Quand l'habitude est écartée et que quelqu'un est tiré de son cocon [Ft. Vanille Orfeo Marchisio]

Avec le temps, elle était devenue experte en la matière. Atténuer les dissonances émotionnelles des gens. Ces émotions désagréables auxquelles elle ne pouvait échapper. Il y a longtemps maintenant qu’elle avait appréhendé cette capacité qui était la sienne ainsi que les tenants et aboutissants de sa condition d’empathe. Parfois, les gens s’apaisaient rien que par sa simple présence… ce qui était un phénomène aussi curieux qu’agréable, mais assez rare cependant.

Et parfois, Vanille pouvait jouer avec les émotions des gens. Apaiser les maux ou bien augmenter le volume d’une émotion négative, comme à l’instant avec Jonas. Elle l’avait agacé, poussé un peu pour finalement le calmer… tout cela en cernant un petit peu le personnage qu’il était. Sa curiosité n’était pas mal placée ; mais la sorcière avait toutefois du mal à concevoir qu’on puisse prendre les moldus pour un danger.

L’histoire ne jouait pas en leur faveur il est vrai… mais Vanille en savait aussi sur l’historique des sorciers, les crimes de certains… il n’y avait rien de remarquable. L’Homme, qu’il fût doté de pouvoir magique ou pas, fut capable de commettre des atrocités. Impossible de se targuer d’avoir eu une histoire sans conflit. La vérité, tout le monde la connaissait. C’était au tour des générations futures de faire en sorte que tout cela ne se reproduise pas. Au tour de Vanille d’éduquer ses semblables ainsi que les moldus. Et elle remplissait son rôle avec ferveur.

Une passion qui rebutait certains, qui captivait les autres. Difficile d’avoir un avis totalement neutre sur la question que tout le monde se posait à Poudlard : que faisaient les cracmols et les moldus ici ? Et Vanille avait la réponse, n’hésitait pas à le crier sur tous les toits : ils faisaient partie de ce monde… au même titre que les animaux, les créatures magiques et tout ce qui s’en suivait. La moindre forme de vie sur cette terre n’avait pas été placée ici par hasard. Il y avait forcément une raison.

Pour en revenir à Jonas, celui-ci s’était montré compréhensif. Sans doute que le fait de savoir avec certitude que Vanille avait la ferme intention de répondre à ses questions avait joué. Le gamin montrait là tout son discernement, la sorcière aux cheveux cendrés savait que celui-ci n’était pas stupide… il le montrait une fois de plus, pour son plus grand bonheur.

L’enseignante le ressentait : ce cœur qui s’apaisait, cette satisfaction. Jonas semblait reconnaissant envers sa professeur. Visiblement, la question des moldus semblait le tarauder… chose tout à fait compréhensible. Néanmoins, Vanille ne lui avait pas posé la question directement… et maintenant qu’elle était avec lui, ce fut sans doute le meilleur des moments pour lui demander ce qu’il en pensait. Après tout… il était dans de bien meilleures dispositions que tout à l’heure.

Croisant les bras, la demoiselle prit une légère inspiration, puis reprit la parole, relançant alors la discussion :

— Chiant, je ne sais pas, mais impatient, ça oui. Toutefois, cela prouve que la question qui reste en suspens te taraude. Beaucoup de monde à Poudlard se la pose, certains ont un avis bien tranché, d’autres restent plus neutres. Je viens de m’apercevoir que je n’ai jamais eu ta réponse, alors on va gagner du temps, je vais te le demander maintenant. Les moldus et les cracmols à Poudlard, qu’est-ce que tu en penses ? Plutôt bonne ou mauvaise idée ? Tu penses que seuls les sorciers ont leur place dans l’univers de la magie ? Ou bien… penses-tu comme moi que tout le monde peut avoir sa place ?

Son avis à elle, il était tranché. Elle ne comptait pas l’altérer. Jamais. Ses convictions ne fléchiraient pas. Jamais. Peu importe ce qu’il pouvait se passer. Mais pour une fois, elle souhaitait confronter son avis à celui d’un autre. Pour une petite expérience.