[EVENT #8] Neptune & Isaac (première partie)

Elle avait écouté les différents discours d'une oreille un peu distraite, le regard se baladant sur les élèves et un peu partout dans la salle à la recherche d'un quelconque signe de mauvaise augure. Neptune avait l'esquisse à demi-étirée, pour ne pas paraître si inquiète malgré qu'elle le soit réellement. Néanmoins, accrochée au bras d'Isaac, pouvait-elle seulement l'être ? Cela ne se faisait pas, et pourtant. Elle ne saurait empêcher ses yeux fatigués de la trahir, tandis que l'une de ses pensées d'adressait à Rachel qui ne pouvait être présente à cette soirée.

Peut-être que ça n'était pas si mal, finalement.
Ce gala elle ne le sentait pas si bien.

C'est une bonne idée, qu'elle avait pourtant assuré. Il leur changerait les idées, mais elle n'arrivait plus à effacer ses pensées. Il aura fallut ta main tendue vers elle pour la sortir de ses doutes, une invitation galamment énoncée pour la faire légèrement s'étonner.

« Oh, souffla-t-elle tandis qu'elle reprit pleinement ses esprits, bien sûr. J'accepte avec plaisir. »

Qui était l'idiot assez fou pour refuser une danse à l'un des plus beaux hommes de l'assemblée ? Une main vint se nicher dans la tienne doucement, tandis que l'autre emmenait ta coupe plus loin pour la reposer sur le buffet.

« Il serait dommage de la renverser, souffla-t-elle dans un sourire à demi-amusé tout en t'adressant un regard, allons donc danser, la soirée ne fait que commencer. »

Au son d'une valse lente vous dansiez en rythme à présent, étant dans les premiers à vous être lancé. Neptune avait du mal à comprendre pourquoi les premières musiques étaient toujours si douces cependant elle ne s'en plaignait pas, pouvoir ainsi danser, si bien accompagnée, restait l'un des rêves de n'importe quelle jeune fille. Même si le partenaire en question se nommait Isaac Andersen, et même si, actuellement, elle avait encore du mal à ne pas s'inquiéter. Elle ne se sentait pas si à l'aise ce soir dans ses hauts talons aiguilles, pourtant elle en avait l'habitude.

« Je ne suis vraiment pas la partenaire idéale, lâcha-t-elle doucement avant un bref soupir, je ne fais que m'inquiéter. Excuse-moi de ne pas te prêter autant d'attention qu'il le faudrait. »

Son regard avait fuit le tien pour observer ton épaule un instant, le sourire désolé et sincère affiché en guise de piètre excuse. Si seulement elle savait comment oublier de penser, cette soirée serait devenue bien plus parfaite.

« ... Tu le penses aussi ? avait-elle demandé tout en retrouvant tes yeux. »

Finalement, elle ne s'en étonnait pas tant que ça. Vous vous ressembliez sur bien des points, et elle ne saurait dire si c'était quelque chose qui lui déplaisait ou non. Seulement, pour cette fois seulement, tes paroles avaient le don de l'inquiéter plus encore car jusqu'à présent, son intuition ne lui avait jamais fait défaut. Et si vous aviez la même ? Si cette soirée virait au cauchemar, vous continueriez à faire comme si tout allait bien ? Vos mains l'une dans l'autre et vos corps dansants en harmonie ne lui avaient jamais parus plus réel qu'à l'instant. Elle tentait vraiment d'oublier ses craintes, Neptune. Pourtant ces dernières ne semblaient jamais bien loin. Jamais elles ne cessaient de la hanter.

Sa silhouette tournoyait doucement qu'elle n'attrape de nouveau ta main en terminant sa ronde. Pour une première fois, il fallait avouer que tu te débrouillais vraiment bien, Isaac, et elle aurait beau mentir il était évident que tu ne la laissais pas indifférente, toi non plus.

« Merci. »

Vous feriez quoi si vous aviez raison ?

« Tu devrais porter des cols roulés plus souvent, ils te vont bien, avoua-t-elle presque en riant. »

Bien entendu il lui était impossible de simplement dire qu'elle te trouvait à son goût dans ces habits, ce serait fort gênant et elle n'avait pas besoin de ça pour l'instant. Elle avait profité de ton regard perdu pour tenter de changer de sujet, s'accrochant à ce nouveau que tu lançais comme une moule à son rocher. Les galas à Poudlard ne lui rappelaient pas de bons souvenirs, mais au moins ils permettraient d'effacer le début de roseur sur ses joues, masquées par une jolie couche de fond de teint.

« Ça n'est pas que toi, confia-t-elle comme pour te rassurer en observant les élèves danser, j'ai toujours été très solitaire. À vrai dire, à part Patrick je n'avais pas vraiment d'amis. »

Elle n'en avait pas vraiment cherché, à l'époque. Tandis qu'elle se remémorait ainsi son passé elle songeait à quel point sa jeunesse lui avait filé entre les doigts. Sa vie toute entière avait été une catastrophe monumentale de sa naissance jusqu'à ce bal. Il y avait eu quelques moments où tout allait bien. Et puis il y avait eu ceux où plus rien n'allait. Celui où elle avait voulu s'ôter la vie resurgissait souvent en premier, comme pour lui rappeler sans cesse que son existence ne tenait qu'à un fil.

Un simple fil.
Une lame.
Un mot.
À rien.

« Mais j'ai eu un fiancé en dernière année, un garçon très bien d'apparence. Un Serdaigle. Vraiment très intelligent. »

Le ton de cette dernière phrase sonnait plus amer qu'elle ne l'aurait souhaité, tandis qu'elle arrêtait son explication quelques secondes le temps de tourner une nouvelle fois sur elle-même. Son sourire semblait s'être fané, la mélancolie aidant, alors que vos regards se captaient encore. Elle ne le vivait plus si mal à présent, même s'il était toujours difficile d'admettre que la blessure avait mit du temps à se refermer. Après tout elle s'accumulait sur des dizaines d'autres.

« Je l'ai surpris avec une autre quelques semaines après, il n'a rien nié. Et au gala de fin d'année ils dansaient ensembles, mais moi je n'ai rien fais d'autre que regarder, le rire qui suivit fut léger et un brin moqueur envers sa personne qu'elle jugeait tristement. C'était pareil presque tous les ans, alors je suppose que je n'étais pas si avenante non plus à l'époque. »

Au moins vous faisiez une belle paire d’asociaux tous les deux.

« Oh.. Ne le sois pas, ça remonte à loin. »

Elle n'avait pas relevé ton sourire, celui qui avait fait s'étirer un peu plus le sien une simple seconde durant, mais elle l'avait vu, tu sais. Il s'était gravé dans ses souvenirs comme une image rare qu'elle ne souhaitait pas oublier. Isaac Andersen le sourire aux lèvres, même léger, il n'y avait pas moins banal n'est-ce pas ? Doucement elle avait tourné, ne quittant ton regard que le temps d'une ronde délicate avant de se retrouver face à toi. Il y avait sur ses lèvres cette esquisse légère qui ne disparaissait pas, douce et amicale, à l'écoute du moindre de tes mots comme tu l'avais fais plus tôt.

Tu avais courtisé elle n'en avait jamais douté, n'y avait jamais réellement pensé en réalité -et elle se demandait Neptune, dans sa trop grande curiosité, elle imaginait la façon dont tu te comportais dans ces instants précieux. Cependant elle avait choisit de taire sa question pour la remplacer par une autre, bien moins gênante vu la proximité de votre relation.

« Tu ne voulais personne ? »

De la simple curiosité, tandis que vous dansiez encore. Et en suivant tes pas elle avait parfois l'impression d'un temps qui s'était arrêté. La musique était douce et l'ambiance chaleureuse, quelque part au fond d'elle, elle en venait presque à être heureuse. Véritablement heureuse. D'être ici, cette année, à observer tous ces élèves sans ne plus repenser à vos vieilles années d'étudiants.

Si toutes nos soirées pouvaient ressembler à ceci...
Elle n'avait rien répondu à cette éventualité, s'étant contentée d'acquiescer d'un faible hochement de tête des mots qu'elle ne saurait trouver plus vrais. Tout serait plus facile. Tout serait plus facile si seulement il n'y avait pas eu ce corbeau, si seulement personne n'en voulait à leurs vies à tous. Tout serait plus facile, si seulement. Elle n'avait jamais cessé d'espérer, Neptune, qu'un jour tout soit infiniment plus simple.

Le début d'un rire qui finit étouffé, elle s'était laissée guider au centre avec un plaisir non dissimulé. Rejoignant tes mains une fois encore, les doigts de l'autre se posant sur ton épaule doucement, elle n'avait pu s'empêcher de répliquer.

« Que ferait-on, si tout était plus simple, Isaac ? »

Que deviendriez-vous ?
Toi. Elle. Et tous les autres autours ?

Il n'y aurait plus d'inquiétude à avoir. Plus de menace à redouter. Plus d'ennemis à détester, mais vos passés dans tout ça ? Vos avenirs, Isaac ? Dans une trop grande réflexion Neptune s'était échappée, les iris glissants sur la manche de ta veste en pensant à cette facilité qui, au final, l'effrayait bien plus que la réalité.

« Danserions-nous ainsi ? »

Vous ne vous seriez jamais réellement rencontrés, pas vrai ?

Je ne sais pas.
La vérité c'est que la réponse n'était pas si compliquée, et c'est parce qu'elle en avait soudain conscience qu'elle n'avait pas relevé. Il n'y avait plus rien eu, après ça, seulement vos corps dansants et la musique qui les rythmait. Les minutes s'étaient écoulées, elle avait finit par fermer les yeux quelques instants, de longues secondes passées à faire au mieux pour profiter. Se laisser aller, pour une fois. La peur ne devrait pas vous empêcher de vous amuser, même un peu -et c'est qu'avec ses inquiétudes elle avait peur de t'avoir ennuyé. Elle n'avait jamais été très douée pour s'exprimer, Neptune.

Ses iris se découvrirent tandis qu'elle les posait sur toi, un très léger sourire venu étirer ses lèvres comme pour répondre à ta demande.

« Avec plaisir, s'était-elle enthousiasmée. »

Danser finissait toujours par fatiguer, sur le moment elle ne s'en était pas rendu compte mais à mesure des secondes elle avait commencé à sentir ses pieds se mettre à chauffer. Elle avait soif. Alors elle t'avait suivi avant de prendre deux coupes pour t'en offrir une. Un tintement rapide, un signe de tête poli -de vieilles habitudes qui revenaient par instinct- puis elle avait prit une gorgée de ce délicieux champagne, comme une libération.

Neptune laissa son regard divaguer sur les silhouettes du personnel et des élèves présents dans la Grande Salle. Elle s'était autorisé un soupir en voyant à quel point tout semblait parfait.

« Tout le monde semble s'amuser, elle avait quitté des yeux les Scamander pour les poser sur toi, est-ce que tu parviens à profiter un peu, toi aussi ? »

Au moins un peu.
Puis elle avait finit le reste de son verre d'une traite, avant d'observer son verre vidé bien trop vite à son goût. Ils étaient trop petits. Ou bien était-ce le champagne qui était bon pour qu'elle le boive ainsi ? Ça la laissait perplexe.

« Ça se boit tout seul... Hum. Il est drôlement bon. »

En pleine réflexion avec elle-même.

Son visage s'était étiré en une moue un peu embêtée et sincèrement désolée tandis que tu lui expliquais ton ressenti. À vrai dire elle ne pouvait que comprendre, elle-même avait beau faire quelques efforts pour se détendre, elle n'y parvenait pas totalement. Il était difficile de se sentir bien dans un climat pareil mais elle espérait encore que tout ceci ne soit qu'un cauchemar, un mauvais rêve qui s'en irait dès qu'elle aurait bu son verre de champagne ou que minuit aurait sonné. Seulement à minuit c'était la fin du rêve et le retour à la réalité, rien ne changerait étant donné qu'ils ne l'avaient jamais quittée.

C'est vrai qu'il n'est pas mauvais, et elle avait saisit un second verre, s'apprêtant à le boire d'une traite pour se changer les idées avant que le son de ta voix ne capte toute son attention. Une œillade fatiguée et un sourire légèrement perplexe qu'elle esquissa en faisant tournoyer doucement l'alcool dans son verre, se laissant hypnotiser par les bulles et sa jolie couleur dorée.

« Je n'irai pas jusqu'à dire que je suis heureuse, mais ça fait du bien il est vrai. Seulement... »

Ces semaines à osciller entre des journées chargées et des soirées aux côtés de Rachel et son enfant étaient épuisantes mais quelque part elle le vivait bien. Elle venait en aide à des personnes qu'elle estimait, elle faisait un travail qu'elle appréciait -quelque chose de gratifiant dans sa vie, pour une fois. Pourtant tout semblait encore se gâter et toute cette tension l'épuisaient. Parfois, elle se demandait encore comment elle faisait pour rester debout, et puis ses iris parcouraient le salon pour y trouver ta silhouette, Isaac, et elle réalisait qu'elle n'était pas toute seule à vivre ça. Vous n'étiez pas les seuls mais déjà beaucoup trop.

Cette soirée lui était plaisante autant qu'elle lui laissait un goût amer en bouche. Vous étiez là, tous les deux, Orphan et Aileen dansaient et les élèves pour la plupart s'amusaient. Ça n'était que la surface d'un iceberg qui bientôt se briserait. Un mauvais pressentiment qui l'empêchait de se détendre totalement.

« Je ne peux m'empêcher de penser à Rachel et..., elle hésita un instant, à tout ce pétrin. C'est difficile d'être complètement heureuse dans ces conditions.. »

Après ces mots qu'elle jugea légèrement embarrassants, elle bu quelques gorgées de sa coupe de champagne, veillant à ne pas trop en boire pour pouvoir garder l'esprit clair. Que cette soirée vire au fiasco ou non, tu restais son partenaire et elle ne voulait pas te délaisser en finissant totalement ivre et incapable de marcher. Cette pensée lui arracha un sourire tandis qu'elle secouait légèrement la tête en guise de négation. Il n'en était définitivement pas question.

De nouveau son regard avait cherché le tien, sa silhouette suivant le mouvement pour te faire face alors qu'elle reposait son verre entamé sur le buffet.

« M'accorderais-tu une faveur, Isaac ? »

Une faveur ?
Qu'allait-elle inventer encore... Les mots franchirent seuls la barrière de ses lèvres mais elle ne s'en formalisa pas.

« Dansons encore, et tente de te détendre vraiment. J'en ferai de même, toi comme moi en avons besoin, termina-t-elle en t'adressant un infime sourire. »

Un besoin oui, plus qu'une volonté réelle, sans doute.

Tu avais lâché ce rire qui l'a décontenança un instant, avant que tu ne t'excuses et qu'elle ne te dise que ce n'était rien. Au contraire même, et cette demande, en réalité, l'avait rendue un peu fébrile sans savoir si c'était de gêne ou de cet alcool qui lui montait à la tête. Alors, tu sais, elle était ravie de pouvoir retourner danser même si ça n'était que quelques minutes, elle ne voulait plus que danser pour oublier. Qui vous étiez, où vous vous trouviez, les conditions de cette alliance également. Elle espérait pouvoir reprendre le monde de zéro, Neptune, sans se douter que le monde se préparait à un nouvel assaut.

Dans tes bras, elle avait fermé les yeux, quelques secondes durant lesquelles elle s'était acharnée à faire le vide dans sa tête trop embrouillée mais tout était si compliqué. Finalement, même si elle essayait, elle doutait pouvoir y arriver. Au moins elle était plus détendue, c'était déjà ça.

« Au fait, je ne t'ai pas remercié, Isaac. »

Les minutes avaient passées, pas si nombreuses, peut-être une dizaine à peine lorsque ces paroles étaient sorties de nulle part. Neptune avait sourit tout en captant tes yeux.

« Pour cette soirée, continua-t-elle. Alors merci, je passe réellement un bon moment grâce à toi. »

Malgré tout, oui.