[SPEED-DATING] A cœur vaillant ... ☾ Vanyar

A cœur vaillant rien d'impossible

Qu’est-ce qui était passé par la tête d’Hécate, sérieusement ? S’inscrire à un speed-dating … on a pas idée ! Alors qu’elle finissait de se préparer, tout en se lavant les mains toutes les cinq minutes (mains moites oblige), elle listait tout ce qui risquait de mal se passer. Elle pourrait tomber dans un piège tendu par d’autres élèves. Elle pourrait se retrouver face à une fille, ce qui en soit ne la dérangeait pas tant que son interlocutrice ne la prenait pas pour une compagne potentielle. On pourrait se moquer ouvertement de sa tenue. Elle pourrait perdre patience …

Le rêve de la nuit dernière lui revint en mémoire. Elle était dans sa robe noire, banale, et se rendait dans la grande salle comme annoncé sur le carton. Tous les regards se braquaient sur elle. Les rires mesquins commençaient à tinter à ses oreilles, certains souriaient ouvertement, mauvais. Hécate s’avançait dans la salle, et trébuchait sur sa robe, qui se fendait en deux devant toute l’assistance. Ses yeux s’étaient soudain mis à couler comme le Titanic, laissant l’eau salée emplir lentement les couloirs de leur détresse. La vision brouillée, elle sentait son cœur s’exciter. Chaque palpitation de ses veines semblait dédoublée, et ses ongles taillés finement prenaient des proportions animales. Un vague “regardez, elle n’a même pas pris le temps de s'épiler ! Affreuse !” confirma ses pires craintes. A la fin, elle dansait seule dans la Grande Salle, au milieu des corps, la robe maculée d’un noir différent : celui du sang de ses camarades.

Hécate fixa son reflet. De petites routes avaient vu le jour sur ses joues à peine maquillées, prenant leur source dans les prunelles paniquées de l’enfant. Elle tenta de sécher tout ces dégâts, et songea à appeler Olympe, pour faire disparaître cette vague de panique bien différente de celle des autres participants. Mais non. Il était temps qu’elle grandisse. Qu’elle s’assume, prenant exemple sur son alpha. Le Loup-Garou ne s’éveillerait pas, il n’y avait aucune condition réunie pour que cela se produise. Elle passerait une soirée normale. Ferait des rencontres intéressantes. Et tout se passerait pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Elle finit par quitter la tour des Serdaigle, avec un sourire crispé et loin d’être aussi naturel qu’elle l’aurait souhaité. Parmi les gens qu’elle devait rencontrer ce soir, elle reconnut quelques visages dont ceux du duo inséparable formé par Jordan et Jay. Elle aurait voulu commencer la soirée par un visage familier, partager ses impressions et son ressenti avec une personne en qui elle avait confiance. Quelqu’un qui ne l’applatirait pas, qui la mettrait en confiance. Oui mais voilà, le destin n’avait jamais joué en sa faveur.

Quoi que. Hécate prit place à une table qu’elle pensait libre, et dont l’un des sièges s’était rempli pendant qu’elle regardait derrière elle. Si bien qu’elle se cogna à la sienne, maladroite comme jamais, et s’installa sans même penser à demander l’avis de son interlocuteur. Un jeune homme. Un Serdaigle même, Hécate en était certaine. Quant à son nom … elle avait du mal à retenir les appellations des gens qui ne lui causaient pas du tort. Ce qui du coup était plutôt bon signe dans le cas présent. Les mains crispées sur sa robe, elle tenta d’engager le dialogue.

“ - Bonsoir. Je m’appelle Hécate, nous sommes de la même Maison je crois.”, voilà à plus. Non, reste Hécate, persiste, lutte ! Elle chercha un sujet de conversation sans grand succès. “Je ne pensais pas qu’il y aurait autant de monde ! Ça semble plutôt équilibré en terme de genre. Je n’aurai pourtant pas parié un dessin sur une réussite !” bonne idée, de se reporter sur quelque chose que tu apprécies ! Serait-ce trop prétentieux de se lancer sur un sujet que tu estimes maîtriser ? Les garçons apprécient de mener la conversation, non ? “Je suis désolée, je n’ai pas trop l’habitude … ce n’est pas quelque chose que l’on pratique à Beauxbâtons. Pas comme ça, du moins.”. Stop. Arrête. Respire, calme-toi, laisse-le en placer une. Pour tenter de contrôler son appréhension, Hécate tenta d’examiner son interlocuteur plus en détails, sans imaginer une seule seconde que ça pourrait être déplaisant pour lui. Il avait de drôles d’oreilles, non ?

A cœur vaillant rien d'impossible

Si un jour quelqu’un écrit une biographie sur Hécate, elle sera sûrement intitulée “L’art de mettre les pieds dans le plat”. Oui, c’était certain, les oreilles de son interlocuteur étaient quelque peu étranges. Sans quoi il ne se serait pas empressé de les cacher. Hécate aurait voulu lui dire qu’elle s’en fichait, qu’elles étaient rigolotes. Comment pourrait-elle se permettre de juger, quand une épaisse fourrure recouvrait tout son corps chaque soir de pleine lune ? Cette pensée la fit défaillir, de nouveau. “Tu es le loup, pas l’inverse. Maîtrise-le, tu tiens la bride bien serrée, et il te ne dictera pas tes pensées”, lui aurait sûrement dit Olympe. Etre comme elle, comme l’Alpha ! Maîtriser ses émotions, et chasser la bête au loin.

Elle reporta son attention sur le dénommé Vanyar, dont le nom semblait résonner comme une chanson. Ça lui paraissait mystique, glacial, épique. Il allait plutôt bien à ce garçon, à priori. Son aspect avait quelque chose d’étonnant sans provoquer une envie de fuite. Son visage et ses yeux gelaient le sang d’Hécate, sans pour autant la terroriser. Finalement contre toute attente, elle souhaitait en savoir plus. “Depuis cette année seulement, Poudlard reste encore un univers tout neuf pour moi. Mais j’espère pouvoir rester plus longtemps, je trouve l’ambiance bien plus appréciable.” et pour cause, à Beauxbâtons on est moins respectueux des hybrides. “Tu as peut-être eu le temps de franchir le portail pour explorer Beauxbâtons ?”.

“Je crois que tu es un peu plus vieux que moi, j’imagine que tu es en licence ?” elle réfléchit un instant, sans trop savoir où poser son regard. “Je te verrais bien … en langues et cultures magiques ! Mais j’ai rarement juste.”, ça, c’est un fait. Hécate laissa son regard se promener sur la salle, avant de se dire que Vanyar risquait d’interpréter ça comme de l’ennui. Ce qui était loin d’être le cas. Finalement, n’y tenant plus, elle sortit un vieux feutre de la poche de sa veste, et se mit à griffonner quelques motifs sur un mouchoir en papier. Comme ça elle n’aurait plus de soucis quant à savoir où déposer ses mirettes.

Elle réfléchit un instant à un moyen de relancer la conversation. “J’avais peur de tomber sur quelqu’un de moins … sympathique, je suis plutôt contente. Je voyais surtout ce moment comme un moyen de sortir de ma zone de confort et de rencontrer du monde. C’est peut-être aussi le cas pour toi ?” de mémoire, jamais Hécate n’avait été si bavarde. Peut-être le stress ? Pourtant son interlocuteur ne la mettait pas dans une situation inconfortable.

A cœur vaillant rien d'impossible

Le petit cœur d’Hécate venait de subir un ascenseur émotionnel absolument pas anticipé. D’abord la joie de se dire que Vanyar était en artisanat magique. Un artiste à sa façon. Ils n’étaient peut-être pas si différents ? Et ensuite une question qu’elle ne s’était jamais posée : quelle licence choisirait-elle ? Son choix se porterait tout naturellement sur une filière proche du dessin, si la jeune fille n’était pas si compliqué. Après tout, son père lui avait toujours appris à peser ses décisions, à envisager tous les choix possibles. Quels genres de choix étaient proposés à Poudlard ? N’était-il pas trop tard pour se renseigner ? Et pourquoi personne ne l’avait interrogé plus tôt ? Elle ressentait tout à coup le poids de la hâte, de l’orientation à la dernière minute, qui plombait ses épaules. Si elle n’était pas assise, Hécate aurait sûrement courbé l’échine.

Après une absence passagère, elle se remit dans le contexte. Ce n’était pas le moment de se détruire le moral, ni même d’y penser. Elle tenta d’afficher un sourire agréable, qui donnait probablement une grimace très désagréable à soutenir. “Excuse-moi. Artisanat magique ? Donc tu dois être habile de tes doigts ! Tu es doué dans quelle branche ? Enfin, quel genre de produits ? De …” aïe, elle s’emmêle Hécate, ça y est, la jauge de panique est à son comble. Elle se tait, sans terminer sa phrase. Avec un peu de chance, ce serait suffisant pour que Vanyar la comprenne. Sinon elle devrait se débrouiller autrement. Elle respira un grand coup. Il fallait clore la question avant qu’elle ne fasse tourner la tête d’Hécate. “Je ne sais pas … je n’y ai pas réfléchi.”, et si Vanyar lui faisait la leçon … eh bien elle regretterait définitivement d’être venue, c’est tout.

Mais il n’avait pas l’air dans ce genre-là. Il s’efforçait de lui sourire, et Hécate sentait bien qu’il était aussi mal à l’aise qu’elle. Ah non, plus maintenant. Sa dernière phrase tournait comme un mot gentil, un compliment, et la jeune fille se sentit rougir de la tête aux pieds. Que répond-on déjà à ce genre de politesse ? Merci ? C’est pas grand chose, merci. Et comment enchaîne-t-on ? Elle venait déjà de lui dire qu’elle était contente d’être tombée sur lui, ils n’allaient pas tourner autour de ça toute la soirée, si ? Que pouvait-elle ajouter ? L’ombre de son orientation indéfinie continuait de planer au-dessus d’elle, prête à fondre sur ses cheveux indisciplinés pour lui pourrir la soirée. Le peu de courage qu’elle avait acquis prenait son envol, elle perdait ses moyens. Elle le sentait.

Allons, Hécate, tu rencontres ce garçon. N’as-tu pas envie d’en savoir plus sur lui ? Quelles sont les questions basiques que l’on pose à quelqu’un ? “Sinon … tu fais du sport ? Je n’ai pas souvenir de t’avoir vu dans une des équipes de Serdaigle.” en même temps, Hécate arrive toujours en retard aux matchs. Qu’il s’agisse de Quidditch, ou d’Hippoball. Même combat. Cette question lui semblait être d’une banalité affligeante, mais au moins elle comblait le silence. Ce vide pesant durant lequel tous les autres sens sont développés, et qui aiguise les nerfs. Elle aurait aimé qu’il l’aide à relancer la conversation. Peut-être qu’elle ne lui laissait pas suffisamment de temps pour le faire ? Mais la patience n’a jamais été son fort …

Le regard d’Hécate coulisse de nouveau hors de leur petit cercle privé. Et il se pose un peu plus loin, là où le premier portail avait fait son apparition, quelques semaines plus tôt. Ne songeant même plus aux sujets dignes d’intérêts ou non, elle se lança. “Au fait … que penses-tu de ce qui se passe … ces derniers temps ? Tu as un avis sur la question ?”. Il était vrai qu’elle n’en avait parlé avec personne. Et rien ne fuitait. Certains en discutaient constamment, avançant des pistes foireuses. D’autres faisaient comme si de rien était. Tout ça angoissait d’avantage Hécate. Peut-être qu’un élève plus âgé aurait plus d’informations ? Certes, c’était loin du thème de la soirée, mais la jeune demoiselle ne s’était de toute façon pas fixé pour objectif de trouver un valentin. Et ce n’était apparemment pas non plus la finalité de Vanyar. Alors autant mettre ce moment à profit.

A cœur vaillant rien d'impossible

Il était gentil Vanyar, à tenter de la rassurer. Mais une horloge n’arrêtait plus de tinter dans l’esprit d’Hécate, et elle ne se stopperait que quand la jeune femme aurait fait son choix. Ça, elle en était convaincue. Quelques mois. Il ne restait que quelques mois. Mais pour ce soir, Hécate était sensée s’amuser, se distraire, faire des rencontres. Elle prit donc sur elle pour chasser cette idée redondante de son esprit. Apparemment, sa question avait mis Vanyar mal à l’aise. Peut-être aurait-elle dû y penser avant ? Mais le mal semblait déjà fait. Elle s’efforça de sourire à son interlocuteur. En espérant que ce qu’elle tentait de faire passer pour un signe réconfortant ne ressemble pas à une grimace.

Hécate faisait de son mieux pour ne pas fixer Vanyar, mais quand celui-ci se mit à gratter son oreille, elle ne put s’empêcher de l’observer de nouveau. Quelle drôle de forme ! Un peu comme celles d’un animal. Ou d’une créature hors du commun. Peut-être que Vanyar était différent, lui aussi ? Elle n’osa pas lui poser la question. De toute manière, éviter la question était son seul choix si elle voulait éviter de penser à sa propre nature. Décidément, quelle drôle de rencontre ! Et Hécate avait réussi à la rendre glauque, par-dessus le marché. “Je ne sais pas … comme toi je trouve ça inquiétant. Je t’avoue que j’évite de trop m’amuser avec ces portails, mais la curiosité finit toujours par nous rattraper.” n’est-ce pas ?

Peut-être devrait-elle tenter d’orienter la conversation autrement ? “De toute manière je pense que les directeurs savent ce qu’ils font, non ?” oui certainement. On ne devient pas directeur au hasard, pas vrai ? Voilà qu’elle tentait de se réconforter elle-même. Son ventre se tordait dans tous les sens, et Hécate commençait à redouter un borborygme bien gênant. Elle s’empara donc d’un gâteau à la volée, qu’elle engloutit rapidement en plusieurs bouchées. “Tu devrais les goûter, ils ne sont pas mauvais du tout !”, de nouveau un blanc dérangeant. Pourtant Hécate ne savait plus comment relancer la conversation. Peut-être que Vanyar attendait juste qu’elle se taise enfin pour poser des questions, ou pour prendre la fuite en direction d’un autre binôme … Ce ne serait pas la première fois qu’elle ferait fuir quelqu’un.