Il y avait un souvenir qu’Uther ne voulait pour rien au monde se remettre en mémoire. Il s’agissait sans doute du seul filament qui ondoierait paresseusement dans sa pensine pour l’éternité. Depuis qu’il l’avait ôté de sa tête -dés que cela avait été possible-, il n’avait plus cherché à l’entrevoir et, s’était tout bonnement interdit d’y repenser. L’évènement que cette mince volute argentée décrivait, l’avait profondément marqué et, suscitait toujours en lui, des années plus tard, les sentiments les plus vifs.
L’impression qu’une si petite chose pouvait produire sur sa personne le terrifiait, ce qui, cela va s’en dire, était tout aussi inavouable. Cette histoire, qui remontait au début de l’année 2025 et, qu’il faut bien dire pour les besoins de notre scénario, ne devra plus jamais être contée par la suite.
Tard le soir, bien après que le dernier cours de la journée se soit achevé, à l’heure où tous les étudiants se pressaient dans la grande salle pour dîner, un jeune homme de presque-seize-ans avait décidé de demeurer cacher dans une salle de classe. Le mois de janvier pointait timidement le bout de son nez et, la neige tombait à gros flocons depuis plusieurs heures, sans interruption. Un pied dans la flaque lumineuse projetée par la flamme d’une chandelle à l’agonie, Uther Windsey, alors âgé de quelques années de moins, regardait les ombres du mobilier s’étirer sur les murs de pierre. Son visage laissait lire diverses émotions contradictoires dans une large palette allant de l’étonnement –il avait été si facile de se dissimuler dans la classe- à l’excitation, en passant par l’inquiétude et la peur d'être pris la main dans le sac.
D'un geste hésitant, il fit place autour de lui. Ses doigts malhabiles lui paraissaient étrangement gourds au contact des chaises repoussées tant de fois qu'il se cru incapable d'exécuter son plan à la lettre. Mais il parvint tout de même à se ménager une place suffisamment grande pour pouvoir s'exercer en toute quiétude, selon les modalités de l'examen. Dans quelques mois, il devrait passer ses B.U.S.E et, malgré un dossier scolaire excellent, faisait face à un obstacle de taille.
Il était le dernier élève de sa classe à ne pas avoir fait apparaître un patronus complet. A l'heure où ses camarades se délectaient d'observer loutres, renards, loups, chats, hiboux et autres animaux argentés évoluer en toute liberté, lui, Uther Windsey, fils du premier ministre était en échec.
Fenry D. Williams
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Re: [FLASHBACK] Où il est question d’un secret précieux — Fenry Mer 28 Nov - 16:08
Au plus secret de la nuit
La curiosité était un mot trop léger pour la maladie qui prenait Fenry chaque fois qu'un secret lui échappait, et ça n'avait jamais été aussi vrai depuis que sa legilimancie s'était si bien développée. Elle en était devenue obsédée, chaque murmure soulevait ses soupçons, et chaque soupçon la poussait à franchir des limites qu'elle ne se serait jamais permis d'effleurer auparavant. L'honnêteté avait des allures de chimère et son absence avait piétiné le droit à l'intimité de tous ceux qu'elle côtoyait. Ou en tout cas, c'est ce qu'elle se disait.
Les murmures étaient nombreux, elle voyageait entre les esprits qui chuchotaient et se plaisait à s'inviter dans leurs mondes secrets. A l'époque, son habileté ne lui permettait que d'entrevoir - et ça la frustrait tant qu'elle n'arrêtait jamais.
C'était pour s'isoler, pour oublier toute cette activité trop intense et maladive, qu'elle veillait si tard le soir, dans les couloirs déserts, où elle ne ressentait plus tant le besoin - l'obsession - de tout savoir.
Elle était fatiguée.
Ce soir-là, cependant, il y avait des murmures qui s'étaient élevés dans le silence. Et Fenry les avait suivis, attirée par l'odeur du mystère. Elle s'était retrouvée là, figée dans l'encadrement de la porte de la salle de DCFM, et n'avait pas prononcé un mot.
Elle n'aurait su dire combien de temps ça avait duré, combien de temps elle l'avait observée avant d'élever sa voix calme qui fit écho contre les murs.
« Windsey. »
Elle ne put définir si elle était intimidée, mais elle savait qui il était, et c'était suffisant pour qu'elle ne fasse pas de pas en avant. Elle ne s'était pas empêchée de visiter (maladroitement) son esprit, cependant.
Fenry baissa les yeux sur sa propre baguette, et se fit la réflexion qu'elle aussi, il lui était arrivé d'esquiver certains cours pour ce genre de raisons. Il lui avait fallut des mois avant d'oser se présenter devant un épouvantard.
« Ils ont l'air d'être précieux, tes secrets, pour les enfermer ici si tard. »
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Re: [FLASHBACK] Où il est question d’un secret précieux — Fenry Sam 1 Déc - 16:09
Un mince filet de fumée bleue s’échappait de l’extrémité de sa baguette et son cœur était de plus en plus serré. La honte avait le goût de la douleur et de l’amertume.
Il fit quelques pas pour se replacer au centre de l’espace qu’il avait lui-même ménagé et reprit sa posture initiale. Les yeux clos, le regard tourné vers l’intérieur, les souvenirs se succédèrent, considérés puis écartés : anniversaires, dîners de famille, tête à tête avec le paternel, matches d’hippoball, petites machineries entre amis. Aucun de cela n’était parvenu à faire apparaître le patronus tant désiré. La mémoire résiduelle de moments plus intimes, sa rencontre avec Vedak, l’achat de sa première baguette et la sensation ressentie alors, firent l’objet d’essais tout aussi peu concluants. Les émotions négatives se bousculaient, confuses et violentes et, plus il échouait, plus les panaches de fumée bleue se faisaient rares. Sa magie se tarissait.
Au fil des ans, le masque d’Uther était presque devenu une seconde peau. Il ne l’ôtait plus et, s’était même mis à croire en ses propres fantasmes. Il se voulait sans faille, inflexible protecteur, garant de l’ordre et de la paix partout où il se rendait : auprès de sa famille, de sa maison, des autres élèves et, un jour, du monde des sorciers. Il se rêvait en justicier pour se rendre digne de son illustre père et se comportait en tyran. On ne pouvait pas véritablement lui en vouloir. Il avait été élevé pour diriger, marqué au fer rouge de la haute société des sorciers.
Mais l’enfant de douze ans, qui avait passé à tabac l’un de ses camarades, dans les toilettes des garçons, ça n’était pas lui. Il ne s’agissait que d’une version abîmée et manipulée d’un petit sorcier auquel l’on avait appris à asseoir son autorité par la force. Le véritable Uther, celui qui murmurait à Vedak la vipère, qui se cachait sous le masque de cire et ne sortait jamais de sa coquille, n’avait rien de commun avec cette personne. Comment pouvait-il faire appel à un souvenir véritablement heureux, alors qu’il n’était pas même capable de se regarder dans un miroir ?
Une nouvelle tentative infructueuse lui fit donner un coup de pied rageur dans une chaise. Cela faisait mal, mais en valait la peine. Une voix basse et calme interrompit son raffut. Dans l’encadrement de la porte, à demi dissimulée dans l’ombre, une jeune fille le contemplait.
Sa réaction fut immédiate, il se raidit et amorça un mouvement pour dissimuler sa baguette dans les plis de la robe de sorcier. Depuis quand était-elle ici ? Qu’avait-elle vu ? Comment avait-il fait pour ne pas la remarquer ? Il pensait qu’elle allait amorcer un mouvement pour entrer dans la pièce, mais elle se contentait de rester hors de portée, ses yeux brillants dans l’obscurité, reflétant l’éclat des chandelles agonisantes. Ce n’est que lorsque sa voix s’éleva à nouveau qu’un nom lui vint à l’esprit. Fenry Williams.
Fenry Williams la legilimens.
Qu'avait-elle vu ou cru voir ? Était-elle entrée dans son esprit ? À cette pensée, un frisson parcouru son échine. Si elle avait osé... Son regard se riva au sien avec une intensité qui aurait pu susciter le malaise. Il ne s'attendait pas à être surpris et ne s'était pas senti observé. Livré à la merci du regard d'autrui, il ne parvenait pas à se défaire de la sensation d'une impression de vulnérabilité écœurante. Pour couronner le tout, les mots dévalèrent de sa bouche sans préméditation.
Et j'imagine que les secrets ça te connais, n'est-ce pas Williams ?
Fenry D. Williams
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Re: [FLASHBACK] Où il est question d’un secret précieux — Fenry Ven 14 Déc - 13:06
Au plus secret de la nuit
Tapie dans l'ombre, son amie, elle était restée suffisamment loin pour se sentir hors de portée de lui. Ainsi ses mots et ses pensées pouvait s'écraser contre elle sans qu'elle se sente menacée. Et de là elle l'avait regardé, presque analysé, et elle s'était sentie dominer. La sensation lui était presque étrangère, et elle était loin de se douter qu'elle allait devenir si familière, tant elle y avait pris goût ; le sentiment d'être invincible avait quelque chose de rassurant pour Fenry qui s'était toujours sentie si vulnérable.
Qu'il connaisse son nom avait renforcé sa confiance ; il savait de quels miracles elle était capable, peut-être même l'imaginait-elle plus dangereuse qu'elle ne l'était vraiment. Qu'elle ne confirme ou n'infirme rien laissait son esprit libre de croire ce qu'il voulait ; et dans les esprits des autres, elle l'avait remarqué bien assez tôt, elle avait toujours l'air de la vipère imbattable, dangereuse, sournoise, perfide. Si ça n'était pas bien flatteur, au moins ça lui avait permis de ne plus avoir peur. C'étaient eux, tous, qui avaient peur d'elle.
« Si tu le dis. »
Elle s'était approchée d'un pas, puis d'un second, et avait attrapé une des chaises dispersées dans la salle pour s'y asseoir, le dossier devant et ses bras s'y déposant. Fenry n'avait aucune raison de dévoiler les secrets dont elle était la gardienne ; c'était en ça que tous ceux qui murmuraient sur elle avaient tords. Elle n'était pas cruelle. Au contraire, au fond d'elle, elle avait toujours été bienveillante.
« Je ne dirai rien. Les bruits de couloir ça ne m'intéresse pas. »
Les secrets, elle préférait les garder pour elle, parce qu'elle était égoïste. C'étaient toutes ces armes qu'elle gardait pour être invincible une fois que le danger toquerait à sa porte ; c'étaient toutes ces cartes qu'elle gardait dans sa poche pour palier à toute main défavorable ; c'étaient tous ces atouts qu'elle ressortait pour abattre celui qui se figurait suffisamment armé pour la défier.
« Tu as remarqué, alors ? A force de mentir aux autres on finit par se leurrer soi-même. Tu t'es perdu, Uther.
Elle l'avait appelé par son prénom.
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Re: [FLASHBACK] Où il est question d’un secret précieux — Fenry
[FLASHBACK] Où il est question d’un secret précieux — Fenry
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La curiosité était un mot trop léger pour la maladie qui prenait Fenry chaque fois qu'un secret lui échappait, et ça n'avait jamais été aussi vrai depuis que sa legilimancie s'était si bien développée. Elle en était devenue obsédée, chaque murmure soulevait ses soupçons, et chaque soupçon la poussait à franchir des limites qu'elle ne se serait jamais permis d'effleurer auparavant. L'honnêteté avait des allures de chimère et son absence avait piétiné le droit à l'intimité de tous ceux qu'elle côtoyait. Ou en tout cas, c'est ce qu'elle se disait.