l'ultime perdition // feat. Andy

La rentrée était arrivée trop vite.
Et c'était le premier été sans Felix depuis deux ans. C'était un été sombre, illuminé artificiellement par les actions du Corbeau dans le monde entier.
Tu étais lasse Andy, lasse que tout échappe à ton contrôle. La seule chose qui animait encore ta combativité, c'était la colère. Celle de ton frère arraché, amnésique. Celle de la solitude que tu t'étais imposé, celle de la trahison de Samuel. Ils étaient derrière tout ça, tu le savais au fond de toi. Les Renards savaient... Mais qu'en était-il d'eux ? Le groupe battait de l'aile et le monde aimait désormais ce terroriste sans identité.

Bref, tu étais de mauvaise humeur.
Surtout que pour la première fois de ta vie, tu n'en pouvais plus des cours, et tu n'étais qu'en 9e année. Tu aurais tellement aimé vivre ta dernière... Partir au ministère dès maintenant pour changer les choses. Imposer tes idées, redresser l'ordre. Un rêve encore immature qui prendrait le temp de se dessiner dans le futur.

***

Tu rentres de Pré-Au-Lard en compagnie de Joy et Harry, tellement heureuse de les avoir retrouvé. Avant de te rendre compte que tu avais oublié ton livre de droit sur la table des trois balais. Agacée mais gardant le sourire, tu leur fais signe que tu les rejoins à l'école, que tu peux rentrer seule sans problème.
Après avoir fait l'aller retour, le chemin pour l'école était tout de suite plus désertique. Il était si tard que ça ? Une main te chope et tu es tellement surprise que tu n'as ni le réflexe ni le temps de crier à l'aide. Tes yeux se ferment brutalement, crispée au possible, tu te débats quand ton mur heurte un mur humide. Et quand tes paupières se dérobent à son regard perçant, ton sang ne fait qu'un tour.

Mais encore une fois, il ne te laisse pas le temps de la parole ni des cris.
Parce que c'est lui qui hurle presque, tu avais l'impression d'être cette enfant grondée Andy... et sur le coup tu n'avais rien compris.
Le souffle court, les émotions brimée, tu articules lentement.

— « Qu'est-ce que... Qu'est-ce que tu fais là... »  

Avant de froncer les sourcils sous l'adrénaline redescendue. Ce traitre osait se ramener ici, il osait te parler, te toucher, s'accrocher à ton existence? Il passe ses doigts sur tes mains et laisse échapper un couinement affolé. Non, sa bague tu ne la portais plus.
Mais elle était dans ta poche d'uniforme. Toujours avec toi au cas ou, tu avais du mal à te détacher complètement des choses Andy.
Mais ça, il ne le saurait pas pour le moment.

— « Si je ne t'ai pas répondu, c'est que je ne veux pas te parler ! Et tu oses te présenter ici comme une ombre alors que tu n'assumes toujours rien.. Retourne pleurer dans les jupes de ton chef, apparemment vous allez dominer le monde bientôt ! Bravo à lui. »  

Tu étais jalouse d'être dans le camp des perdants d'un coup.
Et inquiète pour lui, un peu aussi. 

Il te terrifiait, dans ses émotions exacerbées... Toi qui était toujours dans le contrôle de toi... et des autres. Il avait échappé depuis des années, te cédant quand même des privilèges dont tu n'arrivais pas à t'en pavaner. Il y avait chez lui quelque chose de destructeur qui t'attirait... comme un papillon.
Tu tires ta main vers l'arrière, pour l'empêcher de la tenir plus longtemps, détournant le regard coupable à sa constatation.

— « Tu sais ce qu'elle te dit la pauvre gamine ? D'aller te faire voir Hassan ! »  

Tu l'avais craché comme un echo sourd à ton coeur lourd. Vexée qu'il puisse choisir son stupide gourou à toi même. Encore blessée qu'il vous ait piégé au bal, dans la complicité aveugle de Samuel dont tu espérais chaque jour qu'il se rapproche du droit chemin. Celui ou tu te plaçais avec fierté et force. Il chuterait, tu en étais persuadée, et égoïstement tu ne voulais pas qu'il t'entraine avec lui dans le ravin.

— « Tu es un menteur Samuel..» Même prononcer son prénom te faisait du mal. « Tu as toujours menti, et là encore tu mens ! » Tu préférais le traiter de fabulateur plutôt que d'admettre une seule seconde qu'il puisse avoir raison sur des sujets qui mettaient ta faiblesse en avant.

Son visage se colle au tien, et dans un frisson, tu réprimais le plaisir qu'il te provoquait dans le dégout. Ses murmures te font succomber, alors que tu te colles un peu plus au mur. Dans un souffle saccadé, tu supplies presque. « Arrête, ne me touche pas... »  

Alors que tout ton corps criait qu'il en voulait plus.
Depuis combien de temps des mains ne t'avaient pas touché ? Depuis quand un regard ne t'avait plus désiré ? Il était temps de faire le deuil de ta relation passée.

Il te mettait à genoux rien qu'avec des mots. La vérité, seulement la vérité. Tu ne tremblais même plus face à ses cris de bête. Il était semblable à monstre que tu désirais ardemment dompter. Il ressemblait au destin sombre que tu avais décidé de choisir contre toute attente.
Mais pourtant, la lumière et l'ascension t'appelaient toujours, désespérément. Etait-il alors un jeu que tu t'imposais à toi même ?

— « Laisse moi, arrête je t'en prie ! Arrête de croire tout savoir ! »

Quand finalement il s'éloigne, tu reprends ta respiration, les mains plaquées sur tes oreilles pour ne plus avoir à supporter ses sifflements. Il t'agaçait, à réclamer que tu réclames, alors que tu souhaitais juste au fond de toi qu'il cède sous tes faux barrages, et qu'il prenne sans s'excuser. Tu avais besoin de sa brutalité passionnelle. Tu avais besoin de te sentir désiré à nouveau, amis tu étais trop fière pour le supplier. Alors tant pis, tu l'attraperais par toi-même, cet amour dégoutant qui te faisait trembler.

Tes mains agrippent son col et comme une reine tu t'élèves.

— « Ne me redis plus jamais quoi faire Samuel Hassan. Je suis aux commandes ici, c'est clair ? »

Tes yeux ne sont pas amoureux, mais envieux.
Tes lèvres chaotiques s'arrachent les siennes dans un baiser aussi dramatique que ta posture. Tes yeux pleurent ton royaume déchue, alors que tu embrasses le prince des ténèbres.
Tes doigts s'agrippent fébriles à la nature de ses cheveux et tu murmures comme le cliché d'héroïne que tu étais devenu.

— « Fais-moi mal. »