation. Mais en même temps j’avais vraiment été en colère d’apprendre qu’elle avait acceptée de faire une interview alors qu’elle ne voulait pas me parler à moi son amie. Toutefois, même si je lui en voulais encore, la voir venir vers moi avec son sourire crispé m’avait vraiment surprise et me rendait suffisamment curieuse pour ne rien dire de désobligeant et tenter d’avoir une vraie conversation. Ça ne pouvait pas faire de mal si ?

— Oh. Salut. Ouais ça va et toi ? Et bien sûr tu peux.

Je fis une pause, me demandant ce que je pouvais bien pouvoir dire maintenant qui ne sonnerait pas débile. Qu’est-ce qu’on pouvait dire dans une situation comme ça ? Alors tu t’es rendue compte que t’as réagit comme une salope et maintenant tu veux bien me parler ? Il ne valait mieux pas non. Je baissais les yeux sur mon dessin puis mon regard se tourna vers la mallette que tenais Soleil. Je ne savais pas qu’elle dessiner. Encore quelque chose que j’avais raté pendant tout ce temps ou on ne s’était pas parlé. Un voile de tristesse passa devant mes yeux mais je le chassais aussi rapidement qu’il était venu. Pas question que je sois la première à pleurer. Ce n’était pas de ma faute si on en était là après tout. Je désignais la mallette du regard.

— Tu dessines maintenant ? Y a quoi dedans ? Perso je pensais faire de l’aquarelle, t’en a déjà fait ?

Ah. Décidément, j’avais un talent pour mettre les 2 pieds dans le plat. Ou plutôt sauter à pieds joints dedans, bien joué Shaelyn. Je savais pour Boréa et ça aurait été vraiment bizarre de ne pas savoir, vu comment les choses avaient évolués pour Soleil. Et il aurait vraiment fallut être stupide pour penser que rien n’était à l’origine de son comportement les dernières fois ou on s’était parlé. Non le problème c’était que je nous pensais suffisamment proche pour qu’elle accepte mon aide, je ne pensais pas qu’elle allait me rejeter comme tous les autres et j’avais beau être gentille et là pour mes proches, je ne pouvais pas la forcer non plus. Alors j’avais fini par me raisonner et abandonner parce que la douleur n’excusait pas un comportement de merde, du moins à mes yeux.

— Oh…

De toute façon qu’est-ce que je pouvais dire d’autre ? Ce n’était pas parce que je lui en voulais que j’étais sans cœur. En tout cas, ça avait dû lui coûter de venir ici avec cette boite et même s’en servir devait lui faire bizarre mais en même temps, c’était un beau cadeau qu’elle lui avait fait là et je ne pouvais qu’approuver. En revanche, pour quelqu’un comme moi, la voir ouvrir la boite et parcourir son contenu avec autant de tristesse, ça faisait mal. Je n’aimais pas voir les gens que j’appréciais comme ça et même si elle m’avait fait du mal, je ne pouvais pas rayer tous les bons moments qu’on avait passé ensemble et la voir comme ça, ça me donnait juste envie de lui faire un énorme câlin. Mais il ne fallait pas Shaelyn, il fallait attendre, parce que si je cédais maintenant j’étais foutue. Je voulais juste lui faire comprendre qu’elle ne pouvait pas me traiter comme ça et tant pis si ça semblait cruel.

Je balayais la table du regard et poussais un peu mes affaires vers la gauche pour faire de la place à Soleil, histoire qu’elle puisse poser sa mallette sur la table sans problèmes. Après tout, elle était entrain de faire des efforts alors il fallait bien que j’en fasse aussi si je voulais qu’on avance, petit à petit, sans se prendre la tête.

— D’accord. Et si tu veux je te montrerais comment on fait de l’aquarelle. Comme ça tu pourras mieux utiliser la mallette.

Apprendre aux autres ne m’avait jamais dérangé et ça me donnait une occupation parce que c’était beaucoup plus facile que de devoir parler. Avec un sourire tout aussi timide que celui de Soleil, je lui tendis le paquet de brownies que je venais de sortir de mon sac. Ça nous ferait du bien à toute les deux parce que Dieu que la situation était gênante.

Pendant que Soleil se battait avec son scotch, je fixais ma feuille de papier blanche puis mon image de renard, tour à tour. Mon imagination et ma motivation, durement acquise, venaient de s’évanouir dans un nuage de fumée. Je n’avais jamais fait parti de ces artistes pour lesquels l’inspiration venaient à eux comme ça à force de fixer une feuille ou une toile blanche et j’étais tout simplement incapable de rester des heures et des heures à faire la même chose pour la simple et bonne raison qu’un rien me distrayait. Bon là ce « rien » était une personne et c’était loin d’être rien d’ailleurs mais ça n’empêchais pas que j’arrivais plus à me concentrer sur mon dessin tellement je m’étais tendu en l’espaces d’à peine quelques secondes et je détestais tellement ces blancs qui s’éternisaient…

— On sera deux comme ça. Ce que je comprends pas c’est pourquoi tu m’as carrément envoyé bouler, je sais que c’était pas facile mais j’aurais pu aider ou au moins te soutenir. Je sais pas ça me dépasse.

Si déjà elle s’en voulait c’est qu’elle progressait. Bien sûr des excuses ne changeraient rien à son comportement mais d’un autre côté ça ne servirait à rien de l’enfoncer encore plus. Déjà parce que ça ne ferait pas avancer les choses entre nous, or j’avais vraiment envie qu’elles avancent. Mais surtout parce que je n’avais aucune envie qu’à cause de moi elle retombe dans l’état dans lequel elle était. La cruauté n’était pas quelque chose qui faisait partie de moi. Bon d’accord ce n’était pas totalement vrai non plus parce que si la personne le méritait vraiment et qu’elle me poussait dans mes retranchements, je pouvais me montrer cruelle, mais ce n’était pas le cas de Soleil. Certes elle avait été blessante, exécrable mais elle n’était pas mauvaise dans le fond, elle s’y était juste prise comme un manche pour gérer ses problèmes et ça c’était une autre histoire.

— J’imagine que maintenant du coup tu vas mieux ? Tu veux bien en parler maintenant ?

Je réalisais que je ne lui avais pas dit que j’acceptais ces excuses. Pourtant, si elle c’était donné tout ce mal pour venir ici et s’excuser alors qu’elle avait l’air d’être aussi à l’aise que moi, c’est-à-dire pas du tout, c’est qu’elle devait avoir sincèrement envie que je lui pardonne non ? Ou alors c’était mon côté bisounours qui m’influençait trop, qui sait. Mais j’avais beau comprendre qu’elle en avait chier, qu’elle regrettait, je n’arrivais pas à me dire tant pis, c’est bon je te pardonne. Parce que moi aussi elle m’avait blessé dans ses agissements et je trouvais ces gens qui acceptaient les excuses vite, sans trop se poser de questions, tellement faux. Après tout Soleil comptait pour moi et c’était pour ça que je ne pouvais pas les accepter comme ça. Je poussais un long soupir et tournais la tête vers la Serdaigle.

— Tu sais, qu’on me jette comme ça, c’est quelque chose que je supporte pas du tout. Mais bon on fait tous des erreurs et je suis loin d’être parfaite donc va pour une seconde chance ? Après va falloir du temps pour qu’on redevienne comme avant hein mais c’est pas impossible pour l’instant.