» daughters of anarchy || Fenry; game over

Lumos. Les paupières lourdes et les iris qui n’avaient pas eu le temps de s’habituer à la soudaine lumière eurent besoin de quelques secondes pour s’y faire.  Une ombre qui se déplace dans la nuit quand tous les autres ont rejoint un monde éloigné, un mode auquel tu n’avais pas accès cette nuit là. Les pas étaient inaudibles, la respiration se faisait plus que discrète tandis que la silhouette montais chaque marche. Les escaliers se firent de plus en plus nombreux mais le frémissement du téléphone dans la poche encourageait à continuer car il ne pouvait s’agir que d’une personne.
Alors les pas se firent plus rapide, pressée de la voir, parce que le sommeil était introuvable et que les pensées étaient trop présentes pour pouvoir prendre en considération l’idée de dormir. Des années à ses côtés et tu ne pouvais plus t’en passer. Les muscles étaient lourds, la fatigue était palpable, le spectre du sommeil voulait récupérer l’ombre mais l’envie de se promener et d’être accompagné était irrésistible. Et une seule personne était assez fiable pour ne jamais te laisser tomber dans ce genre de moment

L’éclat des cheveux roses attira l’attention, quelques secondes après ton arrivée face à la porte que tu étais dans l’incapacité frustrante d’ouvrir. Le bruit à peine perceptible qui confirmait l’arrivée de quelqu’un ne t’avait pas échappé et la seule raison pour laquelle tu n’eus pas peur de penser que c’était quelqu’un d’autre était que tu la connaissais au point de reconnaître le bruit de ses pas. La lumière se fit sur le visage de l’intrus avec un haussement de sourcil. Putain Fenry tu es aussi discrète qu’une licorne dans la salle de potion. Les pensées étaient exprimées avec clarté en sachant pertinemment qu’elle ne les raterait pas et dès que le regard scintillant croisa le tien, un sourire amusé lui fut adressé : une vraie équipe, peu importe les couleurs.

» Rassure-moi et dit moi que t’as pas oublié le mot de passe.

Le mot de passe fut murmuré tandis que le sourire satisfait sur les lèvres s’élargissait. Les habits glissèrent le long du corps avant que l’eau ne le submerge jusqu’au cou. Aucune once de pudeur ou de gêne ne vint troubler les gestes naturellement assurés. D’innombrables auraient probablement voulu être à ta place à ce moment là, détendue dans un bain aux côtés de Williams. Mais c’était toi qui y étais, et tu ignorais encore comment cela avait pu arriver si vite. Un genre de coup de cœur, irrésistible, car elle entendait les pensées qui avaient du mal à entraver les lèvres, les souffrances qui te tiraillaient et les peurs qui te hantaient. Et tu aurais dû détester cette présence incessante dans ton esprit mais la sienne était réconfortante, douce à travers cette idée que tu avais que quelqu’un savait tout de toi et qu’il restait tout de même à tes côtés.

Les genoux étaient contre la poitrine tandis que les mèches bleues caressaient les minuscules bulles d’eau brûlante. Une eau que tu préférais tiède, mais qui ne te dérangeait pas plus que ça. Car tu savais que Williams la préférait aussi chaude que les flammes. Un noble sacrifice, en effet.  Les doigts s’amusaient avec la mousse lorsque la vision de la meilleure amie se noyer comme un éléphant dans un bain traversa l’esprit. Un rire s’échappa alors de ta gorge et le regard quitta la mousse pour se poser sur elle. La réponse était évidente, la réaction aurait été rapide et habile : la rattraper avant d’avoir à la réanimer, de préférence. Mais l’ironie qui faisait partit de ton capital génétique te poussa à exprimer tes pensées d’une manière légèrement différente.

» C’est ça, compte sur moi. Qui ne rêverait pas d’être ton héro, Williams.

La mousse forma des formes, le corps frémit lorsque la question fut posée, celle qui voulait être ignorée. Mais elle voudrait savoir et le saurait de toute façon. Les épaules se haussèrent d’un air désinvolte pour tenter d’éviter la gravité de la réponse, préférant te protéger derrière une barrière invisible de sarcasme et de légèreté d’où s’échappèrent de fausses pensées que tu ne prononcerais pas à voix haute :  J’avais juste envie de prendre un bain et tu es capitaine donc tu as de la chance d’être Cap’ tu peux me voir me promener à oilp. Un sourire amusé traversa les lèvres avant que l’honnêteté ne reprenne le dessus. Il ne s’agissait plus de secret avec Fenry, seulement de confiance.

» Non en réalite, je pense aux vacances. Je n’ai pas envie de rentrer chez moi et ça me perturbe.  

Les cheveux bleus disparurent sous l’eau pour ne pas affronter le regard d’en face. Car tu ne voulais pas y penser, tu ne voulais pas de ce retour abrupte à la réalité et de cette famille saccagée. Le besoin d’oxygène se fit ressentir et le nez apparut hors de l’eau avant que tu oses de nouveau la regarder comme si tes mots étaient un lourd secret. Mais ils l’étaient, et elle savait autant que toi à quel point le sujet était sensible. Alors tu repensais soudainement à un événement qui illuminait ton esprit de mille feu et qui rayonna probablement autant que le sourire amusé qui étira tes lèvres.

» Et je pense au bal, bien sûr. Je voulais savoir ce que tu allais porter et quel cœur tu allais faire couler.

Un manque de réaction souligné par un silence de sa part fut suffisant pour que tu réalises à quel point elle te comprenait. Le sujet du divorce n’était pas à discuter, elle avait conscience des peurs qui ne te quittaient jamais et les détails n’auraient pas été agréables pour toi. La nuit aurait été plus longue, plus douloureuse, emplie de doutes et de craintes. Le sujet tomba donc à l’eau aussi rapidement que ta meilleure amie lorsque tu fis référence au bal de fin d’année. Les sourcils se froncèrent, surprise par une telle réaction de sa part ; toi qui t’attendait à ce qu’elle te hurle que son cavalier était déjà choisi et que sa robe était prête. Les doigts pleins de bagues vinrent frôler les lèvres pour cacher le sourire qui était venu les étirer : les choses ne se passaient pas tout à fait comme prévu et Williams semblait presque désespérée, une idée qui ne pouvait que t’amuser. Pensait-elle vraiment aller au bal de fin d’année seule ? C’était impossible.

Les cheveux roses réapparurent à la surface et ton rire cristallin envahit la pièce dès que les explications furent données. Un gâteau sur le buffet putain mais quel délicieux spectacle. Elle avait encore le temps de se faire inviter, rien ne pressait. Les paumes pleines de mousse, tu les tendis vers Williams avant de souffler dessus pour voir les bulles s’envoler, un mouvement qui se déroula au moment même où l’image de ton ex traversa ton esprit pour répondre à la question de ta meilleure amie. Prewett. Tu réagis par un simple haussement d’épaule en pensant à ton cavalier, contrôlant tes émotions et tes pensées pour que ta meilleure amie n’en sache pas plus que toi au sujet de ta relation avec lui. C’était un flou total qui recouvra donc l’esprit tandis que tu sifflotais intérieurement et que la voix prenait un air détaché particulièrement bien maîtrisé.

» J’y vais avec un ex. J’ai plutôt hâte d’ailleurs.  Mais si tu finis seule je lui dirais que j’y vais avec toi et oui je ferais les bougies sur tes épaules si ça peut te faire plaisir.

Les détails sur l’identité de la personne furent évités mais ton regard plongea dans celui de ton amie pour faire disparaître toute trace de doute en elle. L’assurance était un trait de ton caractère et tu n’allais avoir aucun mal à la lui communiquer si c’est ce que tu désirais. Le ton sembla plus ferme mais toujours aussi calme lorsque toute ta franchise reprit le dessus pour faire comprendre à la capitaine que rien ne pourrait jamais lui gâcher son bal de fin d’année tant que tu serais à ses côtés.

» Mais il n’y a pas de costume de gâteau sur un buffet, Williams. Il s’agit du bal de fin d’année. C’est impossible que personne ne t’invite, et même si au final tu es seule, je serais à tes côtés et tu seras tellement magnifique qu’aucun gars ne pourra regarder quelqu’un d’autre que toi… Enfin, à pars moi.

Un pouffement empli de fausse modestie t’échappa mais tu t’en foutais le moral de ta meilleure amie reposait probablement sur tes mots et tu ne comptais rien laisser tomber à l’eau. Il s’agissait toujours de la sauver avant que tout ne coule mais avec une touche personnelle.

» Alors reprend toi, et décide quelle robe tu vas porter parce qu’il n’y aura pas de costume de gâteau. Imagine juste tous les mecs en costard cravate ça va te redonner le sourire! Au pire si on s’ennuie, on se fera un classement des plus canons toi et moi ça te va? Je te parie que celui qui se fait appeler « Monsieur le directeur » se retrouve en première place.

Aucun respect. Tu fis un effort pour tenter de garder ton sérieux mais tu l’imaginais si bien que c’était peine perdue. S’il t’entendait tu serais probablement finie mais il n’y avait que Fenry alors tu t’en foutais royalement, tu voulais juste faire en sorte qu’elle reprenne un peu confiance en elle. Et quoi de mieux que de parler mecs pour ça.

Des images incessantes traversaient les esprits. De la soie, du satin, de la dentelle, les tissus d’une finesse incomparable et d’une beauté sans limite. Les tissus qui allaient probablement dominer la soirée du bal à travers des robes aussi somptueuses les unes que les autres. Les têtes allaient se retourner, les yeux s’écarquiller et la jalousie s’accumuler lors d’une soirée qui n’était créée que pour se montrer. Puis la robe rouge. Celle qui représentait bien plus qu’une couleur pétillante, profonde et pleine de promesse, celle qui représentait un sentiment bien plus fort que celui de porter la plus belle robe. Une étincelle de malice s’alluma dans les yeux d’un bleu de glace face à l’image de la robe qui représentait pour toi cette « robe rouge ». Jamais portée, jamais touchée, gardée précieusement pour un quelqu’un qui la mériterait. A tes yeux, personne pour l’instant, mais aux yeux de Williams… Si elle y faisait référence c’est qu’elle avait quelqu’un en tête et cette idée te fit passer l’ombre d’un sourire sur tes lèvres.

» Marché conclu, mais à qui est-ce que tu penses quand tu parles d’un gars qui t’intéresse? Tu attends l’invitation de quelqu’un en particulier?

Les mots avait été choisit avec soin pour ne pas la brusquer, tu n’avais aucune idée de qui ça pourrait être ni si la personne en question existait vraiment. La discrète référence à ton cavalier te fit lever les yeux au ciel. Il avait énormément compté pour toi à une époque et c’était toujours le cas. Les sentiments avaient été séquestrés dans un recoin introuvable de l’esprit compliqué dont tu étais dotée sans jamais vouloir connaître le fond des pensées. Ca t’arrangeait bien. Mais une tendresse assez rare venant de ta part caractérisait la nature de tes sentiments pour lui – aussi neutres soient-ils. Tu n’aurais jamais pu refuser son invitation parce que c’est celle que tu attendais. Tu n’aurais pas accordé à n’importe qui la possibilité d’être ton cavalier. C’était un rôle important à tes yeux et tu avais choisis le sang pur parce que tu savais qu’il ne te décevrait pas et que la soirée serait des plus agréables. Mais de là à mettre la robe rouge, il en était hors de question, l’idée n’avait même pas traversée l’esprit. Cependant, tu te doutais bien de ce que pensais Williams de ton cavalier.

» Parce que personne ne mérite la robe rouge mais Prewett est celui qui s’en rapproche le plus et puis il n'est pas si mal que ça, à vrai dire je le trouve même plutôt craquant -normal sinon je ne serais pas sortie avec lui. Enfin tu me connais, c’est à peine si je n’ai pas envie de m’enfuir en courant avant même d’aller au bal. Espérons seulement que je ne me dégonfle pas à la dernière seconde.

Un soupire discret avait quitté les lèvres et de minuscules vagues d’eau apparurent à la surface lorsque tu recalais ton dos correctement en une énième tentative de débarrasser ton corps de toute pression. Peut-être que tu allais déguerpir en courant au moment même où tu allais pénétrer la salle de bal et que Prewett se retrouverait seul. Mais tu ne pouvais pas lui faire ça. Jamais de la vie. Du moins, tu allais faire de ton mieux pour éviter que cela n’arrive mais peut-être que Fenry avait d’autres projets pour toi.

» Mais tu préfères que j’y aille avec quelqu’un d’autre, j’imagine?  

Le prénom chatouillait les lèvres et démangeait le bout de la langue. Il avait disparu en un éclair en laissant des centaines de particules rouges et dorées mais tout était trop flou, trop rapide, trop inexact pour que tu écoutes ton instinct. Mais tu le sentais, ce prénom. Tu aurais presque pu l’entendre si Fenry avait montré un signe d’hésitation, si un sourire peu commun avait étiré ses lèvres, si tu avais relevé un détail qui t’aurais mit sur la piste. Mais rien. Le vide. Alors l’étrange sensation de rater quelque chose d’important s’évapora avant même de s’être réellement installée pour te perturber. Elle ne garderait pas un prénom aussi important pour elle-même si elle en avait un en tête et cette illusion te rassura.

» Oh, je ne suis pas déçue. Et puis je me doute que tu ne vas pas tomber sur le gars qui mérite la robe rouge aux sous-sols par hasard.

La rationalité de ses mots au sujet de ta relation avec le sang pur te fit remuer dans l’eau. Ils avaient l’effet d’un calmant, rassurant, comme si l’idée qu’elle ne te reproche pas d’y aller aux côtés de quelqu’un avec qui tu aurais dû couper les ponts dès que les liens charnels et émotionnels s’étaient brisés. Mais il gardait une infime part de toi et ça te liait à lui, peut-être même à jamais. D’une certaine façon, tu savais que vous seriez toujours aussi proches car tu avais besoin de cette amitié rassurante que tu partageais avec lui et qui te prouvait qu’il ne te laisserait jamais tomber.

Mais les pensées de Fenry fusèrent et un sourcil s’arqua face à la tirade presque angoissée que ses lèvres prononçaient.  Les mots frôlaient l’ironie et le sarcasme mais tu connaissais assez ta meilleure amie pour savoir qu’elle n’avait pas voulu prendre ce ton là, raison pour laquelle ta voix se fit légère et dénuée de tout reproche lorsque tu pris le temps de lui répondre.

» Arrête de te taillader l’esprit, tu sais très bien ce qu’il y a dans le mien concernant Prewett et ça changera pas, t’inquiète on y va en tant qu’amis. Et de toute façon je passerai ma soirée avec toi si tu finis sans cavalier.

Le regard redoubla d’intensité pour confirmer que tu étais sincère juste avant que tu ne tendes la main pour attraper la serviette posée à tes côtés. Le corps ruisselant de goutte d’eau sortit du bain en quelques secondes avant de disparaître derrière la serviette désormais attachée autour de la taille. Tu te rassis sur le carrelage pour regarder de nouveau la Serpy avec un sourire malicieux.

» Tu devrais cesser d’attendre ton gars à la robe rouge et la mettre pour kiffer. S’il est aux alentours au moins il pourra pas te louper.