Les samedi matins restent toujours les mêmes. Se lever pas trop tard, mais pas trop tôt. Prendre une douche. Partir pour l’entraînement de quidditch et se faire hurler dessus par Soleil et Béring. Reprendre une douche. Echanger mon équipement sportif pour mes plumes et parchemins et me rendre à la bibliothèque pour essayer d’étudier et de faire mes devoirs pour profiter du reste du weekend avec Beckett - qui lui n’aura de toute façon pas fait ses devoirs. Il me suppliera de le laisser copier sur lui et exceptionnellement, depuis Janvier, je ne me battrais pas pour l’aider au lieu de le laisser copier….Beckett….à cette heure-ci il doit encore dormir après avoir trop regardé de trucs sur le net hier soir.
La bibliothèque n’est jamais remplie le samedi matin. On retrouve le calme paisible des élèves studieux qui préfèrent profiter des rayons du soleil à travers les croisillons et les vitres épaisses. Ceux qui préfèrent le parfum entêtant des vieux manuscrits dans leur lente décomposition. De la musique se diffuse à un volume bas dans mes oreilles. D’habitude ça m’aide à me concentrer, mais je suis distrait ce matin. Les mélodies chill m’emportent et me bercent vers d’autres horizons. Elles me rappellent mes rêves tourmentés. L’image d’un Beckett innocent et endormi s’impose parfois à moi. J’aimerai pouvoir l’y rejoindre, trouver refuge dans ses bras. J’aimerai pouvoir me débarrasser de cette culpabilité qui me colle à la peau, qui me colle au coeur. Je peux prendre autant de douche que je veux, ça ne part. Ces souvenirs...j’aimerai les emprisonner dans une bulle de verre et les envoyer vers les abysses de mon subconscient. Mais ils remontent toujours à la surface. C’est le prix amer à payer quand on a une conscience.
Ma plume s’agite alors que je dessine des arabesques élégantes sur le bord de mon parchemin. Je suis distrait. Je ne dors pas bien. J’ai beau me répéter 1000 fois que je suis sûr de moi, que j’ai pris la bonne décision, mon esprit malade revient sans cesse à ce moment. Il s’impose, remplit tout l’espace de mon esprit dès qu’il est inoccupé. Et surtout il anticipe le désastre à venir. Mon estomac se noue automatiquement et un soupir s’échappe de mes lèvres. Mon regard se repose ensuite sur la phrase que j’ai écrite avant de la rayer et de reformuler. Je passe une main sur mon visage et j’essaie de me remettre plus sérieusement au travail. Au milieu de ma phrase, j’ignore le bruit sourd de la porte qui s’ouvre et se ferme. Mais quand je relève les yeux quelques minutes plus tard, c’est une silhouette familière que je découvre dans mon champ de vision.
Installé un peu plus loin, il semble étudier paisiblement, la tête docilement penchée sur son travail. Mon regard se perd un instant sur ses cheveux châtain. La lumière les caresse comme les doigts aimants d’une mère et les éclabousse de reflets dorés. Il a beau être un semi-vampire, il reste une personne qui appartient au soleil, à la chaleur. Il a l’air sage et sérieux. Je l’ai à peine vu cette dernière semaine, même avec ce prétexte idiot de devoir lui rendre ses notes de DFCM. Je m’y attendais. Je n’étais pas vraiment optimiste, à sa place, je ne voudrais plus avoir affaire à quelqu’un comme moi. Mais il avait tenu sa promesse de ne pas me créer d’ennui. Lui aussi il portait ce secret sur les épaules. Sur ses grandes épaules. Même si ça défiait toute logique de préservation, même si je pouvais comprendre et lui pardonner si ce n’était pas le cas, j’espérais toujours être capable de recoller les morceaux entre nous. De retrouver cette complicité. Perdre quelqu’un comme Ethan, c’était comme perdre la lumière du soleil ou le goût du sucre sur sa langue.
Je ne sais pas s’il est capable de percevoir mon regard sur lui où s’il a simplement relevé les yeux à ce moment précis mais notre regard se croise. Busted. Je lui adresse un léger sourire et un geste amical de la main pour le saluer. En temps normal je me serai directement déplacé pour aller étudier près de lui. Mais voilà, j’ignorais ce qui restait des vestiges de notre amitié. Mais peut-être qu’avec du temps et de la persévérance, les liens que nous avions rompus pourraient se renouer.
Dernière édition par Bertram Godfrey le Ven 8 Fév - 21:20, édité 1 fois
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Re: Before I lose my mind again Mer 6 Fév - 18:34
L’un des nombreux désavantages qu’il y avait à vivre à Poudlard lorsque l’on était quelqu’un comme moi, c’était bel et bien que, contrairement à mes camarades, il m’était impossible de faire la grasse matinée. Non seulement mon oreille fine me tirait du soleil prématurément, mais la routine voulait que je quitte rapidement le dortoir pour mon détour quotidien à l’infirmerie. Certes, un esprit moins pratique, ou moins occupé, aurait pu retourner faire la sieste après, mais ce n’était pas mon cas. Deux DEMA ça ne se prête pas aux loisirs et à la paresse. Je m’étais donc résigné à aller à la bibliothèque, le sac emplit de livres et de notes, tasse de voyage lapin, et opaque, à la main, merci Gus. C’était une bonne solution pour boire en toute impunité, sans craindre de dégoûter quelqu’un de bon matin.
Je fus accueilli sur les lieux par le fumet caractéristique des vieux livres, cette odeur de pages poussiéreuses dont je ne me lassais jamais. Avec cela venaient le grattement tranquille de la plume sur un parchemin et les bruits fugaces de discussions à voix basse. Peut-être pas l’idéal, mais au moins l’endroit n’était que peu fréquenté à cette heure, ce qui minimisait l’ampleur des distractions. Je pris sagement place à l’une des tables, ne réalisant qu’une fois assis que la chaude lumière du soleil me glissait sur le dos, m’enveloppant telle une couverture rassurante. Quelle sensation agréable. Je me demandai distraitement si les vampires s’inscrivaient dans la famille des bêtes à sang froid, mais chassai ces divagations pour mieux m’installer. Au programme : rattraper mon retard en DFCM. J’avais manqué un cours de façon délibérée, lorsque la perspective d’y croiser Bertram s’était fait trop difficile. Puis j’avais nié qu’il en était la cause, profitant de cette absence volontaire pour avancer sur d’autres matières. Parce que tant que je bossais, au fond, ce n’était pas plus mal.
À présent, c’est en autodidacte que j’allais devoir absorber la matière, m’aidant des notes que m’avaient confié le Serdaigle en personne et de notre manuel. J’alternais entre les deux, imaginant le monologue de notre enseignant au rythme de l’écriture élégante du Serdaigle. Les lettres étaient élancées, raffinées et possédant une certaine qualité quasi artistique, si ce n’est qu’elles manquaient de laisser-aller. Peu à peu, c’est sa voix que j’imaginai, leur prêtant le timbre qui convenait selon l’angle que prenaient les lettres, les soulignements ou les encadrements. Je n’interrompais son récit que pour ajouter une rare annotation, presque tenté de m’excuser pour l’avoir coupé dans son élan. C’est qu’il ne chômait jamais sur les notes de cours. J’avais manqué celui ci sans avertir, sans rien lui demander, et pourtant Bertram avait naturellement fait ce qui était habituel. Le corbeau avait investi le temps qu’il fallait pour me recopier ses notes, y imprégner son code de couleurs, ajouter les pages pertinentes du manuel pour me permettre de compléter l’information. Depuis que j’avais commencé mes DEMA, depuis que nous avions commencé à nous parler, combien d’heures au total avait-il passé à me retranscrire des notes ? Combien de fois m’avait-il filé un coup de main ? C’est dommage que tu ne puisses te voir comme je te vois, peut-être pourrais-tu enfin réaliser toute la bienveillance dont tu sais faire preuve.
Je me forçai à marquer une pause. Impossible, je n’allais arriver à rien à ce rythme. Comment pourrais-je assimiler la matière si la seule chose qui me tournait en tête était l’auteur de ces notes ? Soupirant, je relevai les yeux, prêt à me tourner vers la pièce m’entourant dans l’espoir que ce qui s’y trouvait me permette de me nettoyer l’esprit. Comme de se nettoyer le palais, si ce n’est que le résultat ne fut pas du tout celui escompté. Difficile d’oublier quelqu’un qui était en fait assis dans son champ de vision. Pire encore si ce même individu était justement en train de vous regarder, lorsque vous aviez relevé la tête.
Une bouffée de chaleur m’envahit sous la surprise, ou peut-être était-ce la faute de l’astre solaire qui n’avait pas cessé de déverser sa lumière contre mon dos ? Au moins, il m’a souri. Et envoyé la main. Ça me fait esquisser un sourire en coin, détourner le regard avec une expression à la fois soulagée et découragée. Ce running gag aura-t-il un jour une fin ? Pour l’instant, je suis prêt à accepter que non, car cela signifie aussi que Bertram est assez à l’aise pour me saluer. Pour me sourire. J’avoue que c’est une agréable surprise, moi qui ignorais si j’aurais un jour la chance de lui parler à nouveau comme à un ami. Ce n’est pas tout ce que mon cœur aurait désiré, mais ça suffit amplement à me confier une expression de bonheur. Nous pourrions en rester-là, je pourrais tout à fait rebaisser les yeux, continuer à travailler. Lui aussi pourrait le faire. Mais non. À croire que nous attendons le Messie. Ou simplement la permission de ne plus être si loin l’un de l’autre.
Alors je me dévoue. Je rassemble mes notes de sortes de lui faire de la place, si jamais il décide de venir s’installer. Peut-être que ça ne l’intéresse pas, qu’il n’est pas prêt à ça ou qu’il n’en a pas envie. Peut-être que je vais simplement me ridiculiser ou causer un malaise. Ce qui ne m’empêche pourtant pas de relever vers lui un regard amical où se mélangent inquiétude et espoir en une saveur qui ne peut ressembler qu’aux appréhensions des cœurs amoureux.
Bertram Godfrey
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Re: Before I lose my mind again Mer 6 Fév - 21:56
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Mon geste était timide, mais pas suffisamment pour passer inaperçu. Ses pupilles m’évitent rapidement mais le sourire ancré aux coins de ses lèvres le trahit. Le salut idiot à la Jason Atherton fonctionne toujours à ce que je vois. C’est qu’il y a de l’espoir. C’est quelques kilos en moins dans ma cage thoracique de savoir qu’Ethan peut encore sourire de mes conneries et qu’il n’a pas fait une croix sur l’égoïste minable que je suis. Enfin je crois. Le voilà qui range ses notes. Il ne va pas prendre ses affaires et partir, si ?! Ce léger sourire qui s’était faufilé sur mes lèvres s’efface en même temps que le poids s’écrase de nouveau contre mes côtes. Est-ce que je pourrais lui en vouloir de m’éviter ? Non. Je ne pouvais pas. Je n’avais rien à revendiquer.
Est-ce que cette sensation allait finir par disparaître un jour ?
Mais son regard éclairci par la lumière se repose vers moi : direct et honnête. Deux éclats de ciel d’été, sans nuages aussi acérés que des pointes de flèches. C’est sa façon de m’inviter. J’hésite un instant mais après ce que j’avais fait, si j’avais l’opportunité de pouvoir me faire pardonner et de régler les choses, il serait complètement idiot de ne pas la saisir. Après tout, c’est clair entre nous. Il sait ce que j’ai fait, de ce crime dont il est le complice. J’aime Beckett. Je suis avec Beckett et il le sait. Mais avec un peu de chance et de délicatesse on pourrait probablement surmonter cet “incident”, non ? Utiliser notre magie pour réunir la terre et combler cette fissure qui lézarde les murs. L’amitié, ça demande du travail et j’ai tant de choses à me faire pardonner.
Je rassemble rapidement mes affaires. Choix stratégique, je m’assieds en face de lui. Pas question de le tenter ou de jouer avec son petit coeur de poufsouffle. A partir de maintenant je serai sage. Je serai docile. Pour Ethan et pour Beckett. Je veux être capable de les regarder tous les deux dans les yeux sans avoir l’impression de mourir, sans avoir l’envie de disparaître. Je déploie mon matériel et croise nerveusement mes chevilles vers l’arrière de ma chaise. Je lui adresse un léger sourire et mon regard retombe dans mon travail. Qu’est-ce que je pouvais lui dire ? Comment ça va ? Oui, ça ressemblait à un bon début. Mais s’il décidait de me répondre honnêtement que ça n’allait pas ou d’en profiter pour me faire un peu la morale ? Et s’il me retournait la question ? Voilà, ce que je craignais le plus venait de se produire. J’avais envie de communiquer avec lui, je ne savais juste pas comment le faire sans que….Merde, j’avais vraiment tout niqué, n’est-ce pas ?
Mon regard s’enfuit vers ma feuille avant de se reposer sur ce qu’il étudie. Je reconnais mes notes. Voilà qui me réchauffe un peu le coeur - au moins il ne les a pas juste acceptées pour les brûler ou les jeter à la poubelle. Sans mes écouteurs le silence de la pièce me paraît assourdissant, bien que parasités par ces petits bruits insupportables de pages qui se tournent, de plumes qui grattent sans compter les occasionnels éclaircissements de gorge qui laissent deviner une future rhino-pharyngite. Fantastique.
Je finis par lui demander à voix basse :
Ca te va ? C’est compréhensible ?
Parler des notes et des cours ça me semblait plutôt safe comme sujet non ? Mais ce n’était apparemment pas du goût du serpentard un peu plus loin sur la table qui s’éclaircissait la gorge - mais pas au hasard. En nous fixant d’un regard noir. Okay. J’ai compris. Je retiens un soupir et lève les yeux au ciel.
Moron.
Je le pense très fort. Dommage qu’Ethan ne soit pas un peu légiliemens. Pour lui j’ouvrirai les portes là tout de suite qu’il sache ce qui se passe dans ma tête et pour qu’il puisse m’aider. Ma main, en face de la sienne gratte furieusement le papier. Gaucher et droitier face à face, c’est ce que ça donne. Sur mon parchemin brouillon déjà parsemé de multiples ratures je note :
Crétin.
Et je commence à dessiner des enjolivures autour du C. Ca a le mérite d'être relaxant comme thérapie.
C’est un risque que je prends, de l’inviter. Il pourrait tout à fait refuser, tourner les talons et partir. Lorsqu’il se lève de son siège, le doute est permis. Je sens mes épaules se tendre, ma mâchoire se crisper. Mais il ne s’éloigne pas. C’est de justesse que je retiens un soupir de soulagement, quand Bertram prend place face à moi. J’hésite à prendre la parole, à le saluer ou que sais-je encore, mais me retiens de le faire. Au lieu de ça, nous restons emmurés dans le silence et, alors qu’il baisse les yeux sur son étude, je fais docilement de même. Évidemment, je n’arrive à rien. Mes iris ont beau balayer la feuille du regard, je regarde les mots sans les comprendre ou même tenter de le faire. J’aimerais prendre le risque, l’épier à la dérobée, mais je risque de le mettre mal à l’aise, si je suis trop insistant. Alors je me retiens, je reste sage, parce que c’est la chose à faire. En attendant, je peux toujours me concentrer sur le bruit de sa respiration, profiter de sa présence. Aussi ridicule que ce soit, je ne peux m’empêcher d’être apaisé, détendu. Serait-il mal d’admettre que sa compagnie m’a cruellement manqué ?
Le bleu brise le silence le premier, me demande si ça me va, si tout est compréhensible. Il me faut quelques instants pour comprendre qu’il fait référence aux notes que, d’un point de vue extérieur, je suis en train de consulter. Bertram ne peut pas se douter que je pense à lui depuis tout à l’heure et heureusement. Je lui retourne donc un sourire et m’empresse de le rassurer en un murmure.
« Bien sûr. Elles sont— »
Impeccables, comme toujours. Mais il y a un Serpentard mécontent pour me couper dans mon élan. Nous nous tournons vers lui à l’unisson pour découvrir son regard noir. Tss. Pour qu’il se prend-t-il celui-là ? Je veux bien croire que ce soit une bibliothèque, que l’on doive rester silencieux pour ne pas déranger les gens, mais là c’est lui qui fait intrusion. Il y a des jours, pratiquement des semaines, que nous ne nous sommes plus vraiment adressé la parole et, maintenant que nous en avons l’occasion, on doit se taire pour ne pas déranger ? C’est là que l’on voit l’effet que Bertram exerçait véritablement sur moi.
Curieux, je remarque son regard qui se lève au ciel et, après ça, l’intensité avec laquelle il écrit. J’incline la tête sur le côté, pour mieux lire et découvrir… Crétin. Il n’y a pas à dire, ça m’amuse. Sans compter que ça m’impressionne, d’une certaine façon. Je me souviens de l’une de nos conversations, il y a quelques mois maintenant. Bertram qui avait fini par m’avouer que certaines personnes lui paraissaient inférieures, quelque chose de ce genre. Qu’il n’était pas aussi gentil et mou qu’il ne le laissait paraître. Et maintenant il se permettait de traiter un autre élève de crétin. À l’écrit, certes, mais c’était sorti de sa tête. Ça s’était rendu jusqu’à moi et ce n’était rien de grave ou de catastrophique. Ça ne faisait pas de lui une mauvaise personne et ça ne le faisait pas descendre dans mon estime. Mieux encore, ça m’inspira. Tu vas voir, Bertram, tu n’es pas tout seul à pouvoir jouer à ça. Tu as le droit de ne pas aimer tout le monde, t’es humain toi aussi.
Gobshite
J’ai dû allonger le bras, entrer dans son espace pour aller ajouter, à côté de sa propre insulte, celle qui vient de me traverser l’esprit. Bien sûr, j’ai fait un effort pour sortir ma plus belle écriture du dimanche, même si je ne peux cacher que l’un de mes deux DEMA soit la médicomagie. Mon méfait accompli, je ne peux m’empêcher d’arborer un sourire aussi fier que taquin et peut-être un peu immature aussi. C’est pas le moment de rire, déjà qu’on s’est fait regarder de travers pour avoir parlé, mais j’ai du mal à me retenir et je pousse le vice jusqu’à guetter une réaction de notre cher ami le serpent. Oups, j’ai pas dû être assez subtil parce que son regard mauvais croise le mien. Que faire ? Il n’y a qu’une bonne solution voyons : lui envoyer la main.
Bertram Godfrey
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Re: Before I lose my mind again Jeu 7 Fév - 11:58
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Un silence religieux règne en maître dans ce temple de la connaissance. D’ordinaire ce silence est apaisant, un moment de calme dans un cloître aux adolescents bourdonnants qui, de toute évidence, n’ont pas encore appris à régler le volume de leur voix. Mais ce silence entre nous résonne haut et fort comme un échec de ma part. Incapable de me connecter, de trouver la bonne approche pour une conversation fluide et amicale. C’est de ma faute si je trébuche sur les sujets les plus simples. Ethan a l’air plutôt calme et serein - pas la moindre once de reproche dans son regard ou dans son attitude. Je me souviens encore du ton métallique de ses mots. Je lui avais laissé de l’espace - j’en avais eu besoin aussi pour ranger le bordel que j’avais mis dans ma tête. Mais chaque jour qui s’écoulait sans l’apercevoir, je craignais qu’il finisse par réaliser que je n’avais aucune valeur - même pas comme ami. Il pouvait clairement se passer de moi. Chaque jour où il m’évitait, je réalisais j’avais pu blesser deux des personnes que j’aimais le plus au monde. Je regrettais cette situation, de tout mon coeur et je ne savais pas quels outils employer pour réparer mes erreurs, si seulement c’était encore possible.
Peut-être que c’était juste du temps.
Son sourire honnête me fait l’effet d’un filet d’eau chaude qui s’écoule entre mes omoplates. Si seulement il n’était pas interrompu par un serpentard qui pour une fois avait décidé de fréquenter la bibliothèque. Stressé, mon gars Peu importe. Je sais qu’il a raison et qu’à sa place je réclamerai aussi ma dose de silence quotidienne….C’est juste que je l’aurai fait plus poliment et j’aurai attendu un peu. Peu importe, je resterais silencieux à faire semblant d’étudier un peu. La fatigue de mon sommeil troublé ajoutée à celle de l’entraînement ne me permet pas d’optimiser mon efficacité de travail. Tant pis. Je préférerais nettement travailler sur. Son sourire amusé et chaleureux comme un rayon de soleil me remplit d’espoir. Peut-être que je n’ai pas tout brûlé avec lui. Ethan est toujours si honnête, il ne sourirait pas pour me faire plaisir. Il ne m’inviterait pas à le rejoindre s’il ne le pensait pas. Et il ne dirait pas qu’il ne voulait pas me perdre si ce n’était pas ce qu’il voulait dire. Moi non plus.
La tête ailleurs, distrait ma main dessine des enjolivures et des arabesques autour des lettres. Jusqu’à ce que la main du poufsouffle entre dans mon champ de vision. Hm ? Je le laisse faire, curieux. Il dessine des lettres, un message et mes lèvres s’étirent en un sourire espiègle avant de relever les yeux vers lui, les sourcils haussés en signe de surprise. Tu connais ce genre de mots, Ethan ? Je suis choqué, moi qui croyais que t’étais un élève modèle… Personnellement ça fait longtemps que j’ai pas vu une insulte aussi colorée. Je croise son regard d’opale, fier et pétillant de malice à la fois. On est deux idiots à s’amuser d’une connerie pareille. Deux gamins. Le coeur léger. Je remarque que son attention se pose sur le râleur mécontent et son geste de la main ressemble à rien de plus qu’à un geste de provocation. Encore mieux qu’un doigt d’honneur.
Ca fait un moment que je ne me suis pas senti comme ça. L’envie de rire qui éclate, qui rebondit en moi alors que j’éprouve des difficultés à la retenir. Le coude posé sur la table, mon poing négligemment posé contre les lèvres, comme si je réfléchissais, je retiens un éclat de rire. Mes épaules sont secouées pendant un instant et je repose docilement ma main sur la table, retroussant les lèvres en fuyant son regard. Il va me faire craquer c’est sûr. Je tourne la feuille de 90 degrés, qu’on puisse mieux lire et écrire. J’écris donc à la suite :
Pretty accurate.
Si je pouvais dessiner, j’accompagnerai bien ça d’une illustration mais mes compétences se limitent aux runes et au stick figures. Je m’avance en me disant qu’Ethan n’a pas l’air studieux aujourd’hui non plus. Il a ce côté dissident et provocateur qui me plaît. Il a sûrement envie de papoter, ne serait-ce que pour ennuyer Grumpy là-bas. Ce silence...je pourrais peut-être l’utiliser à mon avantage. Devoir communiquer par écrit ça me laisse le temps de réfléchir et d’éviter les pièges et les ornières. Ca me permet d’observer toutes ses réactions alors qu’il lit, les froncements de sourcils, les sourires en coin... Ma main s’avance à mi-chemin, vers le milieu de la table pour écrire quelques mots supplémentaires :
Quoi de neuf ? Ca va à l’hippoball avec Mr. Coucou ?
Ma plus reste sur le coin de la feuille pour dessiner un visage rond souriant et une main qui s’agite. C’est très schématique mais reconnaissable. Décidémment, je suis un mauvais élève aujourd’hui.
Non seulement c’était immature, mais ça ne cadrait pas non plus avec l’image que l’on avait habituellement de moi, comme pouvait en témoigner l’air (sans doute faussement) choqué de mon camarade. Puis bon, avouons-le, nous étions en tort ici. Parler dans la bibliothèque c’est vraiment pas un truc à faire ne serait-ce que par respect pour les autres usagers. J’étais conscient de toutes ces choses, mais le résultat suffisait à balayer mes remords ou ma culpabilité. Bertram doit se retenir, pour ne pas éclater de rire. Ses épaules qui tressautent, le poing contre la bouche, le regard qui n’assume pas. C’est beau de le voir comme ça, de voir que je suis capable de le faire rigoler, de lui accorder un moment de détente et de légèreté. Plus que de rire à ma propre blague, je suis heureux de l’effet qu’elle a eu sur mon public d’une seule et unique personne. Je pourrais même aller jusqu’à dire que j’en suis fier, ce qui transparait dans mon sourire, tout autant que je suis charmé par sa réaction, ce qui est évident dans mon regard attendrit.
Il fait pivoter la feuille et, curieux, mes iris se posent sur sa main, attendent de découvrir ce qu’il ajoute à notre conversation sur papier. Le verdict m’arrache un sourire, pretty accurate. N’est-ce pas ? Il fait plaisir de voir que, malgré tout, nous sommes tout de même capables de partager un moment de complicité. Ce n’était pas idéal, mais c’était mieux que rien. Voilà ce dont j’étais forcé de me convaincre. C’était la base, le début de tout, si on voulait espérer retrouver un jour une amitié normale. Je devais simplement faire l’effort, me motiver à rester gentiment à ma place et à ne rien espérer. À ne rien imaginer lorsque j’aperçois son regard ensoleillé qui emprunte des teintes de café. Une couleur riche, enveloppante, qui me rappelle ces fameux carrés de caramel mou que j’aime tant, à cause de la texture. Il n’y a que le grattement de la plume pour me tirer de mes rêveries, me faire porter de nouveau attention à sa main. Une pensée ridicule me traverse l’esprit, une pensée que j’enterre aussi tôt car je n’y ai pas droit. Vaut mieux porter attention aux mots, au message.
Quoi de neuf ? Vrai que nous n’avons pas véritablement discuté depuis un bail. Depuis le nouvel an, si on veut être précis. Depuis le fameux soir où notre relation avait connu des complications majeures. Il évoque aussi l’hippoball, parce qu’on vient de faire la blague deux fois et que c’est donc probablement plus facile de se lancer avec ça. Malgré moi, mon visage s’est fait songeur. Que répondre ? J’aurais préféré que l’on continue avec des banalités, des blagues, voir des insultes de plus si ça pouvait contribuer à sa bonne humeur. Parler de moi, de ce que je devenais depuis la reprise des cours, c’était nettement plus compliqué. Mais répondre de manière vide ou superficielle ne me faisait pas plaisir, ce n’était pas ce que je voulais. Pas avec Bertram. Sauf que c’est tout ce à quoi tu as droit, Ethan. Reste à ta place.
Pas grand-chose, j’étudie beaucoup. Mais je le vois encore envoyer la main dans mes cauchemars.
Et j’ai parlé avec Argus. Je n’ai pas cité de noms, mais il connait les grandes lignes. Il pourrait deviner que c’est toi. Non, je ne peux pas écrire ça. Je dois lui partager cette information, mais pas ici et pas comme ça. Sans compter que ça me frustre, cette voix qui me répète sans cesse que je devrais me sentir coupable, que je devrais m’en vouloir. Parce que c’est pas le cas. J’arrive pas à culpabiliser pour ce que je ressens, pour le meilleur comme pour le pire. Alors j’ai envie de profiter de ce moment, de retrouver un sourire et de simplement vivre avec lui. Dans l’instant présent, alors que nous sommes assis ensemble à notre table, j’ai envie d’oublier qu’il y existe un monde en dehors des limites de ce parchemin. Comme il est difficile de s’imposer le repentir lorsqu’on ne regrette pas. Mais je dois le faire pour lui. Stay in your lane, Stoker.
Et toi, comment va ? Vous avez repris les entraînements de Quidditch ?
Bertram Godfrey
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Re: Before I lose my mind again Jeu 7 Fév - 21:11
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Retenir un éclat de rire, c’est comme laisser tomber un sachet de clochettes sans faire de bruit - très difficile. Ca fait un peu mal aux côtes et aux joues surtout pour garder un air sérieux. Ah j’aurai tellement aimé pouvoir le laisser s’envoler celui-là, mais non il fallait rester approprié. Sinon monsieur le ronchon allait nous éjecter de la bibliothèque - impossible à envisager pour un serdaigle tel que moi. Mais trêve de plaisanterie, j’aperçois ton sourire qui se lit aussi dans le coin de tes yeux qui ont pourtant toujours l’air un peu tristes à cause de leur forme. Et ce regard se transforme et tes yeux se reposent sur moi.
C’est un regard qu’on ne peut pas feindre. Celui que j’ai porté sur Beckett et puis sur toi. Quand tu me le renvoies, j’ai cette sensation de douce chaleur et ce pincement dans le coeur. Mais je n’ai pas envie de ressentir ça. Je veux juste ressentir la légèreté d’un éclat de rire partagé avec un ami qui m’a terriblement manqué. Je déteste être si heureux de revoir ton regard tendre. Je déteste ce que je ressens là tout de suite. Je déteste tellement que tu- [....] [....] [....].
Je te fuis, couchant des pensées sur le papier. Je voudrais savoir comment tu vas. J’aimerai avoir le courage de te poser la question. Mais je suis un lâche et tu le sais déjà. Ne parlons pas des sujets qui fâchent. Sa réponse m’arrache un autre sourire en coin. Tes rêves peuplés de mains qui s’agitent ? J’aimerai bien voir ça. Ils sont mieux que les miens, peuplés d’êtres sombres qui me transpercent de coups de poignards à répétition dans le dos en soufflant dans mon oreille qu’ils sont désolé mais qu’ils ne peuvent pas s’en empêcher. Hello, darkness my old friend. Freud y verrait probablement une autre image sordide. Mais qui accorde encore un quelconque crédit à Freud en 2029 ?
Sa plume danse sur le parchemin au milieu des poussières étincelantes révélées par la lumière du soleil. Tant de poussières. Vous saviez que la poussière c’est principalement de la peau humaine ? Bref. Je lis avec attention. Comment je vais, hein ? J’aimerai bien te répondre, mais je te connais, si je te disais la vérité tu en ferais tout un plat. Ou peut-être que tu me surprendrais avec ce ton glacial pour me dire que je l’ai bien mérité ?
Oui, j’en ai eu un ce matin. Enfin si on peut appeler ça un entraînement. J’ai fait que des manoeuvres pour éviter les cognards.
J’exagère un peu mais c’était presque ça.
Nos batteurs ont encore besoin de pratique - mais ne le dis à personne !
J’attends qu’il ait terminé de lire pour faire mine de me gratter en dessous du menton et très subtilement de faire remonter mon index vers lèvres pendant un bref instant. Shhhh. Ca sera notre autre petit secret. J’aurai même pu y ajouter un petit clin d’oeil - mais désormais entre nous il y a des limites à ne pas dépasser. Je reprends ensuite ma plume pour pose une question tout à fait innocente :
Et Gus ? Qu’est-ce qu’il raconte ?
Ca fait un moment que je n’ai pas eu l’occasion de croiser le poufsouffle. Je me demande s’il va bien où s’il s’est encore vautré dans les ennuis. Il faudra qu’on ressorte tous les trois à l’occasion...peut-être pas tout de suite mais, un jour j’espère.
C’est minable. L’entraînement de Quidditich, sérieusement ? C’est pas ce que je veux savoir, c’est pas ce que je veux demander, pas ce que je veux dire. Non, je suis de mauvaise foi. Ça fait partie de ce que je veux savoir, ne serait-ce que parce que j’aimerais le connaître plus, me remettre à jour sur ce qui se passe dans sa vie, lui tenir compagnie plus souvent. Donc au fond oui, je veux savoir si le sport se passe bien, même si j’ose croire qu’on sait tous les deux qu’il y a tellement plus crucial. Ce qui est vraiment important, c’est ce que personne n’ose dire. Mais je dois me résigner, l’emporter dans le bras de fer silencieux qui se joue contre mon être borné, ma volonté d’être honnête et direct. Ce n’est pas un abandon. C’est comme les oiseaux : il faut les laisser partir. S’ils ne reviennent pas, c’est qu’ils n’étaient jamais à nous. S’ils reviennent, il faut en prendre soin jusqu’à la fin des temps. Mais pour ça, il faut arrêter de le pourchasser, ce fichu moineau. Plus facile à dire qu’à faire.
Sagement, je lis ce qu’il m’a écrit, à propos de l’entraînement. Ce matin même ? Et bien, il devait s’être levé très tôt pour ça. Mmh, des cognards hein ? N’en ayant jamais reçu un, j’ignore à quel point c’est douloureux, mais il est certain que j’ai pas envie de l’imaginer se faire chopper par l’une de ces choses. Au moins, à l’hippoball, on est plus civilisés. Remarque il y a des chevaux ailés en jeu, ça contribue probablement à rendre le sport moins violent. Il ajoute pour la blague que leurs batteurs ont encore besoin de pratique, ce à quoi le bleu joint un signe pour me demander de rester discret. J’y réponds d’un sourire amical, amusé par sa mimique. Mais est-ce que ça va m’empêcher de faire mon rabat-joie ? Ce serait mal me connaître.
Soit quand même prudent, ordre de ton médecin. Ça a l’air dangereux ces trucs.
Et je n’ai pas nécessairement envie de devoir lui réparer un bras cassé, ou pire encore. Vaut mieux ne pas imaginer, d’autant plus que Bertram vient de terminer la rédaction de sa prochaine question. J’y jette un œil curieux, déglutissant en voyant apparaître le nom de Gus. Je n’oserais pas parier, mais je crois que ma mâchoire s’est aussi crispée. Attendre à plus tard pour divulguer des informations c’était une chose, les omettre volontairement lorsque le sujet s’en rapprochait dangereusement en était une autre. Où commencer ? Que dire ? J’ai aucune idée de comment il va parce que j’ai passé une bonne semaine à l’éviter avant qu’il finisse par me confronter et que je lui raconte ce qui s’est passé ? Ce serait peut-être une bonne idée de le formuler autrement. J’attire le parchemin vers moi et trempe le bout de ma plume dans l’encrier, plongé dans mes pensées. Je ne suis pas un menteur. Je ne suis pas un cachotier. Puis il doit être au courant, si jamais quelque chose devait tourner mal ou si Argus venait à réaliser que un et un font deux.
Je suis désolé. J’avais besoin de parler à quelqu’un.
Mon bras libre est posé devant le papier et, je l’espère, lui bloque la vue alors que je marque une pause. Je réfléchis. J’ignore comment il va le prendre. Ce serait bien ma veine, d’enfin pouvoir échanger avec Bertram et de me tirer dans le pied, de l’éloigner aussitôt. C’est le prix de l’honnêteté.
J’ai pas donné de noms.
Il ne sait pas que c’est toi, tant et aussi longtemps qu’il ne le devine pas de ses propres moyens en tout cas. Je n’ai pas envie de le laisser récupérer le parchemin. Je pourrais le froisser dans mes mains, partir, le jeter dans un foyer quelque part ou laisser une chandelle lui offrir le baiser de la mort. Quand faut y aller. Je dépose ma plume et fais glisser le parchemin vers le milieu de la table, sans oser croiser le regard du Serdaigle. Je choisis plutôt de me détourner, ne sachant pas si j’ai envie de voir sa réaction.
Bertram Godfrey
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Re: Before I lose my mind again Ven 8 Fév - 14:06
Before I lose my mind again
Bertram Godfrey & Ethan Stoker
J’essaie de déchiffrer ton expression mais je n’y vois rien de plus que la concentration d’un élève studieux à lire le message que je venais de lui transmettre. Tu relèves la tête vers moi et sembles amusé par mon geste. Ta réponse ne se fait pas tarder et elle est plutôt prévisible. Je l’accueille néanmoins avec un sourire presque tendre. J’ai déjà encaissé quelques cognards tu sais. Je suis plus solide que j’en ai l’air mais toi...t’es toujours en train de t’inquiéter n’est-ce pas ? Je ne devrais pas prendre ça pour un traitement de faveur. Tu es comme ça avec tous ceux qui croisent sa route. Mais je mentirai en disant que ça ne me fait pas plaisir que quelqu’un d’autre que mes grands-parents ou que mon petit-ami s’inquiète de mon bien-être.
Je suis toujours prudent, doc.
J’avais eu très envie d’écrire “mon petit lapin” mais ce n’était pas raisonnable de faire référence à cette soirée. Je veux juste passer tu temps avec mon ami sans devoir y penser. Prendre des nouvelles. Rigoler. Papoter. Juste un moment de répit, un moment où j’ai l’impression que ce n’est pas la fin du monde. Que je ne suis pas le pire des connards. Ou je pouvais profiter de ton sourire sans me rappeler du son de ta voix qui se brise ou [....] [.....] [....] [.....] [.....]
Je change de sujet. Et Gus alors ? Ca fait un moment que je ne l’ai plus vu. Il s’est remis de sa gueule de bois ? Il a décidé ce qu’il allait faire de ses cheveux ? Hm ? Ta mâchoire se tend quand tu lis ma question. J’ai demandé quelque chose qui ne fallait pas ? Tu t’empares du parchemin et cache ton écriture avec ton bras comme si tu craignais que je copie sur toi. Ton visage se ferme quand tu écris et tu ne m’accordes plus aucune attention. L’atmosphère de ce silence a soudainement changé et je ne comprends pas pourquoi. J’aimerai pouvoir venir chatouiller du bout de ma plume ton avant-bras, te rappeler que je suis là. Mais je me suis imposé des limites et je compte bien les respecter.
Tu finis par me laisser lire son roman. Deux petites lignes de ton écriture un peu étriquée. Deux petites lignes qui me coupent le souffle. A chaque fois que je relis le sentiment de panique s’accentue, mon coeur bat de plus en plus fort dans ma poitrine alors que tout tombe en poussière autour de moi.Mes jambes qui s’étaient laissées allées reviennent vers l’arrière, les chevilles croisées et serrées alors que je construis tous les barrages pour masquer ma panique. Mes lèvres se retroussent, ma pomme d’adam monte et descend dans ma gorge sèche. Mon regard reste fixé sur les lettres.
Il l’a dit à Gus. Il l’a dit à Gus. Oui, il l’a dit à Gus et j’ai arrêté de respirer. Il l’a dit à Gus et c’est la seule information que mon cerveau peut assimiler les 20 premières secondes. Mes neurones s’agitent s’affolent. Il l’a dit à Gus qui connaît Beckett. Gus est loin d’être un idiot il sera capable de reformer le puzzle. je pourrais peut-être essayer de l’induire en erreur en prenant les devants, feignant l’inquiétude pour son camarade et lui demandé ce qui s’était passé - innocemment. Non, il suffirait simplement qu’on passe un petit moment tous les trois, qu’il croise un de ces regards de chiot amoureux qu’Ethan peut me lancer et il va découvrir le pot au rose. Le dire à Beckett. Et ça sera pire, 1000 fois pire des scénarios que j’ai pu imaginer.
Il l’a dit à Gus mais pourquoi ? Il m’avait promis - non - il m’avait dit que ça resterait entre nous ! C’est ça que vaut ta parole, Ethan ?! Au milieu de la panique, il y a brûlure acide de la trahison. Quelque part au fond de moi je sais que c’est logique, que j’aurai dû m’y attendre. Ethan qui parle trop et trop honnête, apparemment incapable de mentir ou de garder un secret. Un secret lourd qu’il n’était même pas obligé de garder. C’était normal. C’était censé. Mais moi, je lui avais fait confiance...Moi je l’avais cru. Quel crétin !
Une idée venimeuse se faufile sournoisement dans mon raisonnement. Immature et destructrice, elle me souffle : Et si tu lui révélais ce secret à propos de lui ?. Je la chasse rapidement, dégoûté. Moi, je connais le pouvoir ravageur que peut avoir un secret. Et révéler, même uniquement à lui, ce qui s’était réellement produit bien plus tard ce soir-là, ça revenait à le détruire. Hors de question.
Mes épaules se soulèvent pour inspirer. Je passe une main nerveuse sur mon front avant d’essayer de faire semblant de retrouver mon calme au moins. Pas un son n’est sorti de mes lèvres, même si j’ai envie de crier. Je reprends la plume pour noter :
Merci de l’avertissement.
Je ne le pensais pas. Je voulais lui demander pourquoi il avait fait ça, même si je connaissais déjà la réponse. Je lui en veux terriblement même si je n’avais pas le droit. Je ne pouvais pas m’empêcher de me sentir trahi. Mais avant de faire tomber la sentence, avant de partir et de tout déchirer et d'oser relever les yeux vers lui j’avais besoin d’en savoir plus.
Qu’est-ce que tu lui as dit exactement ?
Quelle version de l’histoire ? La dernière qu’il avait mentionné ou bien la vérité ? Celle où on était juste deux cons bourrés qui avaient eu envie de mettre un coup de boule ou bien….. Je devais savoir ce qui m’attendait au tournant. A quel point j’étais dans la merde.
La réaction met trop longtemps à venir. Ou alors c’est qu’elle dure trop longtemps. En même temps, à quoi est-ce que je m’attendais ? Ça aurait été tellement plus facile de répondre une platitude, de faire semblant qu’il ne s’est rien passé. Sans compter que ça nous aurait permis de passer un bon moment, de profiter de la présence de l’autre et de continuer à sourire à deux. Mais il a fallu que je vienne gâcher tout ça, que je laisse la vérité souiller cet instant de nuances sombres et effrayantes. Je ne peux manquer l’irrégularité de sa respiration, même en regardant ailleurs. J’ai merdé, encore. Ça va bientôt devenir une habitude, si ça continue. Bien que ça me fait me demander autre chose : est-ce qu’il en a parlé avec Beckett ? Serait-il aussi paniqué si c’était le cas ? Sa réaction, c’est celle de quelqu’un qui a peur. Ça me laisse un goût amer en bouche. C’est donc vraiment ça le plan ? Faire comme si de rien n’était, revenir me parler avec le sourire et ne jamais dire à personne ce qui s’est passé ? Oublier ce qu’il m’avait dit ce soir-là ? Ce qu’il avait ressenti ? Ce qu’il m’avait fait ressentir ?
Le parchemin revient vers moi. Merci pour l’avertissement. J’y ajoute mentalement un : asshole, parce qu’honnêtement ça complémenterait la phrase à la perfection. C’est l’impression que j’en ai en tout cas. Sans compter qu’il entre directement en mode damage control, en me demandant ce que j’ai dit. Bertram veut étouffer l’affaire, n’est-ce pas ? Ça ne me fait pas plaisir et, surtout, ça ne me donne pas envie de lui faire plaisir. Tu regrettes à ce point ? Parce que tu m’as menti ou parce que ça te ferait trop de mal d’admettre la vérité ? Je ne le saurai probablement jamais. Je baisse les yeux sur la feuille, laisse le bout de mes doigts en effleurer le grain alors que je réfléchis. Sauf que je ne consulte pas ma mémoire, ne consulte pas mon cœur. Je consulte cette boule de fierté qui remonte dans ma poitrine, cette tension dans ma mâchoire, cet égoïsme sain qui demande justice. Qu’est-ce que je lui ai dit exactement ?
La vérité.
Mais ça veut dire quoi ? Pour moi, qu’est-ce que ça représente ? Ne t’inquiète pas, je vais te mettre au parfum, pour le meilleur comme pour le pire. Je ne suis pas comme toi. J’assume mes erreurs comme j’assume mes sentiments, parce que c’est la seule façon d’être fidèle à soi-même et d’apprendre de ses erreurs. J’ai envie de croire que, malgré mes motivations, c’est aussi pour toi que je le fais. Parce que ça te ferait du bien d’arrêter de mentir à tout le monde. Y compris à toi-même.
Que j’ai merdé, que j’ai embrassé quelqu’un qui avait déjà quelqu’un d’autre. Que je sais que je pars avec un désavantage, que je saurai jamais si c’était sincère
Pause. Je respire profondément, mon regard perdu sur la feuille. Je suis vraiment en train d’écrire tout ça ? Ouais, puisque les mots sont là, juste sous mes yeux. Ça va trop loin. Je pourrai pas faire marche arrière, je saurai pas faire marche arrière. Mais n’était-ce pas précisément ce que je voulais ? Ça passe ou ça casse. Tout ou rien. Tu veux être fidèle à toi-même, Ethan ? C’est le moment. Assume. Si t'es capable de le dire dans son dos à Argus, t'es capable de lui dire en le regardant en face. Ne compromets pas qui tu es pour les beaux yeux de qui que ce soit. S’il était sincère, il comprendra, il pardonnera, il reviendra. Et sinon ? Alors il mérite bien que tu le secoues un peu, pour lui apprendre la leçon.
mais j’aurais aimé que ça le soit. Parce qu’au fond je ne regrette pas ce qui s’est passé autant que je le devrais.
Bonne chance pour faire du damage control avec ça.
Bertram Godfrey
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Re: Before I lose my mind again Ven 8 Fév - 16:55
Before I lose my mind again
Bertram Godfrey & Ethan Stoker
La vérité. Un mot qui laissait dans son chemin les pires horreurs du monde. La vérité. C’était quoi au fond sa vérité sur ce qui c’était passé ? Est-ce que ça valait la peine de revenir sur sa parole et de trahir un ami ? J’avais fait une erreur de calcul de croire qu’il pourrait tenir sa langue. Bon sang, sur le moment je l’aurai élevé au statut de saint et voilà qu’il avait tout balancé à Gus. Tout sauf mon nom apparemment.
Je suis en panique, je ne sais pas quoi faire - mais de toute évidence je ne peux pas compter sur Ethan pour m’aider. Ce lourd secret qui a pesé sur son coeur, il s’en est partiellement délesté. La conséquence de ses actes, c’est qu’il y a désormais un compte à rebours. Il faut que je le dise à Beckett avant que Gus ne réalise qu’il s’agit de moi. A la base je ne comptais pas lui dire. Pourquoi lui avouer un écart aussi mineur ? Aussi innocent ? J’étais avec lui, j’avais pris ma décision. Je l’aime. Mais au fil du temps, je réalisais qu’il n’était pas si facile de se défaire de ma culpabilité. Plus j’essayais, plus elle m’étouffait dans ses anneaux à l’image d’un python. Impossible de profiter le coeur léger de Beckett, et apparemment d’Ethan non plus. J’avais pensé à lui dire. 12 fois au moins. Mais ce n’était jamais le bon moment. Je n’avais pas envie de le faire, je repoussais la date, éternellement, espérant m’en tirer avec une sorte de prescription de mes actes.
J’avais tout perdu.
Mais le reste de ton explication réveille allume un troisième brasier au milieu du chaos. je saurai jamais si c’était sincère. Tu te fous de moi ?! Mon poing se serre. Panique. Trahison. Colère. Et en plus tu ne le regrettes pas ? Tu ne regrettes rien ? Une quatrième tornade : confusion. Non. Je sais. C’est ta façon de me dire...je sais ce que tu veux dire. Je presse sur la plume alors que je commence à écrire furieusement avant de rayer chaque début de phrase, insatisfait. La plume gratte le papier trop fort, mais je m’en fiche.
Tu crois que-
Tu crois que j’ai fait ça pourquoi ?! Pour le fun ?! Parce que j’avais juste envie de voir ce que ça ferait ? De tromper mon petit ami ce soir là ou d’ expérimenter ?!
Je-.
Je pense tout ce que je t’ai dit.
Dans ma tête, les cris que je devrais pousser se répondent. Comment tu peux dire ça ? Après tout ce qui s’est passé - comment tu peux douter de ma sincérité quand - [....] [...]
Ces cris de silence résonnent haut et fort dans ma tête.
Tu ne me peux pas me trahir et puis me dire ce que tu ressens. Tu ne peux pas me poignarder dans le dos et puis jouer cette carte là. La vérité ? Ce n’est pas la vérité. Je ferme les paupières un instant, les sourcils froncés. Ma main droite passe sur mon front, mes doigts nerveux se crispent dans mes cheveux avant d’inspirer. Ca ne sert à rien. Je ne vais pas tomber dans ce piège que tu me tends.
Tu me donnes mal au crâne. Mais ça doit être ma tension artérielle qui a grimpé l’Everest.
Je ne peux pas te gérer maintenant alors que je ne peux pas me gérer moi.
Je relève les yeux vers lui. Ca ne sert à rien. J’aimerai pouvoir lui crier toute ses choses, le pousser. Le traiter de salaud, oui lui, pour une fois ça me changerait. Il me rend fou et j’aime pas ce qu’il me fait. L’air sérieux, je rebaisse le nez pour ranger mes affaires. Il ne posera jamais les yeux sur mes réponses avortées. S’il veut une réponse, il devra venir la chercher. Ca me demande un effort considérable de mesurer chacun de mes geste pour qu’il soit normaux. Ne pas tout fourrer dans mon sac. Ne pas tirer brutalement cette chaise. Ne pas presser le pas vers la porte et la claquer.
J’expire.
Je n’ai plus le choix maintenant. Je n’ai surtout plus de temps.
Est-ce que je vais regretter ce que j’ai écrit ? Mais que se serait-il passé si je ne l’avais pas fait ? Les remords auraient été bien pires. Il mérite de savoir, il doit savoir. Même si ça revient à dire que j’ai indirectement manqué à l’une des choses que je lui ai dites, à savoir que je ne lui causerais pas d’ennuis. Certes, je ne l’ai pas fait directement et une personne moins droite pourrait se réconforter comme ça. Techniquement je suis pas celui qui le dirait à Beckett avant toi. Techniquement j’ai pas donné de nom alors il pourrait ne jamais faire le lien et sinon bah, tant pis, mais au moins c’était pas moi. Sauf que ça, c’est pas moi non plus. Je sais qu’il m’en veut, je sais que quelque part je le mérite. Et, là encore, je ne le regrette pas autant que je le devrais. Je suis en paix avec ma décision, même si je sais que je vais en souffrir. Je sais que, d’ici quelques semaines, quelques mois, je vais repenser à ce moment en me disant que, peu importe les conséquences, j’ai fait la bonne chose dans mon contexte. J’ai pris la meilleure décision que je pouvais en fonction de ce que je sais, là maintenant. Et c’est l’important.
Ceci dit, au moment présent, il est autrement plus compliqué de gérer ce qui se déroule sous mes yeux. La panique avec laquelle gratte sa plume, furieuse. Il se corrige, raye des mots que je ne peux pas lire, semble buter sur lui-même. Le voir comme ça me fait souffrir. À croire que l’on me triture les côtes pour s’enfoncer jusqu’à mon cœur d’une poigne vengeresse. C’est ma faute, j’ai causé ça. Sa peine, sa détresse et sa colère. J’ai fait le choix d’assumer et, maintenant, le prix à payer m’apparaît si élevé. Mais c’était la bonne chose à faire. La seule, vraiment, qu’il s’agisse d’un point de vue moral ou même d’un point de vue intéressé. Aurais-je été capable de faire comme si de rien n’était, d’être son ami et d’oublier, moi aussi, ce qui s’était passé ? Non, ça aurait fini par se briser. Je serais parti. Je l’aurais perdu et inversement. On a déjà établi que je ne voulais pas ça et, s’il avait été sincère, lui non plus. Ce n’est pas le mensonge ou le secret qui aurait réparé nos pots cassés. Et là, est-ce que je pense vraiment qu’on peut revenir de ça ? J’en ai aucune idée.
Je suis tellement désolé, Bertram.
J’aimerais pouvoir poser ma main sur la sienne, l’apaiser. Mais j’ai pas ce droit-là, pas quand il est comme ça par ma faute. Alors je me mords l’intérieur de la joue, je laisse le goût de mon sang me rouler sur la langue et étouffer tous les mots que je serais tenté de prononcer. Il s’agit probablement de l’une des choses les plus dures que j’ai faites de ma vie. Croiser son regard contrarié, lire la douleur de la trahison dans les tréfonds de ses yeux bruns. Demeurer impassible alors que Bertram rassemble ses effets personnels, chaque item évoquant une partie de lui qu’il décide de soustraire à mon regard. Cette plume c’est son sourire. Ce parchemin c’est son cœur. Ce manuel scolaire c’est son amitié. Lorsqu’il a fini de rassembler tous ses morceaux, le Serdaigle quitte la table, se dirige vers la sortie. Je ferme les yeux, attends d’entendre la porte qui se referme dans son sillage. Il est parti.
J’ai envie de le suivre, envie de m’excuser, d’expliquer, de le rassurer en lui disant que je n’attends rien de lui au fond et qu'il peut tout aussi bien oublier ce que j'ai écrit, que ça me va de rester amis. Je devrais lui dire que je regrette ce que j'ai fait, que je sais que je n'aurais pas dû. Je devrais implorer son pardon et lui dire que j'accepterai les conséquences qu'il juge nécessaires. J'ai envie de faire n'importe quoi, si ça peut sauver les meubles. Si ça peut préserver la moindre once d'affection qu'il porte encore en son coeur pour moi. Sauf que ce serait très con. Je viens de faire trois pas en avant, pas question d’en faire deux vers l’arrière. Laisse-le partir. Tu as dit ce que tu avais à dire. Ne le retiens pas s’il n’a pas envie d’être ici. S’il n’a pas envie d’être avec toi. Je pose mon front contre la table de bois, entoure ma tête de mes bras pour me cacher. J’inspire, j’expire. J’inspire, j’expire. Reste. Là. Tu ne le suis pas.