[Cours de Divination] Ouvert à tous o/

Taylor resserra son gilet duveteux sur ses épaules alors qu'elle remontait le couloir en compagnie d'Abena, Raptor caquetant sur ses talons. Elle n'avait pas prévu d'autre pyjama que son préféré lorsqu'elle avait fait ses valises en partant du Texas et malheureusement le satin rose, bien que fluide et douce sur la peau, ne gardait pas beaucoup la chaleur. Son short était adorable avec son ruban qui formait un petit nœud sur le devant, mais l'hiver anglais n'avait rien à voir avec celui du sud des États-Unis. Par contre ses chaussons moelleux ornés de têtes de lion rugissantes l'isolaient correctement du sol froid de Poudlard et elle en était reconnaissante.

- Il faut qu'on écrive un texte pour recruter des membres pour l'équipe d'hippoball, répondit-elle à Abena. Et qu'on trouve quelqu'un pour nous faire du beatbox, tu sais que je suis incapable d'en faire sans cracher partout.

Ce n'était pas faute d'avoir essayé lors des nombreuses soirées passées en tête à tête entre les murs de leur chambre.
Taylor suivit sa colocataire tandis que celle-ci lui ouvrait le passage, saluant à son tour la professeure de divination et emportant les objets qu'elle lui tendait d'un coup de baguette – avec son unique bras il lui était difficile de faire autrement. Ne voulant pas s'encombrer pour cette nuit passée en communauté elle avait préféré laisser tout ce qui n'était pas essentiel dans son dortoir – à savoir sa prothèse – et Abena s'était proposée pour transporter le reste à l'intérieur de son masque fétiche – à savoir sa trousse de maquillage sans fond, plusieurs rouleaux de cours qu'elle souhaitait revoir et le coussin de velours de Raptor. Taylor aimait voyager léger.
Abena s'éloigna en direction de Madame France et Taylor décida de s'installer le plus confortablement possible, à la fois impatiente de retourner à ses études et désireuse de ne pas attirer l'attention de la professeure de botanique. Elle ne pouvait nier qu'une certaine honte coupable de s'être un jour introduite illégalement de sa serre lui serrait les tripes à chaque fois qu'elle était en sa présence.
Ce n'était pas la première fois qu'elle se rendait aux cours de divination informels de Madame Adams, aussi trouva-t-elle sa place contre le mur avec l'aisance de l'habitude. Ordonnant de sa baguette à son verni de lui faire les ongles, elle entreprit de relire ses notes de droit magique avec un soupir de contentement. Taylor aimait l'ambiance feutrée de la salle de divination, les murmures discrets, les tisanes brûlantes et les odeurs propices à la détente qui y flottaient toujours. Cela lui rappelait un peu ses études à Ilvermorny, la plongeant dans une mélancolie douillette. Raptor était partie faire une évaluation des lieux, mais elle reviendrait bientôt se coucher sur son coussin auprès de sa maîtresse, comme toujours. Sauf si un imprudent lui tirait les plumes.
Un garçon qu'elle ne connaissait pas vint bientôt prendre place sur le matelas violet à côté du sien et Taylor lui adressa un sourire amical. Elle ne put que remarquer la qualité de ce qu'il portait et son sourire se fit complice.

- Très beau pyjama.

Elle était prête à approfondir la discussion avec son compagnon de vêtement de satin quand un bruit de bousculade lui fit lever la tête et qu'un oreiller rempli de quartz lui atterrit dessus, ruinant le verni de ses orteils avant de s'immobiliser sur ses genoux. Tant pis, elle recommencerait. Elle posa son rouleau et sa baguette avant d'attraper l'objet du crime et s'apprêtait à le retourner à son propriétaire quand elle le reconnut. Taylor savait qu'entre Beckett et elle le courant ne passait pas vraiment, pas depuis ce cours fatidique où ils avaient été mis ensemble, mais elle garda néanmoins une expression amène. Qu'il ne l'aime pas ne signifiait pas qu'elle devait être malpolie.

- Tu ne t'es pas fait mal ? Fais attention, ce n'est pas bien de jeter son oreiller sur les handicapés.

Sa remarque se voulait humoristique et légère. Mais au fond, tout au fond d'elle-même, Taylor savait que cette pique discrète ne resterait pas sans conséquences. Et elle s'en amusait d'avance.

Abena revint pile au moment où son voisin commençait à s'inquiéter de la grande liberté de sa mygale. En bonne campagnarde Taylor n'avait jamais vraiment craint les araignées sans les apprécier plus que cela pour autant, mais elle devait avouer que Anansi était impressionnant. Si elle n'avait pas vécu avec durant les derniers mois, elle se serait sans doute méfiée également. Heureusement sa maîtresse prenait grand soin de lui et était assez prévenante des peurs des autres pour ne pas créer d'accident ; si Abena disait qu'il ne bougerait pas, alors il ne bougerait. Mais juste pour mettre leur compagnon de la soirée un peu plus à l'aise, Taylor s'arma d'humour.

- Tu interceptes les oreillers volants et moi j'intercepte les araignées baladeuses, d'accord ?

Elle lui fit un clin d’œil et un nouveau sourire pour sceller leur marché avant de se tourner vers sa colocataire qui venait de s'installer à ses côtés. Abena souriait, ce que Taylor savait difficile, et c'est avec plaisir qu'elle lui tendit le pot de verni rose qu'elle était entrain d'utiliser. Elle espérait secrètement que Beckett allait dormir du côté peinturluré de son oreiller et se réveiller avec des tâches roses sur le visage le lendemain.

- Tu m'aides pendant que je m'occupe de Raptor ?

La poule avait fini par revenir au milieu de l'agitation générale et il suffit à Taylor de tapoter le coussin de velours qu'elle avait amené pour qu'elle s'y installe aussitôt. S'armant d'un deuxième pot de verni, rouge celui-ci, elle s'attaqua à lui faire les griffes. À côté d'elles les garçons échangèrent quelques mots, pour savoir qui ronflait, qui volait les couvertures dans son sommeil, qui était somnambule. Elle réalisa alors que si Abena était habituée à ses séances de révision nocturnes ce n'était pas le cas de tout le monde et qu'elle devrait peut être les prévenir.

- Est-ce que la lumière vous dérange ? Je lis souvent tard le soir, mais je peux le faire sous ma couverture si besoin.

Pas le plus évident, mais elle était prête à ce sacrifice. Une fois sa poule coquettement apprêtée Taylor la laissa se coucher et se tourna vers sa colocataire en lui faisant signe que c'était à son tour de se faire pomponner. Soleil arriva à ce moment-là, son chat sous le bras, et elle la salua en agitant son pinceau plein de verni dont quelques gouttes volèrent ici et là.

- Soleil ! Tu veux te joindre à nous ? C'est session manucure.

Elle parlait en chuchotant pour ne pas déranger l'ambiance tranquille de la salle de divination et le sommeil des couches-tôts.